AMÉDÉE CHAPEND : "LE HANDISPORT EST EFFICACE AU KATANGA, GRÂCE À LA RÉGULARITÉ DE NOS COMPÉTITIONS"

Mercredi 6 avril 2016 - 08:38
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Sport paralympique réservé aux personnes vivant avec handicap (PVH), le handisport évolue aujourd’hui à pas de géant dans l’ex-province du Katanga, contrairement aux autres provinces de la République démocratique du Congo. ’’Forum des As’’ vous en fait le point à travers cette interview que nous a accordée Amédée Chapend, le 1er Vice-président de la Ligue d’handisport du Katanga (LHK), lors de son récent séjour à Kinshasa.

Amédée Chapend, c’est quoi le handisport ?
Le handisport est le sport que pratiquent les personnes vivant avec handicap. Reconnu comme un sport paralympique, il regroupe plusieurs disciplines. On y retrouve le sitting volleyball (volleyball assis), le sitball (sorte de volleyball assis qui se joue pendant sept minutes), l’athlétisme, le lancer des poids, le lancer de javelots, le lancer du disque, la course en fauteuil roulant… Toutes ces disciplines se pratiquent déjà chez nous dans l’ex-province du Katanga. Nous organisons aussi des rencontres de football. Ici, la discipline met aux prises deux équipes, constituées chacune de sept joueurs amputés. Mais jusque-là, nos rencontres se limitent juste au niveau national, puisque nous n’avons pas encore commencé à participer aux compétitions au niveau international...

Les personnes amputées sont-elles les seules concernées par le handisport ?
Non. Nous intégrons même les non-voyants. Ils peuvent se livrer au sitball (discipline de 7 minutes où les athlètes s’activent autour d’un ballon qui émet du bruit sensible tout le long de son parcours), au sitting volleyball, au lancer de poids, au lancer de javelots et au lancer de disques… On a aussi prévu pour eux le goalball, sorte de football qui se joue avec un ballon muni des clochettes. Les athlètes, dépourvus de vue, tâchent de suivre la balle en se fiant au son des clochettes. Nous sommes présentement entrain de mettre sur pied, à Lubumbashi et dans tout l’ex-Katanga, le goalball proprement dit et le basket en fauteuil roulant.

Quelle est aujourd’hui la santé du handisport dans les contrées du Katanga que votre ligue couvre ?

Le handisport se porte très bien. Notre ligue organise régulièrement des championnats en province depuis 2010. Nous avons même participé l’année dernière au championnat africain d’handisport à Kigali, où nous avons remporté notre billet de qualification pour les Jeux paralympiques de Rio en août 2016. Notre qualification a été rendue possible grâce à la 4ème place que nous avons gagnée au Rwanda en juillet 2015. Nous sommes présentement en train de mener un plaidoyer pour les personnes vivant avec handicap, avec l’appui de l’Union européenne et de Caritas Autriche. Nous présentons nos doléances auprès des instances gouvernementales de notre pays, particulièrement auprès des autorités congolaises qui ont un pouvoir des décisions dans les domaines qui se rapportent à notre secteur. C’est pour ce faire que nous menons parallèlement des démarches auprès des partenaires extérieurs qui nous appuient dans nos initiatives. En l’occurrence, Caritas Autriche et l’Union européenne. Nous avions, jadis, aussi bénéficié d’un appui considérable de la part du Gouvernement provincial, avant le démembrement du Katanga.
Qu’est-ce qui justifie le dynamisme d’handisport au Katanga plutôt qu’à Kinshasa, siège national de la Fédération ?
Notre ligue provinciale est efficace, parce qu’elle est bien consciente de sa mission. Elle intègre les personnes vivant avec handicap dans toutes les disciplines sportives. A Kinshasa, hormis l’administration qui fonctionne, il n’y a pas encore d’activités sportives depuis que le Comité national paralympique (CNP) a été créé en 2010. C’est du moins ce que notre ligue a constaté jusque-là.

Selon des échos en provenance de Lubumbashi, on nous signale que votre ligue est constituée de membres très dynamiques et cultivés ?
Effectivement. Nous avons à la tête de la ligue une présidente très dynamique et engagée : la révérende sœur Liliane Mujing. Personne valide, cette kinésithérapeute de formation est religieuse de la Congrégation des Sœurs de Saint Sacrément. Sr Liliane Mujing est secondée dans ses fonctions par le 1er Vice-président Amédée Chapend, qui est un expert comptable. Nous avons, par ailleurs, un Secrétaire général qui est détenteur d’une licence en économie : M. Salomon Kayumba. Notre conseiller Lucien Kahilu est aussi détenteur d’une licence, mais cette fois en psychologie du travail. Et notre chargée de logistique, Mme Sylvie Konde graduée en informatique de gestion. Nous comptons, par ailleurs, de nombreux membres des cercles et ententes, estimés à environ 350 personnes disséminées à travers tout le Katanga.

Tout récemment les membres de votre ligue ont pris part à une session de formation conjointe avec les professionnels des médias de la région. De quoi s’est-il agi ?
Nous avons participé, du 14 au 18 mars dernier, à une formation sur les techniques de plaidoyer et de communication à Lubumbashi. Nous nous sommes tous retrouvés dans l’enceinte de l’Institut de Kiwele, dans la commune de Lubumbashi. Animée par Godefroid Bwiti, expert de la fondation Hirondelle, cette session nous a permis de mettre sur pied un plaidoyer pour les PVH dans plusieurs domaines de la vie sportive et sociale. Il y a eu une vingtaine de participants dont un nombre représentatif des journalistes locaux, œuvrant dans les chaînes communautaires du Katanga, radios et télévisions comprises. A ces assises, notre ligue était représentée par une dizaine de membres. Très enrichissante, la session nous a permis, à nous membres de la LHK et aux journalistes, de nous connaître sur place. Grâce à cette compréhension mutuelle, les professionnels des médias se sont engagés à monter un réseau qui devra assurer la couverture régulière de nos activités.

Avez-vous un message particulier à adresser au public congolais ?
Notre message est clair : nous sommes des personnes à part entière dans notre société congolaise. Nous voulons être remis dans nos droits pour pouvoir en jouir en tant que PVH, et donc personnes limitées. Nous comptons faire de la Fédération nationale de handisport une représentation parfaite, en l’aidant à remplir sa mission d’assurer l’organisation régulière d’un championnat national pour la promotion des personnes vivant avec handicap.
Propos recueillis par Yves KALIKAT