RDC: " Les guerres qui écument l’Est de notre pays ne pourraient honnêtement être imputées à un ministre, fut-il de la Défense nationale ( Tribune Bernard Kayumba)

Vendredi 5 juin 2020 - 09:54
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La survie et l’avenir de notre chère patrie sont largement tributaires de la cohésion nationale autant que de l’implication sincère des populations des provinces du pays où sévissent dangereusement les guerres à répétition, des guerres qui ne sont nullement différentes d’une maladie sécuritaire endémique qui ne manque pas d’affecter l’ensemble du territoire national et par ricochet, la paix, l’économie et la mobilité dont dépendent le décollage économique et la reconstruction nationale.

Pour mieux cerner les méandres et les labyrinthes parfois insondables  des guerres imposées par les sociétés multinationales estimées à 85 à l’Est du pays pour perpétuer le pillage systématique et systémique de nos richesses, nos minerais, nos bois, etc., nous devons garder présents à l’esprit, les causes sous-jacentes, médiates et immédiates de ces guerres d’invasion et d’exploitation avec la connivence, la complicité des communautés internationales et  certains de nos voisins du levant pour les missions de razzias qui se déroulent à la barbe même des donneurs des leçons dans le monde.

Nous ne perdrons pas de vue que les guerres qui écument l’Est congolais ne pourraient honnêtement être imputées à un ministre, fut-il de la Défense nationale et Sécurité. Et imputer le pourrissement de cette piètre situation à un ministre équivaudrait à mal comprendre et méconnaître les événements qui ruinent l’Est congolais et même tout le Congo, par ricochet ; ce qui ne manque pas de nuire aux efforts de développement du pays. Une guerre, pour la réussir et la gagner, suppose que l’on réussisse  à recruter les autochtones, les séduire et les impliquer dans l’entreprise de trahison de leur nation. C’est ici que les actions de nos élus sont attendues pour sauver la RDC du roulis et du tangage qui ne profitent qu’aux éperviers.

C’est ainsi qu’il existe, à l’Est de la RDC, des compatriotes qui s’enrichissent sur le sang des autres, qui s’empiffrent à satiété, qui trouvent le malin plaisir à voir ces drames sécuritaires se perpétuer afin qu’ils amassent des fortunes à stocker outre-mer.

 Le caucus du Kivu pourrait-il nous expliquer de manière convaincante pourquoi ces guerres se poursuivent et s’amplifient bien au-delà du règne du Raïs Joseph KABILA KABANGE que l’on accusait à tord de sustenter les conflits ?

Le caucus pourrait –il persuader les compatriotes sur l’absence totale de complicité locale doublée et renforcée par les ingérences extérieures dans les opérations en cours ? Au regard de la succession des événements malheureux au pays, au regard de la quasi-surdi-mutité et de la cécité inquiétante des institutions et forces internationales  et du manque criant de sincérité dans le chef de certains de nos pays limitrophes, au regard de la construction des fonderies de coltan ou colombo-tantalite, de la cassitérite ou de l’étain, de l’or et de leur traitement et leur commercialisation dans les encoignures même de la RDC, au regard de la mutation du Rwanda et de l’Ouganda, pourtant non producteurs des minerais, en grands exportateurs des minerais congolais au vu et au su de la communauté dite internationale, les Congolais devraient plutôt cimenter les liens internes pour un meilleur bouclier contre les sangsues qui nous rendent exsangues.

Il n’est pas aisé d’infiltrer une zone ou une communauté sans qu’il y ait des complicités intracommunautaires. Tout système comporte en son sein les germes de sa propre destruction. Si les populations originaires du Kivu permettaient aux agents de sécurité, nous citons l’Armée, la Police, l’ANR, la DGM, la DEMIAP de se mouvoir à l’est comme des poissons dans l’eau, si les ingérences et intrusions extérieures limitrophes et transatlantiques ne s’en mêlaient pas,  si le système des Nations-unies jouait franc jeu entre la RDC et ses voisins en vue d’un règlement durable et définitif des conflits à répétition attisés par ceux-là mêmes qui se targuaient d’œuvrer pour le maintien de la paix en RDC, la stabilisation et la conservation des frontières de 1960, si certains compatriotes pouvaient cesser d’être des collabos de nos envahisseurs patentés et se gêner à vouloir perpétuer le génocide congolais sur plus de vingt ans, si la mission de l’ONU pouvait se coller uniquement à sa mission pacificatrice – celle en cours en RDC ayant volé la vedette internationale en longévité, le caucus des honorables du Nord-Kivu aurait abordé cette question sur un angle plutôt objectif et constructif.

Pour ce genre de conflits, le ministre de la Défense nationale et Sécurité coordonne les aspects administratifs, sécuritaires en étroite collaboration avec les services spécialisés des FARDC, tandis que les stratégies purement techniques, militaires et logistiques relèvent de la compétence des FARDC dans ses diverses articulations.

A la lumière de cette analyse, il nous revient de comprendre que nos honorables députés initiateurs de la malencontreuse et tonitruante motion de défiance à l’encontre du Professeur Aimé NGOY MUKENA LUSA DYESE, ministre de la Défense nationale et Sécurité, devrait plutôt se livrer d’abord à la conquête de la maîtrise du fonctionnement des Forces Armées de la République Démocratique du Congo avant de donner libre cours aux élans visant à torpiller les efforts consistant à ramener la paix à l’e'Est du pays .

 Il n’est donc pas indiqué de s’acharner à en incriminer le ministre de la Défense dans cette équation à plusieurs inconnues, à moins que les honorables députés veuillent faire de lui un bouc émissaire, une victime expiatoire de la titubante et balbutiante fédération des consciences propres à contribuer valablement aux efforts de pacification du pays.

Aussi devons-nous inviter les députés à plus d’engagement patriotique et à plus de clairvoyance dans l’analyse et le traitement des dossiers relevant du domaine hypersensible de la sécurité du pays, car il est des aspects qui glisseraient entre nos mains ; dans quel cas, apprendre à la source et intervenir efficacement pour construire et non détruire, pour raffermir et non infirmer, pour unir davantage et non diviser et gêner la cohésion nationale, avant toute initiative du genre, apprendre et bien comprendre les manipulations intérieures et extérieures, les coins et recoins, les contours et les pourtours des dossiers liés à la sécurité du pays dans toute leur hypersensibilité avec toutes les implications connues des initiés, constituerait une meilleure approche avisée.

Autant les intrusions intempestives de ce genre détruisent la cohésion nationale et le patriotisme, gênent les efforts de pacification du pays, sapent l’image de la Nation et entament sa stabilité, autant les ingérences très peu cohérentes et très peu avisées dans les méandres et les sinuosités insaisissables et difficilement contrôlables face à la multiplicité des forces et puissances en présence pour la dégradation de la cohésion nationale risqueraient de précipiter la démolition de la confiance que les Congolais accordent à nos forces de sécurité et désagréger fatalement la crédibilité de nos dirigeants.

Nous noterons pour clore ce chapitre que la sagesse devrait nous interdire de nous arroger le droit d’enfiler une tenue militaire lorsque nous ne sommes perclus et non admis quelque honorable que nous soyons. Et quand bien même nous maîtriserions les labyrinthes, les rapides, les cataractes qui caractérisent les services de sécurité et la discrétion qu’ils requièrent, pareille entreprise portée à la place publique équivaudrait à un cautère sur une jambe en bois, une solution nulle, vaine et inefficace. Un brin ou un atome de sagesse contribuerait à consolider la paix mieux que le cri élevé sur le toit.

Nous retiendrons qu’il est des matières à porter à cent décibels à la place publique et d’autres à gérer en hommes et femmes avisés, car les guêpes, les abeilles, tous les rapaces et vautours du monde immonde nous épient sans répit dans le contour et au pourtour et d’autres sangsues nous sucent du dedans.

Les causes profondes et sous-jacentes, médiates et immédiates des cycles interminables des guerres en RDC et particulièrement dans sa partie orientale nécessitent que seuls les initiés du secteur tiennent et contrôlent le gouvernail et le timon du navire congolais lorsqu’il s’agit de la sécurité du pays d’autant plus que les murs de la Grande Maison RDC affichent des craquelures, des fissures sur la quasi-totalité de nos frontières dont la porosité devrait nous interpeller pour plus de sagesse, de responsabilité et de patriotisme.  Nous sommes aujourd’hui attaqués sur sept de nos neuf frontières.

Les conflits du levant congolais avoisinent déjà un quart de siècle. De ce fait, la motion initiée par le caucus du Nord-Kivu exigerait que l’on s’évite de nuire et que l’on s’invite plutôt à privilégier des  actions à même de participer efficacement à la cohésion nationale en intégrant la dimension nationale, régionale, africaine et internationale des conflits récurrents, donc un domaine totalement interdit aux néophytes, à moins que l’on cherche – sans avoir sondé les abysses de la sécurité nationale – à s’acharner à orienter ses flèches mal aiguisées vers un simple bouc émissaire qui en est pourtant à sa deuxième expérience au Ministère de la Défense Nationale et Sécurité, donc avisé.

Toute discordance de tons entre congolais se muera toujours en des entreprises de félonie et de vendetta auxquelles il serait très peu sage de se livrer en cette période cruciale. Nous prendrons donc le soin de laisser le soin à la conscience adulte de prendre soin de nos options pour renforcer la fondation, la couche de base et même la couche de roulement du grand boulevard politique congolais.

Nos prestations parlementaires devraient se pencher de manière responsable sur la dangerosité de nos interventions dénuées d’extravagance, d’outrecuidance mal à propos, d’esprit vindicatif… L’on peut bien se faire héros en se travaillant à faire choir un ministre, mais peut-on également en peser les conséquences sur l’échelle nationale ? Heureusement, pour le cas sous examen, le ministre serait une fausse cible si l’on s’efforce à bien connaître le fonctionnement de notre armée.

La plus dangereuse des illusions consiste à croire que sa propre vision des faits est la seule réalité. Evitons donc de naviguer à contre-courant lorsque le Grand Fleuve Congo est tempétueux sur les rapides de Kinsuka. Nos ancêtres éduqués et instruits à l’école de la vie s’interdisaient toujours d’exhiber leurs sous-vêtements en public, aussi devrait-il en être de même des matières qui régissent la sécurité et la cohésion nationale!

La gestion de l’armée relève d’une complexité qui nous interdit de nous en mêler en l’absence de la lumière requise, car nous n’y comprendrons rien et nous aurons ainsi vendu la mèche. Il est pourtant des voies pour proposer ses bonnes idées, des voies plutôt discrètes et non ostentatoires en matière de sécurité nationale. Faisons-en un usage avisé en toute responsabilité et un tête-à-tête direct avec le ministre concerné et son cabinet ne serait pas refusé aux honorables députés nationaux, représentants du peuple dans un cadre plutôt approprié pour des questions très sensibles. Il n’est pas séant que les honorables députés nationaux s’écartent de leur propre déontologie. Certaines matières sont à taire et d’autres à braire sur la place publique.

Si la collaboration pouvait supplanter la confrontation publique, le Grand Congo, la RDC en serait bien meilleure. Plus de vingt ans de guerres cycliques au Grand Kivu, c’est un drame qui affecte tous les Congolais et avec plus d’acuité nos frères et sœurs de l’est dans son ensemble. Il est déjà des tempêtes, des cyclones, des tsunamis de tous genres qui ballotent et font tanguer outre mesure le navire congolais au point de risquer le naufrage. Quiconque voudrait gouverner autrui devrait d’abord être son propre maître, se gouverner soi-même.

Etant donné qu’au sein même de l’Assemblée nationale, la Commission Défense et Sécurité se dit « non concernée » par la motion de défiance du caucus du Nord-Kivu à l’endroit du ministre de la Défense et Sécurité, le silence doit – pour sauver la Nation en proie à de multiples convoitises extérieures et régionales – se vouloir d’or et la parole d’argent. Et si dans un ménage, la discordance des sons, justifiée soit-elle, se portait à la place publique, le foyer y perdrait ses plumes et sa considération dévalerait la falaise pour les abysses et leurs conséquences néfastes pour la Nation.

L’atmosphère sociale, économique, politique, sécuritaire et même géostratégique étant polluée, nous estimons qu’il serait plus constructif que nos motions ne viennent pas démobiliser les énergies, entamer le moral de nos forces armées et désarticuler la cohésion tout en désarçonnant les dispositions sécuritaires majeures particulièrement dans le ventre mou de la RDC.

Nous nous garderons donc de provoquer toute tentative qui consisterait à jeter le pavé dans la mare en ce moment où la sagesse politique, le patriotisme et le nationalisme nous imposent ce dépassement indispensable face aux attaques qui se généralisent autour de nous, notamment les incursions et opérations militaires extérieures perpétrées à partir de sept pays limitrophes du nôtre.

 Il en découle tout naturellement que cette géographie sécuritaire très peu reluisante au regard de la porosité frontalière exponentielle inquiétante nous convie à la retenue ou nous impose une approche plutôt constructive à teinture patriotique sans faille pendant ces séismes qui montent crescendo concomitamment avec les convoitises extérieures en progression géométrique, le marasme économique, la surchauffe sociale et les soubresauts politiques consécutifs à l’inactivité imposée par la pandémie de COVID-19 dangereusement hyper médiatisée et par conséquent ruineuse pour les gouvernements et les nations.

En visant nous visons un grand succès face à la multiplicité et la multitude de nos ennemis, nos sangsues et de nos pilleurs, la sagesse parlementaire nous conseille de travailler à nous rapprocher davantage et non nous soustraire de nos objectifs sécuritaires pour la préservation de notre souveraineté nationale. Les parlementaires se doivent d’observer les objectifs, les prérogatives … sans lesquels  l‘Assemblée nationale se muerait en un bateau sans gouvernail qui dérivera et n’avancera pas  et les députés risqueraient d’échouer sur les plages ou au port du désespoir, de la défaite à l’instar des chenilles processionnaires qui suivent à l’aveuglette les gesticulations d’une portion des chenilles. Il sied  que les honorables députés se nourrissent des attitudes positives pour produire des résultats positifs dont la Nation Congolaise a grandement besoin pour son existence, les attitudes étant belliqueusement contagieuses.

Il nous revient donc, pour sauver l’image et la cohésion intra parlementaire face à des questions hypersensibles du genre qui exigent notre grande sagesse politique pour éviter de nuire à la cohésion nationale en déstabilisant le Ministre de la Défense Nationale et Sécurité, et par ricochet, tout l’appareil gouvernemental et sécuritaire,  de faire appel à notre sens citoyen et patriotique ainsi qu’à notre responsabilité en qualité de représentants du peuple.

 
Honorable Bernard KAYUMBA, député national élu de Lukunga/Kinshasa

Président du Paneco