Les réactions continuent de tomber au sujet de l'instauration de la commune rurale de Minembwe dans la province du Sud-Kivu. Cette installation a, cependant, été annulée par le chef de l'État Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo la semaine dernière. Il l'a annoncé lors d'un point de presse tenu à Goma.
Dans une interview accordée à 7SUR7.CD ce mardi 13 octobre 2020, Mahoro Peace Association (MPA), une structure des Congolais basée aux États-Unis d'Amérique, estime que la décision du successeur de Joseph Kabila Kabange a été "malheureusement" prise suite à la pression de certains politiciens populistes et des groupes extrémistes qui sont montés au créneau avec des discours mensongers et discriminatoires contre les Banyamulenge.
Selon Jacques Murinda, vice-president de MPA, au lieu d'annuler cette installation, le président Tshisekedi aurait envoyé une commission pour tout simplement vérifier les limites de la commune de Minembwe.
(Ci-dessous, l'intégralité de l'interview)
7SUR7.CD : L'installation du bourgmestre de la commune rurale de Minembwe au Sud-Kivu reste toujours d'actualité en RDC. Cette démarche a été annulée par le chef de l'État, qui a annoncé la mise en place d’une commission composée d’experts scientifiques pour clarifier les choses et retracer toutes les limites des communes concernées de Hauts Plateaux de Minembwe. Comment jugez-vous la décision de Félix Tshisekedi ?
Jacques Murinda : Nous déplorons le fait que la décision du chef de l'État (Felix Tshisekedi ndlr) ait été prise à cause de la pression des politiciens populistes et des groupes extrémistes qui sont montés au créneau avec des discours mensongers et discriminatoires contre une communauté (Banyamulenge ndlr) pour s’opposer à l’installation de la commune de Minembwe qui pourtant sert toutes les communautés Congolaises de cette contrée du pays. Au lieu de sursoir l’installation de cette commune qui est d’une importance capitale dans la restauration de l’autorité de l’État dans une région troublée par les miliciens Maï-Maï qui tuent, pillent et brûlent tout ce qui a rapport avec les Banyamulenge au nom du nationalisme et l’absence quasi-totale de sécurité, le président de la République aurait dû envoyer une commission pour tout simplement vérifier les limites de la commune de Minembwe sans sursoir son installation. Lesdites limites sont reprises en annexe du décret N° 13/029 du 13 juin 2013 de sa création. Vous pouvez bien remarquer que ses limites ne dépassent pas 10 km carré et le processus de la création de cette commune n’a pas été singulièrement différent de celui des autres créées par le même décret. Il a suivi les mêmes normes comme toutes les autres communes. Les mensonges délibérés autour de cette commune sont tout simplement dus au fait que les Congolais Banyamulenge habitent en majorité cet espace communal. C’est deplorable parce qu’il y a des Congolais qui croient avoir le droit de refuser aux autres Congolais l’accès à une entité administrative légalement établie.
7SUR7.CD : La polémique concerne aussi les habitants de Minembwe qui sont majoritairement Banyamulenge. Est-ce que Mahoro Peace Association (MPA) considère les Banyamulenge comme des Congolais ?
Jacques Murinda : Les Banyamulenge sont des Congolais à part entière. Nous remercions le président Felix Tshisekedi qui l’a rappelé à certains compatriotes dans une de ses conférences à l’extérieur du pays. Mais nous tenons à fixer l’opinion sur le fait que les Banyamulenge sont des Congolais d’origine parce qu’ils étaient sur le territoire qui allait devenir l’État Indépendant du Congo (EIC) en 1885, le Congo Belge en 1908, et l’actuelle RDC. S’agissant de l’antériorité du peuplement des hauts plateaux d’Uvira, Mwenga et Fizi. Les Banyamulenge s’y battirent avec les lions et les autres animaux sauvages pour gagner des prairies pour leurs bétails au début du 20ème au moment où les autres tribus du Sud du Sud-Kivu s’étaient sédentarisées dans la plaine de la Ruzizi et le moyen plateau plus favorables à l’agriculture. À ce titre, pour confirmer ce fait historique, nous demandons au gouvernement de mettre en place une commission pour étudier et trancher sur cette question qui pose polémique parce qu’il ya suffisamment des preuves confirmant cette vérité historique. Il faudrait savoir que les différents épisodes de négation de la nationalité congolaise aux Banyamulenge ont toujours été des manœuvres discriminatoires et raciales forgées par des politiciens populistes en mal de positionnement et des régimes échéants qui prennent les Banyamulenge pour bouc émissaires. Nous dénonçons la descrimination et les discours de haine à caractère racial contre les congolais Banyamulenge propagés actuellement dans le médias sociaux fondées sur des théories conspiratoires irréelles dignent des filmes hollywoodiens.
7SUR7.CD : Les gens qui s'opposent à l'instauration de Minembwe en commune évoque le plan de balkanisation du pays derrière cette démarche. Pensez-vous aussi que l'installation de la commune de Minembwe risque de désamorcer le processus de balkanisation de la RDC ?
Jacques Murinda : Dire que l’installation de la commune de Minembwe contribue à la balkanisation de la RDC c’est faux et archi-faux. Minembwe est une commune de 10km carré elle est à plusieurs centaines des kilomètres des pays voisins. C’est une commune isolée, née de la nécessité de rapprocher l’administration des administrés. Ceux qui entretiennent ce mensonge sont des pyromanes. Ils sont aussi des ignorants ou anti-Banyamulenge mal intentionnés qui n’aiment pas sincèrement la RD Congo parce qu’ils sèment la division et la mort au sein de la population des hauts plateaux. Ils fragilisent la RDC en général. Ils ne sont pas des rassembleurs, ils sont des divisionistes. Il suffit de voir les images de l’installation de cette commune comment les habitants de Minembwe, toutes les communautés confondues dansaient avec joie pour célébrer cette entité administrative devant les délégués gouvernementaux malgré le fait qu’ils soient victimes d’une guerre injuste qui continue de les dépouiller et de les déshumaniser depuis avril 2017.
7SUR7.CD : Selon votre association, le ministre de la décentralisation et réformes institutionnelles Azarias Ruberwa devrait-il démissionner ?
Jacques Murinda : Nous considérons que l’acharnement contre le ministre de la décentralisation son excellence Azarias Ruberwa constitue tout simplement une cabale monter contre lui et entretenue par ses détracteurs politiques. Ceci, malgré le fait que le ministre de l'intérieur du Sud-Kivu (Lwabanji Lwasingabo ndlr) qui a présidé cette cérémonie a confirmé le fait que le ministre de de la décentralisation comme les autres ministres et généraux sur place à Minembwe le jour même de l’installation n’avaient pas participé à la cérémonie. Ils étaient sur place dans un autre cadre ayant trait avec leurs propres missions. Cette cabale est montée contre lui tout simplement parce qu’il est issu de la communauté Banyamulenge. D'ailleurs, il suffit de voir les médias actuellement, ils ne parlent plus d’autres dignitaires du régime qui séjournaient à Minembwe dans le cadre de la caravane de paix au moment des faits.
Interview réalisée par Jephté Kitsita