Un ancien 1er ministre exempté des poursuites ? : Dans un État de droit, il n'y a pas d'intouchables et de vide juridique. Tout le monde est redevable devant la Justice (Prof Luzolo Bambi)

Jeudi 3 mars 2022 - 11:47
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Dans une interview accordée à la presse le mercredi 2 mars 2022 à Kinshasa, le professeur Luzolo Bambi s'est exprimé sur le dossier relatif au juge naturel d'un ancien premier ministre de la République démocratique du Congo. 

En effet, ce dossier qui a pris de l'ampleur suite à l'affaire de l'ex-premier ministre Matata Ponyo qui est toujours dans le viseur de la Justice alors que la Cour Constitutionnelle s'est déclarée incompétente pour le juger dans le cadre du Projet Bukanga Lonzo, suscite beaucoup de réactions dans la classe sociopolitique congolaise.

Pour certains juristes de renom, dans le contexte actuel, un ancien premier ministre ne peut pas être poursuivi en République démocratique du Congo, faute de juge naturel. D'où, la théorie du "vide juridique" qu'ils évoquent. Un point de vue rejeté par le professeur Luzolo Bambi. 

Il n'y a pas d'intouchables dans un État de droit 

À en croire l'ancien conseiller spécial de l'ex-président Kabila, en matière de bonne gouvernance et de lutte contre la corruption, le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, dans un État de droit il n'y a pas de vide juridique. Tout le monde, a martelé le professeur Luzolo Bambi, est redevable devant la Justice. 

"Dans un État de droit, il n'y a pas de vide juridique. Les tenants de la thèse du vide juridique ne rentrent pas dans l'esprit d'un État de droit. Dans un État de droit, tout le monde est redevable devant la Justice. Autrement dit, peut-on considérer que le président de la République connaisse son juge naturel et que quiconque après n'ait pas de juge naturel ? Peut-on comprendre cela ? Il appartient à la Justice de s'assumer en donnant une réponse simple à la population. Nous sommes un État de droit, et dans un État de droit, il n'y a pas d'intouchables", a indiqué le professeur Luzolo Bambi. 

Dans la foulée, cet ancien ministre de la Justice dans le gouvernement Muzito entre 2008 et 2012, a souligné que la réponse sur l'identité du justiciable de chaque citoyen Congolais est à trouver au niveau du Palais de la Justice. 

"Et alors, qui est le justiciable de chaque citoyen Congolais qu'il soit ordinaire ou qu'il soit bénéficiaire du privilège de juridiction ? La réponse se trouve de ce point de vue là au Palais de Justice. Et ce type d'interpellation lorsqu'il n'y a pas de réponse c'est vrai que ça gêne et la population peut se plaindre, je comprends cette plainte là. Mais j'exhorte les magistrats à travailler et à encourager l'esprit de l'État de droit en faisant en sorte qu'en République démocratique du Congo, toute personne qui vit au Congo ici, n'échappe pas au droit congolais, n'échappe pas à la Justice congolaise et que tout Congolais, qu'il soit citoyen ordinaire, qu'il soit une autorité politique quelconque puisse connaître son juge naturel", a-t-il renchéri. 

Il y a espoir avec la volonté politique affichée par le chef de l'État

Pour le professeur Luzolo Bambi, avec la volonté politique affichée par le chef de l'État, Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, il y a lieu de croire en la Justice et à son efficacité. 

"Est-ce qu'il faut espérer ou pas ? Oui, de toutes les façons on n'a pas de choix. Il faut espérer parce que la volonté politique y est, largement exprimée par le président de la République (...) Il y a de l'espoir parce que la volonté politique est clairement exprimée et le contexte politique est clair : une forte attente de la population et des dirigeants pour aller de l'avant. Je pense que notre Justice n'est pas condamnée, elle est à même de pouvoir fonctionner, il faut la mettre en ordre de bataille avec les armes qu'il faut et elle donnera les résultats escomptés, et c'est possible maintenant", a soutenu le professeur Luzolo Bambi. 

Par ailleurs, cet ancien juge à la Cour Constitutionnelle a appelé les magistrats à faire un effort de répondre aux attentes de la population congolaise, en s'inscrivant dans l'esprit de l'avènement de l'État de droit au sein duquel, il n'y a pas d'intouchables. Le professeur Luzolo Bambi a insisté, en outre, sur le fait qu'aucun Congolais ne peut poser des actes aujourd'hui tout en se disant qu'il ne sera pas inquiété par la Justice. 

Jephté Kitsita