RDC : Congo Airways déjà sur la liste noire de l’Union européenne avant d’avoir opéré son premier vol

Samedi 15 août 2015 - 08:01

Lorsque l’Airbus A320 de Congo Airways a atterri sur la piste de l’aéroport international de N’Djili, tout le monde a applaudi des deux mains à l’idée de voir le maigre parc aérien congolais s’agrandir d’une unité supplémentaire.

Cette nouvelle acquisition constitue pour la Rdc le 5me moyen-courrier du même type, les 4 premiers étant déjà en exploitation par le transporteur privé de droit congolais, la Compagnie aérienne africaine (CAA).

Acquisition des aéronefs avec la garantie souveraine de l’Etat

Le gouvernement congolais en a fait un grand battage médiatique, l’espoir étant d’occuper l’espace laissé libre par la compagnie aérienne nationale Lignes aériennes congolaises (LAC).

Au moment où tous les médias officiels faisaient l’éloge de l’arrivée de cet aéronef acquis de seconde main auprès d’Alitalia au lieu d’Air France comme prévu dans le business plan, nombreux sont les Congolaises et les Congolais qui n’ont pas manqué d’établir la comparaison avec les anciennes acquisitions d’avions à l’époque de la 2ème République.

En effet, l’opinion se souviendra que du temps du Maréchal Mobutu, le gouvernement congolais accordait régulièrement la garantie souveraine de l’Etat à son instrument désigné Air Zaïre pour négocier directement avec les constructeurs d’avions Boeing, Mc Donnell Douglas, Fokker, Caravelle, etc.

Avec le financement d’Exim Bank, le « Léopard volant » plaçait des commandes fermes d’avions de nouvelle génération tout en signant des contrats de fourniture d’équipements et de matériels appropriés à ces aéronefs, de formation du personnel navigant, technique et commercial sans omettre ceux liés à la maintenance des avions avec des stations homologuées.

La compagnie aérienne nationale s’est ainsi retrouvée dans le cercle fermé des opérateurs aériens de lancement des Caravelle 11-R, DC-10-30, Super DC-8, MD-11.

Tous ces emprunts contractés auprès des institutions financières internationales ont été remboursés par Air Zaïre sans une quelconque intervention du Trésor public avec les recettes d’exploitation. A ce jour, Lac détient des créances de plus de 850.000 dollars Us auprès de Boeing.

La culture de la transparence et de la traçabilité en aviation civile

Sur les autoroutes de l’information sont projetées des images frappantes de l’arrivée de l’Airbus A320 d’occasion de Congo Airways ainsi que celles des DC-10-30, Super DC-8, Boeing 737-200 et Fokker 27 sortant d’usine d’Air Zaïre. Ce qui donne matière à réflexion sur une telle mobilisation des hautes autorités du pays.

Dans l’aviation civile internationale, la culture de la transparence et de la traçabilité est de mise. La vie d’un avion est suivie de près dès sa conception, de la chaîne de montage à la sortie d’usine, du prix d’achat à l’identité de divers exploitants, des vols opérés aux différents « checks » subis, des incidents et accidents éventuels connus, tout est répertorié.

Les nouvelles acquisitions de Congo Airways n’échappent pas à cette règle de la traçabilité. Dans les milieux de la profession où tout se sait, beaucoup de gens rient sous cape quand ils entendent certaines déclarations sur la valeur et le prix de ces avions. Pour en revenir à leur exploitation proprement dite, les experts de l’AAC indiquent qu’il faudra encore du temps pour voir dans l’espace aérien ces aéronefs dont le second est annoncé aux environs du 24 août 2015.

La RDC dans le creux d’une grosse vague

Les formalités administratives sont en cours. Congo Airways dispose d’une licence d’exploitation lui décernée avec empressement par le ministre des Transports et Voies de communication. Elle n’est pas encore en possession du certificat de transporteur aérien, CTA document indispensable pour être autorisé à exploiter dans les normes.

La Rdc se trouve dans le creux d’une grosse vague. La nouvelle équipe dirigeante de l’AAC a hérité d’une situation peu reluisante. Le duo Jean Tshiumbaet HyppoliteMwaka est ainsi contraint de cravacher dur pour ramener l’AAC aux standards internationaux édictés par l’OACI et l’IATA et, partant, redorer le blason de la RDC.

Ceci n’est un secret pour personne, toutes les compagnies aériennes de droit congolais placées sous l’administration de l’AAC sont d’office reprises sur la liste noire de l’Union européenne. Congo Airways qui n’a pas encore opéré le moindre vol, est déjà frappée par cette mesure d’interdiction de survol de l’espace aérien européen.

Voilà pourquoi les experts de l’IATA et de l’Apave se sont penchés depuis 2013 au chevet de l’AAC et des compagnies aériennes congolaises pour les booster à remplir les critères rigoureux en vigueur dans le transport aérien international.

Ce travail arrêté momentanément pour des contraintes logistiques doit se poursuivre car c’est à cette seule condition que la Rdc peut rentrer dans la cour des grands comme à l’époque de la splendeur d’Air Zaïre.

La détention du certificat de transporteur aérien, un must

La détention du certificat de transporteur aérien, CTA par tout exploitant aérien digne de ce nom est un must.

Son obtention répond à des critères solides notamment la désignation des personnes responsables (9), la production des manuels de procédures de base dans les secteurs de la maintenance des aéronefs, des opérations, de la qualité et la sûreté, de la formation du personnel navigant, technique et commercial.

Il s’agit aussi de la preuve de la détention en propre ou en location des avions, de la « disponibilisation » des infrastructures techniques dotées d’équipements et matériels performants, à défaut de la signature des contrats de sous-traitance avec des ateliers techniques homologués, etc.
Force est de noter que Congo Airways ne dispose nullement de toutes ces infrastructures ni du personnel qualifié. Les Cadres et Agents de Lignes aériennes congolaises, Lac sont en train de tirer la sonnette d’alarme sur le danger qui guette leurs infrastructures à l’aéroport de N’Djili que certains prédateurs voudraient aliéner à vil prix au profit de Congo Airways.

Les preuves sont légion. Et pourtant, l’état des lieux de Lac, les recommandations pertinentes des Concertations nationales en faveur de sa réhabilitation et modernisation, les dernières recommandations du Sénat au Gouvernement dans les mêmes termes ainsi que les lois tant nationales qu’internationales plaident largement en faveur de son maintien à flots.

Ailleurs, certains Etats tels que l’Afrique du Sud, les Emirats Arabes Unis disposent de deux instruments désignés avec des secteurs clairement définis pour éviter tout empiétement et réaliser une couverture optimale de toutes les provinces de leur pays tout en portant haut leur étendard à l’extérieur.

La RDC avec ses dimensions sous continentales a besoin de centaines d’aéronefs pour une meilleure desserte de ses 26 provinces.

Aussi a-t-elle intérêt à promouvoir le regroupement des exploitants aériens comme c’est le cas sous d’autres cieux à l’instar d’Air France, Brussels Airlines, KLM, Lufthansa, Alitalia. Nous en reparlerons.

Autres compagnies de la RDC sur la liste noire

Les autres compagnies aériennes de la RDC, outre Congo Air Ways, inscrites sur la liste noire et interdites de survoler l’espace aérien de l’Union européenne sont :

Air Kasaï, Air Katanga, Air Tropiques, Blue Air Lines, Busy Bee Congo, Compagnie africaine d’aviation (CAA), Congo Airways, Dakota SPRL, Doren Air Congo, Gomair, Kin Avia, Korongo Airlines, Malu Aviation, Mango Airlines, Serve Air, Service Air, Swala Aviation, Transair Cargo Services et Will Airlift.