RDC : Avec un processus électoral peu rassurant, l’incertitude politique actuelle risque de s’ériger en boulet de l’activité économique

Jeudi 30 juillet 2015 - 06:21

Le politique congolais fait très peu attention à l’impact qu’a l’incertitude politique actuelle, du fait d’un processus électoral peu rassurant et son corolaire, l’alternance en 2016, sur les perspectives économiques du pays. Les signaux politiques du moment impactent négativement le climat des affaires et sont loin d’inciter des nouveaux investissements étrangers.

Même les institutions financières internationales ne tarissent pas d’éloges à l’égard du gouvernement congolais pour sa maîtrise du cadre macroéconomique, voilà une bonne dizaine d’années déjà. Tout naturellement, l’Exécutif national n’a jamais boudé son plaisir à savourer l’embellie économique réalisée : un taux de croissance en hausse continue, un taux d’inflation proche de 1%, une stabilité du taux de change, non sans compter son petit matelas financier représentant presque sept semaines d’importation.

Cependant, les indicateurs macroéconomiques de la République démocratique du Congo auront beau être au vert, si une instabilité politique majeure s’invite tous ces bons résultats risquent de passer au rouge en clin d’œil si l’on y prend garde.

Quand la politique tousse, l’économie s’enrhume

La situation politique du pays n’augure pas d’heureuses perspectives économiques non seulement en ce qui concerne l’attraction des nouveaux investissements étrangers dont le pays a besoin pour demeurer sur la trajectoire de croissance mais aussi et surtout quant à l’assurance des projets existants. Quand la politique tousse, l’économie s’enrhume forcément.

Si les opérateurs économiques ne perçoivent pas des bons signaux de politiques, ils anticipent soit en gelant les projets déjà dans les pipelines, soit en diminuant carrément l’investissement engagé. Question de minimiser le risque en cas des situations comme celles que Kinshasa et certaines provinces de la RDC ont vécu au mois de janvier 2015. Ne dis-t-on pas qu’un chat échaudé craint même l’eau froide. Jusqu’à ce jour, aucune institution congolaise n’a pu établir la facture réelle des dégâts causés par les soulèvements populaires des 19, 20 et 21 janvier 2015. On sait que le pillage des magasins tenus par des promoteurs Chinois a occasionné une perte d’environ 5 millions USD.

Cependant, on ne sait toujours pas le manque à gagner dans tous les autres secteurs de la vie économique nationale. Le secteur bancaire était totalement affecté du fait de la coupure de la connexion internet.

En 2015, aucune banque ne peut fonctionner sans une connexion internet ! Ne parlons pas des sociétés de télécommunications implantées en RDC à qui le pouvoir public a simplement bloqué l’essentiel de leurs services. Pire, le gouvernement a vue son image sérieusement entachée à cause de la répression des manifestants et la restriction des droits et liberté.

Autant l’insécurité à l’Est de la RDC a un impact négatif sur la situation économique et sociale dans cette partie du pays autant une instabilité politique au niveau national aura un coût dur sur la gouvernance générale.

Le fait est que la situation politique congolaise est floue. Consultations présidentielles, dialogue national, découpage territorial, calendrier électoral global, glissement, sont autant des termes ne rassurent personne.

L’enjeu reste la tenue des élections, dans un climat apaisé et selon un calendrier consensuel, dans les délais constitutionnels. L’objectif étant la consolidation du processus de démocratisation, entamé depuis dix ans, avec à la clé l’alternance pacifique à la présidence de la République le 20 décembre 2016. Bref, le respect du pacte républicain qui se résume au respect strict de la constitution actuelle.

L’histoire récente de la RDC renseigne que chaque fois qu’il y a crise politique en RDC, son économie en pâtie. Cette fois-ci aussi, une éventuelle crise politique ne sera pas sans conséquence fâcheuse sur l’économie du pays, avec le risque de voler en éclat les progrès réalisés.

Le progrès économiques au prix de la stabilité

Outre cette menace intérieure, la RDC pourrait être aussi affectée par les soubresauts qui naitraient dans la région. La mondialisation fait que les économies sont devenues interdépendantes. Au point que la situation dans un pays donné peut avoir des répercussions sur d’autres Etats pas seulement frontaliers.

Les tensions politiques et sociales, dues notamment à la vogue de changement de constitution et de prolongation de mandat présidentiel dans certains pays frontaliers (Congo Brazzaville, Burundi, Rwanda) et l’insécurité (au Soudan du Sud et en République centrafricaine) risquent de rejaillir négativement sur ses performances économiques.

Quoi qu’il en soit, la stabilité politique, macroéconomique et sociale est une condition clé du développement économique et social dans tous les pays. Il reste que maintenir une économie sur une trajectoire de croissance soutenue et rendre le partage des fruits de la croissance plus équitable sont deux facteurs d’apaisement des tensions politiques et sociales, qui contribuent par ailleurs à la réalisation des objectifs de développement.

En dépit des performances économiques réalisées, les décideurs doivent œuvrer à la consolidation durable de la croissance, afin de créer davantage d’emplois de qualité pour une population active toujours plus nombreuse et de réduire la pauvreté, d’une part. D’autre part, ils devront travailler à la consolidation du processus démocratique.

Kinshasa a organisé par deux fois les élections au suffrage universel. Demeurer sur cette lancée reste le gage de la stabilité politique et une condition sine qua non à la poursuite des progrès économiques. Les richesses congolaises ne pourraient profiter pleinement aux fils et filles de la patrie de Lumumba que si la paix et la stabilité sont au rendez-vous.