Incidence de la sécurité électorale sur le processus électoral gage des élections libres et transparentes en RDC

Lundi 6 juillet 2015 - 14:28

Introduction
Dès les élections générales de 2006, La République Démocratique du Congo a renoué avec la démocratie pluraliste suspendue depuis le coup d’Etat militaire du 24 novembre 1965, par lequel le colonel Joseph-Désiré Mobutu s’empara du pouvoir et imposa du coup l’arrêt des premières expériences électorales Congolaises de 1957-1958, 1960 et 1965.
En 2011, des nouvelles élections devaient se tenir dans l’espoir de capitaliser les acquis démocratiques de 2006, consolider la paix, stabiliser le pays et créer les opportunités d’investissements nationaux et étrangers pour la relance du développement économique et social. De ce fait, le processus électoral de 2011 constituait un nouveau test d’une démocratisation en temps de crise, ceci en référence à l’occupation d’une bonne partie de l’Est du pays par des groupes armés nationaux et étrangers , pour le renouvelle¬ment de la légitimité et de la légalité des gouvernants et partant des institutions de l’Etat sous leur direction. Il s’agissait donc d’un événement aussi historique majeur puisque jamais, auparavant, il n’y avait eu de succession démocratique et électorale au niveau du pouvoir politique national en RDC. Ainsi, pour la première fois en cinquante ans d’indépendance, nous avons pu vivre l’expérience de l’alternance démocratique au sommet de l’Etat, le Président Joseph Kabila s’étant succéder à lui-même. De la même manière, la première législature de la troisième République constituait la première législature à avoir exercé ses attributions jusqu’à la fin de son mandat, avant de laisser sa place, par la voie des urnes, à une nouvelle législature.

En dépit de ces points positifs relatifs à l’aboutissement du processus électoral de 2011, il convient de préciser que des nombreux événements politiques et violences électorales ont émaillé, dès l’entame, la préparation de ces élections alors que celles-ci devraient être organisées dans un climat apaiser dans le but de consolider la jeune démocratie Congolaise fragile.

De l’avis de nombreux observateurs, ces élections du 28 novembre 2011 n’ont cependant pas été exemptées d’écueils. Il a été ainsi relevé les défaillances ci-après :
1) La publication tardive des listes électorales ;
2) L’omission de plusieurs électeurs sur les listes électorales ;
3) La délocalisation des bureaux de vote ;
4) La perte de plis électoraux ;
5) La multiplicité de cas de vote par dérogation ;
6) Les violences électorales ;
7) L’utilisation des biens publics de l’Etat durant la campagne électorale
8) Le non respect de la neutralité des forces de sécurité et de l’administration publique ; etc.
Au vue de certains écueils soulevés ci-haut, il sied de constater que la plupart relève bel et bien de la qualité de l’administration de la sécurité électorale durant la période électorale sus-évoqué.
Ainsi, dans la présente communication, nous voudrions démontrer l’importance capitale de la sécurité électorale dans un processus électoral étant donné que sa bonne administration garantirait les élections libres, démocratiques et transparentes.
Il serait question de dresser, dans cette communication le contour et la quintessence de la sécurité électorale afin d’amener les différents acteurs du secteur de sécurité à redoubler tant d’effort quant à son administration avant, pendant et après les élections. De ce fait, nous nous pencherons sur le pourquoi de la sécurité élec¬torale et ses différentes exigences.
1. Pourquoi la sécurité électorale ?
La sécurité électorale est vitale pour la consolidation des Institutions démocratiques dans plusieurs pays car même dans un environnement politique stable, des élections peuvent entrainer un conflit. Al¬ors que c’est un problème d’envergure globale, les causes, caractéristiques et intensités des conflits électoraux varient suivant le contexte de chaque pays.

L’intégrité électorale exige d’assurer le jour du vote un climat libre de toute crainte, intimidation ou manipula¬tion. La sécurité du processus électoral est d’une importance capitale, particulièrement pendant la péri¬ode préélectorale, électoral et post électoral.. Un climat électoral pacifique facilite la tenue d’une élection libre, juste et crédible et élimine les problèmes de sécurité qui pourraient compromettre l’intégrité du matériel, de la participation et des résultats.

Si la sécurité électorale est garantie, Les électeurs vont pouvoir voter sans crainte et les observateurs vont pouvoir observer toutes les opérations électorales sans intimidation. Les candidats devraient vont pouvoir faire campagne sans redouter que leurs partisans soient assassinés ou blessés. Les administrateurs électoraux peuvent assurer l’intégrité s’ils réussissent à planifier et mener les élections sans interférence. Le matériel électoral devrait être proté¬gé afin qu’il ne soit pas ma¬nipulé de façon à changer les résultats de l’élection.

La sécurisation des élections relève premièrement des forces de défenses et de sécurité, il s’agit de la Po¬lice Nationale et des FARDC. A ces deux acteurs, il faut ajouter la CENI elle- même en tant qu’une police spéciale des élections dans la mesure où la loi électorale confie aux président de chaque Bureau de Vote le pouvoir de prendre toutes les mesures appropriées pour y maintenir l’ordre et la tranquillité publique en ce sens que ces derniers peu¬vent expulser quiconque qui troublerai la quiétude du déroulement de scrutin. En cas de résistance ou de récidive, le Président de bureau de vote rédige un procès-verbal y afférant et le trans¬met à l’autorité judiciaire.
Le maintien de la sécurité physique nécessaire relève du gouvernement à travers la police civile qui dépend du Ministère de l’Intérieur, qui utilise habituellement à cette fin la force policière. Les mesures de sécurité varient selon les pays et les circonstances. L’intégrité exige l’application neutre et équitable des lois, de sorte que ceux qui sont soupçon¬nés de les avoir enfreints obtiennent un procès juste

2. Les exigences d’une bonne administration de la sécurité électorale
A) La bonne planification de la sécurité
La sécurité requiert une bonne planification. Cette dernière consiste à fixer des objectifs et à déterminer les actions susceptibles d’être réalisées. La planification se fonde en général sur une analyse de la trajectoire passée de l'organisation, des ressources à sa disposition, de sa situation actuelle et des buts à atteindre. Outre la dimension principale qui est le temps (Quand), la planification prend forme selon ses autres dimensions que sont le périmètre des objectifs du projet (Quoi), les ressources (Qui), la manière et le chemin (Comment) et les obstacles possibles (Risques)
Si aucune planification n’est faite pour prévenir, gérer et médire des conflits électoraux, les élections risquent de devenir le terrain de violences et d’intimidations où le conflit est utilisé comme une tactique politique pour influencer le résultat des urnes. Ce problème s’étend au-delà du simple processus électoral étant donné que la légitimité du gouverne¬ment gagnant est en péril lorsque le conflit est utilisé pour arriver au pouvoir. Il s’agit d’abord de cerner les étapes vulnérables du processus électoral et les sites physiques qui devraient être protégés. Il faut ensuite élaborer des mesures et mettre sur pied un plan de sécurité.
Un plan de sécurité peut être amélioré par une bonne coordination entre l’organisme électoral et les agences chargées d’appliquer la loi. Un plan de sécurité con¬joint peut être élaboré et un mécanisme de coordination établi pour faciliter le part¬age des renseignements et la prise de décisions aux niveaux national, régional et local de toutes les institutions.
B) La neutralité des agents de la sécurité
Une sécurité électorale adéquate repose sur la neutralité et le professionnalisme des personnes chargées de l’application de la loi. Ces personnes devraient respecter la loi et les droits constitutionnels et civils des citoyens, et se tenir à l’écart des campagnes et programmes des par¬tis politiques et des candi¬dats. Elles devraient égale¬ment s’abstenir de recourir à une force excessive ou à la violence. Dans certains régimes, surtout dans les sociétés qui ont connu des conflits récents, les prob¬lèmes de sécurité peuvent être le résultat d’une mau¬vaise conduite de la part des policiers, ce qui peut provo¬quer le climat d’insécurité et entraver les élections.

C) La protection des sites et bureaux de scrutin
La sécurité physique des sites électoraux et des fonc¬tionnaires électoraux qui y travaillent crée un envi¬ronnement propice à une ad¬ministration neutre et sans entrave. Le vol de matériel électoral et d’équipement peut miner l’intégrité du processus. La sécurité des sites peut être assurée par un contrôle des entrées et sorties au moyen de pièces d’identité avec photo. Les observateurs et les surveil¬lants devraient aussi porter une pièce d’identité qui per¬met de les reconnaître com¬me étant autorisés à avoir accès aux endroits élector¬aux à des étapes critiques du processus.
Le jour du scrutin, il est es¬sentiel de maintenir l’ordre dans les bureaux de vote. Dans certains pays, cela se fait sous la direction de la police et par des mesures indirectes, comme la fer¬meture des débits d’alcool pendant les heures de vo¬tation. Aux Philippines par exemple, il est illégal de servir, vendre, acheter ou boire des boissons enivran¬tes le jour de l’élection. La plupart des pays interdis¬ent le port d’armes à feu à l’intérieur d’un certain péri¬mètre des bureaux de vote. Certains régimes nomment un responsable de la sécuri¬té à chaque site de votation. Ces personnes contrôlent l’accès aux immeubles, per¬mettent à un nombre limité d’électeurs d’être présents dans le bureau de vote en même temps et maintien¬nent l’ordre dans les files d’attente.
D) La protection du ma¬tériel électoral
Il est nécessaire de proté¬ger l’intégrité électorale en s’assurant que les bulletins, les feuilles de comptage et autre matériel électoral ne soient pas copiés, manipulés ou détruits. La plupart des pays utilisent des numéros de série sur les talons des bulletins de vote afin qu’il soit plus facile de les retrac¬er. L’emballage des bulletins peut aussi faciliter la sécu¬rité. Le regroupement des bulletins en paquets con¬tenant un nombre différent de bulletins emballés de fa¬çon à ce qu’ils ne puissent pas être faussés permet la distribution de bulletins à chaque bureau de vote sans avoir à ouvrir et refermer les paquets. On peut aussi faciliter l’entreposage et la distribution des bulletins de vote et minimiser les risques de manipulation en plaçant les paquets de bulletins de chaque circonscription dans des contenants scellés et en inscrivant à l’extérieur du contenant leurs numéros de série et l’emplacement du bureau de vote. Le bureau de vote devrait être sécuri¬taire pour protéger le ma¬tériel électoral et les urnes. Il peut arriver que les can¬didats défaits volent ou dé¬truisent les urnes après la fermeture du scrutin dans le but d’invalider les résultats. La substitution des urnes après la fin de la votation est une autre tactique quelque¬fois employée. L’utilisation de sceaux sur les urnes et une surveillance continue par les représentants des partis politiques et les ob¬servateurs peuvent con¬tribuer à déceler de telles tactiques.
E) La protection des candi¬dats, des électeurs et obser¬vateurs
Les candidats peuvent être la cible d’actes de violence. La police et d’autres agenc¬es chargées de l’application des lois assurent habituel¬lement la protection des candidats. Les endroits où se tiennent les rassemble¬ments, les débats et les au¬tres événements publics qui attirent un grand nombre de personnes intéressées à la campagne devraient égale¬ment être protégés.
Un électeur est une per¬sonne ayant le droit de par¬ticiper à une élection ou plus généralement à un scrutin. En référence à l’article 5 de la loi électorale en vigueur en RDC, il sied de constater qu’un électeur est celui qui remplit les conditions ci-après : être de nationalité Congolaise, être âgé de dix-huit ans révolus, ne pas se trouver dans l’un d’exclusion prévus à l’article 7 de la¬dite loi et se trouver sur le territoire de la RDC le jour des élections. Ainsi, le jour du scrutin, les électeurs devraient pouvoir quitter leur domicile et voter sans craindre la violence dans les rues ou l’intimidation aux bureaux de vote. S’ils doi¬vent faire face à des groupes partisans menaçants pour exercer leur droit de vote, le taux de participation en souffrira. L’observation des élections désigne l'observation d'une élection précise par une ou plusieurs parties indépendantes soit originaires d'un autre pays soit provenant d'une organi¬sation non gouvernementale (ONG). L'observation a pour but d'assurer un processus électoral équitable, conduit selon des standards inter¬nationaux, ce qui encourage la protection des droits civils et politiques. La légitimité d'une élection peut être af¬fectée par les critiques des observateurs. Au regard de la nature de leur mission aussi délicate, les observa¬teurs devraient aussi être protégés afin qu’ils puissent observer le processus, poser des questions et signer les feuilles de comptage sans intimidation ou crainte de rétribution. Dans les pays en voie de transition, les ob¬servateurs nationaux peu¬vent se sentir vulnérables à l’intimidation et à la vio¬lence, surtout s’ils obser¬vent des problèmes causés par le parti au pouvoir ou les forces de l’ordre.

Conclusion

En guise de conclusion, il convient de relever, au vue de tout ce qui a été esquissé ci-haut, qu’il est tout à fait indispensable de s’en passer d’une bonne administration de la sécurité électorale dans un processus électoral. De même, durant la vota¬tion, le dépouillement des votes et la transmission des résultats, une meilleure ad¬ministration de la sécurité électorale y est strictement requise pour garantir la transparence et la crédibilité du scrutin. Le gouvernement de la République Démocra¬tique du Congo, qui, durant le processus électoral de 2006 et 2011, n’a ménagé aucun effort pour assurer une administration électo¬rale aussi efficace, est ap¬pelé à mettre plus d’accent et des moyens sur cet as¬pect du processus électoral qui demeure vital pour la consolidation d’institutions démocratiques. Ainsi, avec une bonne planification de la sécurité électorale, les acteurs de sécurité ap¬pelés à intervenir durant le processus électoral pour¬ront bien éviter et con¬tenir toutes formes des violences électorales sus¬ceptibles de jeter l’opprobre sur l’aboutissement du pro¬cessus électoral.
Fait à Kinshasa, le 23/05/2015
Joseph SEKABO
Consultant