RDC : La SCPT (ex OCPT) sacrifiée par l’Etat congolais? (Tribune de Jean Thierry Monsenepwo)

Jeudi 19 mars 2020 - 15:00
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Politique

 

Président National de la  ligue des jeunes de la Convention des Congolais Unis, CCU, et communicateur du Front Commun pour le Congo, Thierry Monsenepwo, "expert des télécoms qui est dans la Direction de la société de télédistribution Bleusat, et patron du groupe de presse central qui compte la radio centrale FM et la télévision centrale", a lancé ce matin un cri d’alarme pour cette société d’Etat. 

Dans sa tribune, il en appelle à une implication  des élus du peuple et du Président de la République pour sauver ce patrimoine National. 

Ci-dessous la tribune de Jean Thierry Monsenepwo

Mzee Laurent Désiré Kabila voulait faire de l’OCPT, actuellement SCPT, le fer de lance de la télécommunication sur le plan national. 
C’est dans cette optique qu’il avait entre autres accordé par le ministère des postes de l’époque, une licence GSM à cette société d’Etat, car il voulait qu’elle puisse devenir comme ses consœurs France telecom ou Portugal telecom, qui font la tête aux sociétés privées de télécommunications en France et en Portugal. 
Mais malheureusement, les guerres qui se sont suivies entre 1998 et 2001, ont anéanti cette idée car il fallait harmoniser, après Sun City, les actes administratifs posés par les rebelles. 

Et en l’occurrence, le RCD Goma qui avait donné 400 méga de l’ex OCPT à supercell, et le RCD KML qui avait donné 200 à Congo gate. Ainsi, ces fréquences qui devaient être disponibilisées pour l’OCPT, ont été attribuées à une société privée de la place, qui serait devenue aujourd’hui africell. 
Dans le soucis de poursuivre l’idée de Mzee, évitant de dépouiller son propre bien, l’Etat congolais sous l’impulsion du président Joseph Kabila, va décider de donner les moyens nécessaires à cette société pour qu’elle ait sa station d’atterage à Moanda dans le Kongo Central, afin d’installer une fibre optique nationale qui conduirait la RDC vers la révolution de la modernité. Certes les travaux de la fibre allant de Moanda à la partie Ouest puis Est du Congo, ont été de manière globale, mal faits. Ce qui a commencé dès le début, a causé des problèmes de qualité de la fibre et a porté un préjudice sur sa fiabilité.
 
La décision de l’Etat aujourd’hui, serait de donner de meilleurs outils techniques à cette société afin de permettre à ce qu’elle donne une qualité de la fibre plus satisfaisante en refaisant la connectivité, et ce, ensemble avec la société congolaise de la fibre optique, SOCOF

Mais au lieu de ça, l’État propriétaire a préféré sacrifier encore une fois cette société en attribuant à un privé, Liquid Telecom DRC, la possibilité de construire une station d’atterage privée à Moanda. Et pourtant, bien que disposant d’une licence lui permettant d’exploiter des réseaux de distribution et de transmission à fibre optique, elle ne peut avoir accès à l’international. Elle doit, comme les autres telecommucants, n’utiliser que la passerelle construite par l’opérateur national. Car c’est une question de souveraineté de l’État. Cette exigence légale de toujours recourir à la SCPT pour le trafic international, permet à l’État de maintenir son contrôle sur cette voie qui conduit les activités de télécommunications. 

C’est dans ce contexte que cette société (liquid telecom DRC) va introduire une demande à l’ARPTC, pour la construction d’une station d’atterage à Moanda. Et pourtant, sous le président Joseph Kabila, la haute hiérarchie avait demandé à l’époque à cette même ARPTC de ne pas s’écarter de la vision souverainiste qui consiste en la protection des intérêts de la RDc d’abord. 
Car en réalité, cette société ne vise pas à donner une connectivité aux congolais, ce que la SCPT peut faire si l’État lui en donne les moyens qu’il faut. Mais au contraire, elle vise à réaliser un projet gigantesque qui consiste en la création de ONE AFRICA, qui permettrait à cette société et à son holding international, de détenir en exclusivité la connectivité entre les états africains sous le Sahara. Puisqu’aucune connexion terrestre n’existe à ce jour entre les pays de l’Afrique de l’Ouest et ceux de l’Est. 
Selon les informations que nous avons, le ministre des PTNTIC aurait signé un avenant à la licence de liquid telecom DRC, pour la construction d’une station d’atterage, par proposition du collège de l’ARPTC. Il y a donc lieu de se poser les questions suivantes : 
Est ce que l’ARPTC, qui dépend de la présidence de la République a pensé aux intérêts de la RDC ? A-t-elle pensé de ce que deviendrait la SCPT une fois dépouillée de sa souveraineté sur la fibre? Et à combien plus forte raison la société congolaise de la fibre optique ? Pourquoi cette autorité de régulation n’a pas favorisé un partenariat public privé qui ferait en sorte que la SCPT puisse continuer à garder son exclusivité sur la fibre ? 
Évoluant dans le secteur privé, je suis d’avis que l’appui de l’État vers le privé est important. 
Mais cela ne doit pas se faire au détriment des intérêts nationaux et en violant les lois existantes et en vigueur dans un secteur donné. 
Si seulement un PPP était conclu entre cette société et la SCPT, l’État aurait d’une part gardé une une main mise sur le contrôle des trafics, mais aussi sur ce que cela générerait comme revenu pour le trésor public. 
En sommes toutes, la décision de l’État congolais visant à octroyer à la société liquid telecom le droit d’établir en privé une passerelle internationale, viole de manière claire la législation en vigueur sur les télécommunications dans notre pays. Car à ce jour, aucun texte légal réglementaire ne prévoit la possibilité d’octroi aux privés des licences d’exploitation des passerelles de transit international à fibre optique. 
Si l’Etat ne se réveille pas, et que les animateurs actuels de la SCPT continuent à ne rien faire, ce patrimoine de l’État congolais va carrément disparaître.

Thierry Monsenepwo