Mokonda Bonza : « Nous ne voyons ni l’opportunité ni la pertinence d’un dialogue national en 2015 »

Mercredi 16 septembre 2015 - 06:20

Mardi 15 août. A Kinshasa s’ouvre, au Palais du peuple, la session ordinaire de septembre du Parlement. Une session budgétaire certes, mais qui a lieu pendant que règne encore une grande agitation dans l’opinion à la suite particulièrement de l’arrêt rendu mardi dernier par la Cour constitutionnelle sur la requête de la CENI. Entretemps, le dialogue national n’en finit pas de se faire inviter au débat.

Ces deux principaux sujets ont fait l’objet d’un entretien qui nous a été accordé par le Sénateur Florentin Mokonda Bonza. Décodage

Décidément, ce n’est pas aujourd’hui que l’onde de choc va s’arrêter à propos de l’arrêt rendu tout récemment par la Cour constitutionnelle sur la requête de la CENI (Commission électorale nationale indépendante). Un arrêt qui aurait, selon une certaine opinion, créé plus de problème qu’il n’en a résolu.

Dans son analyse de la situation, le sénateur Florentin Mokonda Bonza ne s’en fait pas conter. Au sujet d’abord de l’arrêt. Et de décliner : « D’après la Constitution, en son article 160 alinéa 1er, la Cour constitutionnelle est chargée du contrôle de la constitutionnalité des lois et des actes ayant force de loi. Je n’ai pas, affirme-t-il, l’impression que la CENI avait besoin d’intéresser la Cour constitutionnelle pour modifier le calendrier. Elle l’a fait plusieurs fois, même dans un passé récent ».

Là où elle n’était pas attendue

En plus, il exprime un doute quant à savoir si la question du calendrier des élections peut figurer dans les cas de recours en interprétation de la Constitution prévus dans l’article 161 de la Loi fondamentale. « A mon humble avis, souligne le parlementaire, la Cour constitutionnelle est intervenue là où elle n’était pas attendue ». Ce faisant, elle a prêté ainsi le flanc aux critiques en ajoutant inutilement de l’eau au moulin d’une fraction de l’opinion nationale et internationale qui prédisait sa partialité.

A la question de savoir si l’on ne voit pas, à travers ce que d’aucuns considèrent comme un blocage du processus électoral, l’ombre d’un glissement, le président national de la Convention des Démocrates Chrétiens (CDC), un parti de l’opposition, répond sans ambages : « L’objectif du glissement n’est pas récent. Il remonte à plus d’une année ».

« C’est une stratégie, explique-t-il, échafaudée par le pouvoir pour perpétuer son règne. Dans tous les cas, il se dit convaincu que « tout sera tenté pour la conservation du pouvoir, à l’instar de ce qui se produit dans certains pays voisins. A ces différentes tentatives s’oppose sans conteste la farouche volonté d’alternance du peuple congolais ».

L’arrêt de la Cour crée-t-il un monstre juridique ? Pas si évident. Mais le sénateur Mokonda Bonza estime, pour sa part, que « c’est dommage d’avoir mêlé la Cour constitutionnelle à cette confusion délibérément créée par le gouvernement pour retarder la tenue de l’élection présidentielle ».

Non seulement la Constitution n’a pas prévu la nomination des gouverneurs de province, mais en plus, déplore-t-il, le gouvernement n’a rien fait pour préparer l’avènement de nouvelles provinces en les dotant d’une administration conséquente. Ce saut dans l’abysse aurait pu être conjuré en prenant des dispositions administratives élémentaires dans l’intérêt général.

« Malheureusement, constate-t-il, en République Démocratique du Congo, on ne privilégie que les intérêts des personnes et/ou des groupes.

D’abord le Gouvernement…

Quand il aborde le sujet concernant l’ouverture de la session ordinaire de septembre consacrée au budget de l’Etat, Florentin Mokonda Bonza émet juste un souhait, là où, dans l’opinion, on voudrait que cette fois-ci, l’on puisse doter le pays d’un budget conséquent, à la taille d’un grand pays aux immenses potentialités comme la RDC. « Mon souhait est, d’une part, que le Sénat s’en tienne désormais à son Règlement intérieur dans la prise des décisions d’intérêt national ».

« Dans tous les cas, les efforts pour doter le pays d’un budget cohérent et consistant doivent être déployés d’abord par le gouvernement, ensuite par les autres institutions ».

Ni l’opportunité ni la pertinence

Plat de résistance ou pas, le dialogue national a été aussi évoqué. Pour le sénateur Mokonda, organiser un tel forum est inopportun. Et il s’explique : « Nous n’en voyons ni l’opportunité ni la pertinence », tranche-t-il, avant de s’épancher : « …Dans un pays normal, le dialogue permanent est la règle de la résolution des conflits économiques ou sociopolitiques. Mais, le Congo est un pays anormal où les tenants du pouvoir ne sont mus que par leur ambition de conserver le pouvoir envers et contre tout. Voilà qui justifia leur préférence aux Concertations nationales par rapport au vrai dialogue prôné par l’Accord-cadre d’Addis-Abeba ».

« Même alors, ils ont fait montre de leur refus d’appliquer les recommandations des Concertations nationales », poursuit-il, avant de s’interroger : « Après le remaniement de décembre 2014, est-il encore nécessaire de convoquer en 2015 un semblant de dialogue juste pour partager le pouvoir ? »