Après l’examen laborieux du contentieux électoral par la Cour Constitutionnelle, l’annonce d’une chambre pour rectifier les erreurs matérielles donne à la justice de notre pays une occasion de retrouver sa crédibilité et de rassurer la nation congolaise sur ses fondements.
S’il y a un cas qui symboliserait cette notion « d’erreur matérielle », le cas le plus éloquent est celui de RUNGU, dans le Haut-Uélé.
Historique
Après les résultats provisoires publiés par la CENI le 11 janvier 2019, celle-ci avait :
Proclamés élus les candidats ayant obtenus au moins la moitié des voix, en application de l’article 118, alinéa 3 de la loi électorale ;
Enuméré les regroupements et partis politiques ayant atteint le seuil ;
Proclamé élus provisoirement les candidats, parmi les formations politiques ayant atteint le seuil, en exception du premier tiret.
A la lumière des procès-verbaux à sa disposition, le regroupement politique Le Centre, n’ayant pas été alignés parmi les formations ayant atteint le seuil et n’ayant pas obtenu des députés nationaux , a saisi la Cour Constitutionnelle le 19 janvier 2019, en requête collective de contestation des résultats , enregistrée sous RCE 081/DN, contestant les chiffres de la CENI sur la non-atteinte du seuil par Le Centre et contestant l’élection de 23 candidats, dont celui de RUNGU, tout en posant la question de l’interprétation de l’article 118, alinéa 5 de la loi électorale sur la deuxième exception à la règle du seuil pour les circonscriptions à siège unique.
Contentieux électoral : arrêt de la Chambre IV pour le RCE 081
Le 14 Juin 2019, la Chambre IV de la Cour Constitutionnelle déclare la requête du Centre, sous RCE 081, « recevable mais non-fondée », au motif que « le requérant n’a pas fourni les preuves des moyens soutenant ses allégations » (sic).
Cas de Rungu
La Cour dispose des résultats provisoires lui transmis par la CENI, endéans 8jours de leur publication.
La Cour Constitutionnelle, en charge de l’interprétation de la Constitution et des lois, a clarifié l’article 118, alinéa 5 de la Loi Electorale en affirmant que les circonscriptions à siège unique n’étaient pas concernées par le seuil.
La Cour Constitutionnelle a fait appliquer cette interprétation aux circonscriptions à siège unique de Gbadolite, Lisala Ville, Lubefu et Bafwasende.
Rungu est une circonscription à siège unique
A la lumière des résultats provisoires transmis par la CENI à la Cour, et donc en possession de celle-ci, le candidat du Centre, Bangakya Angaze Joseph a 2.054 voix de plus que le candidat proclamé provisoirement élu par la CENI, au motif que le candidat du Centre faisait partie d’une formation politique n’ayant pas réalisé le seuil.
Requête en rectification d’erreur matérielle
Par sa requête en rectification d’erreur matérielle, enregistrée le 18 juin 2019 sous RCE 1135, il s’avère que la Cour Constitutionnelle disposait par elle-même de tous les éléments pour proclamer élu le candidat du Centre à Rungu car :
La Cour disposait des résultats provisoires lui transmis par la CENI (article ‘ de la Décision 028 du 11 janvier 2019 du Président de la CENI, donnant à son candidat à Rungu, BANGAKYA ANGAZE Joseph, 2054 voix de plus que le candidat provisoirement proclamé élu par la CENI ;
La Cour Constitutionnelle avait déjà rendu son interprétation de l’article 118, alinéa 5 de la Loi Electorale, et avait déjà procédé à l’application de celle-ci dans les circonscriptions à sièges uniques de Gbadolite, Lisala Ville, Lubefu et Bafwasende.
La Cour avait été saisie en requête de contestation des résultats, notamment de Rungu, par le Centre, sous RCE 081.
La Cour ne pouvant ni se dédire, ni appliquer la loi de manière sélective et discriminatoire, une seule explication reste : l’oubli.
C’est ici que la déclaration du Président de la Cour Constitutionnelle, au sortir de l’audience lui accordée par le Président de la République le lundi 17 juin 2019, prend tout son sens : « 1240 recours pour 7 juges, en 2 mois, ce n’est pas humainement possible ».
Les juges ont donc simplement oublié le cas spécifique de Rungu, en examinant la requête 081.
La Chambre chargée de la rectification des erreurs matérielles n’a donc que deux choix :
Déclarer définitivement élu le candidat du Centre, BANGAKYA ANGAZE Joseph, à qui les résultats provisoires de la CENI donnent 2054 voix de plus que le candidat déclaré élu provisoirement par la CENI
Revenir sur son interprétation de l’article 118, alinéa 5 de la Loi Electorale et en tirer toutes les conséquences pour les autres cas des circonscriptions à siège unique, qui ont bénéficié de l’interprétation de la cour.
Il ne fait aucun doute que l’oubli de la cour sera simplement corrigé et que BANGAKYA ANGAZE Joseph sera proclamé définitivement élu par la Cour Constitutionnelle.