RDC : Amnesty International et IBGDH demandent l'arrêt immédiat des délocalisations minières forcées à Kolwezi

Mardi 17 juin 2025 - 20:06
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Amnesty International et l’Initiative pour la Bonne Gouvernance et les Droits Humains (IBGDH),  deux organisations de défense des droits humains ont lancé un appel fort à l’État congolais de suspendre immédiatement les délocalisations de populations liées aux activités minières dans la province du Lualaba.

À l'occasion de la semaine minière tenue à Lubumbashi, ces structures ont expliqué, lors de la présentation le vendredi 13 juin 2025, du rapport intitulé « Alimenter le changement ou le statu quo ? Expulsions forcées dans les mines industrielles de cobalt et de cuivre en RDC », que ces expulsions sont souvent arbitraires, illégales et en violation flagrante du cadre juridique national. Maître Donat Kambola de IBGDH et Christian Rumu de Amnesty International ont affirmé que plus des 70.000 signatures ont été récoltées des populations qui sont contre les expulsions des habitants dans la ville de Kolwezi de peur de perdre complètement cette entité du sud-est de la RDC.

« Nous appelons monsieur le président de la République, à décréter une suspension de toute délocalisation des populations à cause des activités minières. Il est important qu’il y ait un moratoire pour évaluer ce qui a été fait et améliorer les processus », a déclaré maître Donat Kambola, coordonnateur de l’IBGDH à 7SUR7.CD, lors d'une déclaration conjointe avec Amnesty International.

Les deux organisations pointent du doigt des pratiques illégales de déplacement, notamment à Kolwezi, surnommée "la capitale mondiale du cobalt". Selon maître Donat Kambola, ces délocalisations s’apparentent à des expulsions forcées, car elles ne respectent ni les procédures légales, ni les droits fondamentaux des communautés.

« Du point de vue procédural, les gens ne sont pas consultés. Et du point de vue des droits, ils ne bénéficient ni de plan de réinstallation, ni de mesures d’accompagnement », a-t-il précisé.

Il a ,par ailleurs, dénoncé une précarisation des populations déplacées, qui se retrouvent souvent dans des zones non urbanisées, sans accès aux services de base, sans routes, sans électricité, ni soutien de l’État.

Les défenseurs des droits humains s’interrogent sur le prix réel de la transition énergétique mondiale que la RDC s’apprête à accompagner. Si le président a annoncé que le pays deviendrait la capitale mondiale des minerais stratégiques, les ONG dénoncent ce qu’elles considèrent comme un sacrifice territorial.

« Est-ce que la RDC n’est pas juste un pays sacrifié ? Est-ce que Kolwezi, en tête de disparition, n’est pas devenue une zone sacrifiée à cause de nos minerais ? », s’est interrogé cet avocat en évoquant la destruction progressive de villes entières sans plan de compensation surtout dans les zones de Mutoshi, de Metalkol Roan tailling, de Kamoa-Kakula où des entreprises comme Compagnie minière de Musonoïe Global SAS, Chemaf SA, Metalkol SA et Kamoa Copper SA fonctionnent.

L’analyse va plus loin. Les ONG dénoncent un système de prédation et de corruption. Le rôle de la Commission provinciale de délocalisation est également remis en question. Pire encore, selon les ONG, les indemnisations sont fixées unilatéralement par les entreprises, sans consultation ni participation des populations concernées. Pendant ce temps, la province se contente de prélever 12 % de frais administratifs, illustrant une logique de profit au détriment des droits.

Maître Donat Kambola a rappellé que la législation existe bel et bien, notamment à travers l’annexe 18 du règlement minier, qui définit les étapes, les droits des parties et les obligations des institutions impliquées.

« Il est curieux et surprenant que Madame la Gouverneure du Lualaba ne s’assure pas que la Commission provinciale se conforme à la loi », a-t-il fustigé.

Les ONG en appellent aux acteurs internationaux de la chaîne d’approvisionnement du cobalt et du cuivre. D'où l’urgence d’un encadrement plus strict et éthique de l’exploitation minière en RDC, afin de garantir que la richesse minérale du pays profite réellement à ses citoyens, et non au prix de leur dignité et de leurs droits fondamentaux.

Patient Lukusa, à Lubumbashi