Dialogue, processus électoral et glissement : Malumalu indisponible ; pleins feux sur la Ceni

Lundi 31 août 2015 - 12:02

La dernière apparition du président de la Ceni M. l’abbé Apollinaire Malumalu, remonte au mois d’avril 2015, Ce qui continue d’alimenter les spéculations dans tous les sens. Amputée de son président et en proie à des difficultés en tous genres, da Ceni est au cœur du débat. L‘indisponibilité de Malumalu - hypothèse de plus en plus probable - pourrait plonger la Ceni et, avec elle, l’ensemble du processus électoral dans un trou. Une brèche qui pourrait ouvrir grandement la porte au glissement tant redouté.

Le processus électoral traverse une zone de fortes turbulences. A cela s’ajoute l’absence prolongée du président de la Ceni (Commission électorale nationale indépendante). L’état de santé de M. l’abbé Malamalu n’arrange pas les choses. Au contraire, il vient donner un coup de poussette à la machine électorale qui pique du nez vers le précipice. Dans certains cercles politiques, le retrait éventuel de M. l’abbé-président pourrait être accueilli favorablement. L’on serait même impatient de voir la survenance de cet événement.

La dernière sortie médiatique sur les antennes de radio Top Congo du rapporteur de la Ceni, Jean- Pierre Kalamba a sonné comme une alerte. La centrale électorale broie du noir.

L’équation se complique

La préoccupation n’est pas de savoir si le président de la Ceni va démissionner ou être poussé à rendre le tablier. Le fond du problème c’est que, qu’il soit déclaré déserteur ou indisponible, dans tous les cas, le processus électoral s’en ressentira inévitablement. Et pour cause ? Le mode de désignation du remplaçant de M. l’abbé Malumalu sera corsé. Délégué de la Société civile à la Ceni, c’est d’elle aussi que dépendra normalement la désignation de son successeur. La deuxième étape, tout aussi laborieuse, se jouera à l’Assemblée nationale. L’article 12 de la loi organique révisée portant organisation et fonctionnement de la Ceni stipule, en son alinéa 2, que «la désignation des membres de la Ceni est entérinée par l‘Assemblée nationale ».

La troisième étape, peut-être la plus cruciale, reste l’investiture par le président de la République du candidat désigné par la Chambre basse du Parlement. L’alinéa 3 du même article note que « les membres de la Ceni sont investis par ordonnance du président de la République »; Qu’est-ce à dire? La désignation du nouveau président de la Ceni ne sera pas une partie de poker.

Le tableau qui se dessine fait ressortir des difficultés à trois niveaux. Premièrement, au niveau de la Société civile elle-même. Dans sa diversité et avec toutes les contradictions et autres clivages internes qui la minent on voit très mai la Société civile s’accorder aisément sur un candidat au poste éminemment stratégique de président de la centrale électorale.

A l’affût, l’Assemblée nationale se frottera les mains. Compte tenu de la forte influence que détient l’occupant de la fonction sur la scène politique, la Chambre basse du Parlement cherchera par tous les moyens à influencer la procédure de désignation, mieux à la piloter au gré de certains intérêts partisans.

Comme lors de la désignation de Malumalu au poste de président de la Ceni, le chef de l’Etat jouera un rôle déterminant sur toute la procédure prévue en la matière. Car, il serait superfétatoire de s’imaginer qu’il pourrait se faire hara-kiri.

Tout compte fait, l’indisponibilité de Malumalu pourrait constituer un argument technique, susceptible de conduire au glissement.

A elle seule, elle va impacter sur l’ensemble du processus. Evidemment, cette situation profiterait bien aux tenants du glissement. L’Opposition qui a toujours redouté la présence de Malumalu aux commandes de la Ceni pourrait se régaler également. N’a-t-elle pas initié dernièrement une action en désaveu au niveau de la Cour suprême de justice?

A tout rendre, la Ceni est au cœur de grands enjeux. Ils sont d’autant plus vifs que l’absence de Malumalu se prolonge. Le dialogue et, cri corollaire le glissement, pourraient s’y greffer. La sonnette d’alarme tirée la semaine dernière par le rapporteur de la Ceni s’explique à tout point de vue.

Ce qui justifie toutes les hésitations et calculs qui le plombent davantage. Prédire un processus électoral apaisé devient une gageure. Ce n’est pas seulement la crainte d’une déroute, mais bien plus celle d’une situation d’implosion aux conséquences incalculables.

Bientôt, on rentre dans les six mois décisifs où l’on devrait, en toute logique, constater l’indisponibilité de Malumalu et ouvrir, par conséquent, la procédure de son remplacement. C’est presqu’un saut dans vide. Dans ce jeu dangereux, la Ceni aura, volontairement et involontairement, le coup de poussette qui prolongera la machine électorale dans le précipice.

La voix de la raison

Au micro de radio Top Congo, son rapporteur, Jean-Pierre Kalamba (délégué de l’Opposition) a craché du feu. Décidément, à la Ceni, l’heure n’est plus à la retenue. L’homme n’est pas allé par le dos de la cuillère, en déclarant tout haut ce qui se disait déjà tout bas. «Le glissement est déjà là », a-t- il lancé, comme pour se dédouaner de l’éventuelle dérive du processus électoral. En tout cas, si on n’en est pas encore là, la Ceni voit le glissement avancer à grands pas. Aussi n’hésite-t-elle pas à en parler à haute voix.

Sourde et muette, en son temps, la Ceni s’était cabrée, laissant les choses pourrir jusqu’à rendre inadéquat le calendrier électoral global du 12 février 2015. Aujourd’hui, sans moyens de sa politique et sur le point d’être décapitée, elle tente de revenir à la raison. Elle se rend à l’évidence qu’elle ne saura pas aligner tous les sept (7) scrutins retenus dans sa feuille de route.

Le constat actuel pousse à entendre la voix de la raison. Tous les partenaires extérieurs, dont les Etats-Unis et l’Union européenne, ont, dès la publication de ce calendrier en février 2015, recommandé de privilégier les scrutins essentiels. à savoir les législatures nationales et la présidentielle de 2016. Ces élections sont déterminantes au motif qu’elles permettent l’alternance politique au sommet de l’Etat.
La meilleure façon d’éviter le glissement et de tenir, par conséquent aux délais constitutionnels est de renvoyer à plus tard des scrutins moins essentiels pour lesquels on ne dispose ni de logistique, ni d’argent. En concentrant ses efforts sur ces scrutins primordiaux, la Ceni pourrait donc reprogrammer le reste à une date ultérieure.

La Ceni y pense déjà. Son rapporteur est favorable à cette piste. Certes, la Ceni ne voudrait pas endosser seule la responsabilité du réaménagement du calendrier électoral. Aussi se tourne-t-elle vers la classe politique pour qu’elle prenne conscience de l’urgence de se mettre d’accord sur un calendrier électoral consensuel. Comme Ponce Pilate, la Ceni s’emploie à se racheter. Elle ne voudrait pas qu’on lui impute l’entière responsabilité de la déroute du processus électoral.

De l’avis de la Ceni, la classe politique doit se ressaisir en mettant de côté ses divergences dans le seul but de tirer des eaux troubles le navire électoral, au bord de la dérive.

LE POTENTIEL

Étiquettes