L’Airbus A320-200 de Congo Airways cloué au sol à l’aéroport international de N’Djili pour une « panne technique majeure »

Vendredi 28 août 2015 - 03:09

La nouvelle compagnie aérienne Congo Airways, née en RD Congo des cendres d’Air Zaïre - selon les déclarations du Premier ministre Augustin Matata Ponyo et de son ministre des Transports et Voies de Communication Justin KalumbaMwanaNgongo -, est cloué au sol à l’aéroport international de N’Djili (Est de Kinshasa) pour « une panne technique majeure ».

Beaucoup de zones d’ombres plombent ses débuts extrêmement laborieux qui appellent des éclaircissements aux contribuables congolais de la part de ses géniteurs. Les incidents et ratés à répétition enregistrés depuis la mise en chantier de ce projet ambitieux soulèvent des interrogations pertinentes sur les études préalables, le choix des aéronefs, les procédures d’acquisition, les conditions d’importation en RDC, l’exploitation, etc.

L’absence de réponses adéquates fait planer le doute et la suspicion sur la viabilité de Congo Airways que le sénateur Flore MusenduFlungu avait du reste qualifié de « mort-né ».

L’espace aérien congolais envahi par des compagnies africaines

L’espace aérien de la RDC est présentement pris d’assaut par de nombreuses compagnies nationales africaines qui desservent l’intérieur du pays avec des aéronefs de nouvelle génération très performants, notamment Ethiopian Airlines, Kenya Airways et South African Airways.

Cette ruée vers les provinces fait suite à l’ouverture sauvage prônée par l’actuel ministre des Transports et Voies de communication sans contrepartie ni réciprocité pour la RDC, telles que recommandées par les instruments juridiques en aviation civile internationale.
Au finish, les compagnies étrangères réalisent des bénéfices plantureux pendant que la RDC et les transporteurs aériens de droit congolais se contentent d’une portion congrue.

La RDC est ainsi obligée de se doter d’avions de mêmes performances techniques pour espérer combattre à armes égales avec cette rude concurrence. Les pays limitrophes l’ont si bien compris, tels que l’Angola depuis plusieurs années avec une flotte up to date, le Rwanda depuis peu avec deux avions long-courrier Airbus 330 sortis droit des chaînes de montage, le Congo-Brazzaville avec Equatorial Congo Airlines, ECAIR etc.

La RDC aurait dû, en principe, frapper un grand coup surtout lorsqu’on se réfère aux déclarations tonitruantes faites urbi et orbi par ses dirigeants.

Hélas ! Sur le terrain, les professionnels du métier se sont frotté plusieurs fois les yeux pour se rendre à l’évidence. L’Airbus A320-200 de Congo Airways ayant atterri à N’Djilile 27 juillet 2015 est identique aux quatre autres moyen-courrier du même type déjà exploités par la Compagnie Aérienne Africaine, (CAA). Comme tout finit par se savoir en aviation civile, il est acquis que ces aéronefs qui défraient la chronique, datent de 2008.

« Le prix de l’Airbus A320-200 Oldest est à 6,8 millions USD »

Précisions d’emblée qu’en aviation, l’âge des aéronefs importe peu, seule compte leur utilisation. Les Airbus A320 de Congo Airways immatriculés en Irlande et pris en leasing par Alitalia ont été exploités à l’optimum jusqu’à l’épuisement de leurs potentiels.

D’où, l’imposition d’un check-D au plus tard en février 2016. Cette révision générale est celle du genre subie récemment à Perpignan (France) par le Boeing 737-200 des Lignes Aériennes Congolaises (LAC) bloqué au sol par une décision politique du ministre des Transports et Voies de communication.

Curieusement, depuis que l’Airbus A320-200 de Congo Airways baptisé du nom de Patrice Emery Lumumba – ce qui est une novation car les noms des personnes sont plutôt donnés aux grands navires – n’a plus repris l’envol ni effectué un vol d’essai ni inaugural.

Les échos qui nous parviennent du tarmac de l’aéroport international de N’Djili, où se trouve cet aéronef, font état d’une « panne technique majeure au niveau d’un moteur et des trains d’atterrissage ».

Les tentatives de remise en vol, effectuées par les mécaniciens venus d’Europe, ont été vouées à l’échec. Résultat négatif autant pour le point fixe que pour un hypothétique vol d’essai.

Certes, aucun avion n’est à l’abri d’une panne technique. Le contribuable congolais se pose toutefois la question de savoir comment un aéronef tant vanté par les membres du gouvernement soit cloué au sol sans avoir opéré un vol quelconque pendant qu’il aurait dû subir des inspections techniques majeures au pays où il se trouvait basé avant son importation en RDC.

Dans la foulée, la revue de référence « Airline Fleet Management » dans sa livraison « Fleet finance, firmorders, aircraft transactions, listprices and lease rates » p.64 (Source : DAG Fleet NET, 29 june 2010) indique que « le prix de l’Airbus A320-200 Oldest est à 6,8 millions USD ».

Conditions d’importation des aéronefs

La règlementation congolaise prévoit les conditions d’importation des aéronefs, notamment les conditions administratives, conditions techniques, conditions particulières aux aéronefs neufs, conditions particulières aux aéronefs d’occasion. S’agissant des conditions administratives, il est exigé entre autres de l’importateur « la présentation des capacités techniques et opérationnelles suffisantes (personnel qualifié, matériels et infrastructures adéquats) en vue de l’exploitation et de l’entretien de l’aéronef importé. »

Disons-le sans ambages, à ce jour, Congo Airways est loin de remplir cette condition, elle qui se trouve encore au stade de l’embauche du personnel à former aux standards requis. Seule LAC que d’aucuns voudraient à tout prix précipiter dans le chemise des oubliettes, dispose de toutes les infrastructures et structures d’exploitation à travers la République et à l’étranger.

Aux dires des Cadres de LAC, c’est ce qui explique le peu d’empressement du Gouvernement qui ignore l’expertise de la Chambre haute du Parlement dont il refuse la mise en œuvre des recommandations pertinentes. Celles-ci soutiennent l’annulation de la dissolution de LAC, la dissolution du comité de liquidation mis en place en violation des Lois de la République, l’évaluation exhaustive et contradictoire du patrimoine de

LAC par une expertise indépendante ainsi que les modalités de valorisation de ce patrimoine et de relance de l’Entreprise.

Conditions techniques exigées de tout aéronef à importer en RDC

Que dire des conditions techniques que tout aéronef à importer en Rdc doit remplir et que l’Autorité de l’Aviation Civile a l’obligation de faire respecter, à savoir :

- Présenter un état technique satisfaisant, confirmé à la suite d’un contrôle effectué par les inspecteurs de navigabilité au pays où se trouve basé l’aéronef ;
- Etre certifié, suivant les normes internationales prévues, par le transport aérien civil ;
- Avoir subi une inspection majeure pour la cellule, les moteurs et éventuellement pour les hélices, dans un atelier agréé ;
- Avoir ses sous-ensembles suffisants en heures, cycles et en temps calendaires ;
- Disposer de toute la documentation technique et administrative, rédigée en français et en anglais.

L’AAC se trouve dans le collimateur de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale, OACI et de l’Association Internationale des Transporteurs Aériens, IATA. Peut-elle confirmer à l’opinion tant nationale qu’internationale le strict respect de toutes ces dispositions par

Congo Airways avant l’importation de cet aéronef par lequel le scandale est arrivé ?

L’espace aérien congolais n’a que faire des colorations politiques. La Rdc a besoin d’opérateurs aériens respectueux des normes internationales de manière à promouvoir une exploitation aérienne viable et fiable dans la stricte observance des normes de sûreté et de sécurité.

C’est en intériorisant et pratiquant toutes ces dispositions que l’AAC et les compagnies aériennes de droit congolais peuvent espérer se hisser au diapason de la glorieuse époque d’Air Zaïre et, partant se dégager de toutes les listes noires et redorer ainsi le blason terni de la RDC.