La mesure du ministre porteuse des germes de conflit
Dans sa récente note circulaire, le ministre de la Jeunesse et des Sports exhorte les fédérations sportives nationales, les groupements sportifs particuliers, ainsi que le comité paralympique à insérer dans les RGS ainsi que dans les règlements de leurs compétitions sportives et championnats respectifs, endéans 45 jours, les dispositions relatives à la réduction à trois (3) le nombre d’athlètes de nationalité étrangère devant prendre part à une rencontre officielle. Ce qui signifie en termes clairs, que dans les 50 jours qui suivent, V. Club, TP Mazembe, Daring Club Motema Pembe et SM Sanga Balende, pour ne citer que ces équipes-là, ne pourront pas aligner plus de trois joueurs expatriés au cours d’une rencontre de la Linafoot, de la Coupe du Congo ou de divers championnats locaux. Il faudra au départ que le ministre précise les contours du concept « officiel». Si par officiel il entend les matchs du championnat local, national, continental ou mondial, les choses vont se compliquer davantage.
Ce qui signifie également que ces équipes qui ont engagé des frais colossaux pour se doter d’une expertise extérieure capable de les amener à rivaliser sans complexe les clubs d’autres provinces ou pays sur tous les plans, seront appelées à réduire leur potentiel et leur budget et à les adapter aux nouvelles dispositions réglementaires officielles. Mais s’il est vrai que le ministre a pris cette mesure dans le souci de garantir l’éclosion et la promotion des talents des athlètes congolais, il ne demeure pas moins vrai que les équipes, au regard de leurs statuts, se sentent frustrées. D’abord parce que certaines d’entre elles sont devenues depuis peu, des sociétés à objet sportif et doivent fonctionner pour faire des bénéfices. Elles sont dans le business. La majorité des clubs sont des ASBL et peuvent se soumettre aux décisions de l’Etat. Encore faut-il qu’en contrepartie, le gouvernement participe au financement des clubs et des entités organisatrices des championnats. Dans la mesure où, celles-ci viennent en appui à l’Etat dans son rôle d’encadrement de la jeunesse. Il faudrait donc que la loi sportive tienne compte de tout cela et que des agendas réalistes accompagnent ces mesures.
Que serait Mazembe aujourd’hui sans ses pieds noirs ? Comment V. Club, DCMP/K, Sanga Balende vont-ils continuer à engloutir des sommes folles pour assurer les salaires, l’entretien, la construction des infrastructures sans rien recevoir en retour? Faudrait-il aller vite en besogne ou prendre le temps de mûrir tous les contours d’une décision à haut risque pour l’avenir du football national. Allons-nous copier le modèle nord-africain, européen ou simplement innover sans lendemain ? Que serait advenu à Mazembe sans ses expatriés ? Serions-nous en mesure d’enlever le trophée sans l’apport des joueurs venus d’autres pays ? Le vrai problème, c’est d’investir à la base. De combien de stades dispose le géant Congo Démocratique ? Combien le gouvernement a-t-il construit de centres de formations et d’encadrement de jeunes ? Et pourtant, l’encadrement de la jeunesse est devenu depuis des lustres une préoccupation des privés qui le font par vocation et par passion d’abord. L’argent peut arriver au bout du circuit, mais c’est un travail de longue haleine et aux bénéfices hasardeux.
(Fernand Mukaku Lalabi-Muke)