Désengorgement de Makala : Un haut magistrat estime que la vraie solution demeure la construction de nouvelles prisons

Mercredi 11 septembre 2024 - 10:33
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La vraie solution à la problématique de surpopulation de la prison centrale de Makala reste la construction de nouvelles prisons à Kinshasa et dans d'autres coins du pays.

C'est ce que pense un haut magistrat du Parquet près la Cour de cassation au cours d'un entretien accordé à la presse le mardi 10 septembre 2024. Il a préféré partager ses idées dans l'anonymat au regard du devoir de réserve qui incombe aux magistrats par rapport aux interventions dans les médias.

« Le décongestionnement n'est pas la mesure qu'il faut pour diminuer la population carcérale. C'est une solution Palliative certes. Ce n'est pas vraiment la mesure. L'unique, la seule et l'efficace mesure reste absolument la construction de nouvelles prisons », a-t-il déclaré.

À en croire ce haut magistrat, il existe d'abondantes correspondances du directeur de la prison de Makala, adressées au ministre de la Justice dans lesquelles il lui a recommandé de penser au transfèrement de grands criminels, des détenus militaires, "Kulunas", des " Mobondos" et des membres des groupes  rebelles dans d'autres maisons carcérales.

« Dans ces correspondances, il y a eu des propositions faites au ministère de la Justice, notamment l'envoi dans d'autres prisons des condamnés et de grands criminels, de ne pas recevoir des condamnés ou d'autres prévenus militaires, de voir comment gérer l'afflux à la prison des Kulunas, des Mobondos, des adeptes et rebelles qui viennent de toutes parts. Ce sont des gens qui sont à la prison de Makala mais qui ne devraient pas y être,  du moins pour ceux qui ne sont pas condamnés. Parce que, pour aller en prison, il faut un titre qui vous y amène. En commençant par le mandat d'arrêt provisoire, des pièces de procédure, jusqu'à la condamnation du prisonnier », a-t-il indiqué.

Ce haut magistrat a saisi cette occasion pour réagir aux propos ténus par le ministre de la Communication et Médias, Patrick Muyaya, au cours d'une sortie médiatique à l'étranger, qui, selon lui, a laissé entendre que le désengorgement de la prison de Makala a commencé avec l'actuel ministre de la Justice, Constant Mutamba.

Il rappelle qu'il y a eu des opérations de dépeuplement de la prison centrale de Makala depuis longtemps, et plus récemment avec l'ancienne ministre de la Justice, Rose Mutombo. À la seule différence, a martelé la source, cette fois-là, c'est le procureur général près la Cour de cassation qui se rendait personnellement à la prison, étant donné que, conformément à la Loi, c'est lui qui libère dans le cadre de la mise en liberté provisoire ou de la libération pour faits bénins.

Ce haut magistrat estime qu'actuellement cela se fait avec un peu de populisme. Il a rappelé que le procureur général Firmin Mvonde Mambu est descendu plusieurs fois en prison pour procéder à des libérations dans le cadre du désengorgement de cette maison carcérale.

« L'opération de décongestionnement ne date pas d'aujourd'hui. Le PG  Firmin Mvonde est descendu personnellement à deux ou trois reprises à la prison de Makala pour procéder à la libération de beaucoup de prisonniers. Et depuis lors,  un Comité de suivi composé de hauts magistrats des parquets près les Cours d'Appel a été installé pour veiller à ce que le décongestionnement soit réel et que les faits bénins ne soient pas sanctionnés par des mises en arrêt provisoire », a souligné ce haut magistrat.

Il a rappelé que le 13 février 2024,  304 prévenus ont été relaxés. 64 autres ont été libérés le 29 mars 2024, en présence du procureur général près la Cour de cassation, a martelé la source.

« En octobre 2023, le parquet avait un peu plus de 2700 inculpés à la prison centrale de Makala. Au 31 août dernier, la veille de la tentative d'évasion, il n'y avait que des détenus à la disposition des parquets civils, réduisant au tiers le nombre initial en une année.  Ces efforts continuent, car nous sommes inscrits dans cette dynamique prônée par le chef de l'État de qui nous recevons les instructions pour évoluer parce que nous appliquons sa politique criminelle », a conclu ce haut magistrat.

Rappelons qu'une tentative d'évasion, selon les autorités, a eu lieu à la prison centrale de Makala la nuit du 1ᵉʳ au 2 septembre dernier. Selon le bilan officiel avancé dans un premier temps, 129 personnes sont mortes pendant cette opération, dont 24 par coup de feu de sommation et les autres par étouffement et bousculades.

Le vice-premier ministre de l'Intérieur qui a avancé ces chiffres a aussi parlé des femmes violées. Le procès contre les présumés violeurs de ces femmes est en cours devant le Tribunal militaire de garnison de Kinshasa/Ngaliema.

ODN