Après publication par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) de la liste provisoire des candidatures jugées recevables à l'élection présidentielle du 20 décembre prochain, la Cour constitutionnelle s'apprête à s'atteler au traitement du contentieux des candidatures. Cette prérogative de juge électoral met la Haute cour dans une position peu confortable dans le cas du candidat président Matata Ponyo, poursuivi au pénal par la même Cour dans l'affaire dite Bukanga Lonzo.
Dieudonné Kamuleta, président de la Cour constitutionnelle et président du Conseil supérieur de la magistrature, a-t-il tenté d'esquiver la réalité, en caressant sans entrer en profondeur, dans son exposé à l'audience foraine marquant la rentrée judiciaire exercice 2023-2024, au Palais du peuple, samedi 21 octobre dernier, la question des incidences de l’activité du juge constitutionnel en tant que juge électoral ?
Évoquant les innovations législatives apportées par la réforme du 29 juin 2022, il a cité notamment des décisions judiciaires irrévocables pour crimes de guerre, génocide et crimes contre l’humanité, qui rendent les candidats définitivement inéligibles et ne pouvant plus accéder à une fonction politique élective et ; des cas d’inéligibilité temporaire résultant de la condamnation judiciaire irrévocable du chef notamment d’infractions de corruption, de détournement des deniers publics ainsi que de banqueroute.
Pour rappel, en matière de contentieux des candidatures, le juge électoral – le cas échéant la Cour constitutionnelle – vérifie les motifs justifiant la recevabilité ou l’irrecevabilité de la candidature contestée.
Dans le cas de Matata Ponyo, candidat président de la République, qui est jugé par la Cour constitutionnelle dans une affaire de détournement présumé de deniers publics, Dieudonné Kamuleta se trouverait, selon des analystes, dans la double posture de juge et partie.
En ce sens que la Cour constitutionnelle juge au pénal l'ancien chef du gouvernement dont elle pourrait être appelée (en cas de contestation) à vérifier la candidature à la magistrature suprême en vue de la déclarer recevable ou irrecevable.
En français facile, l'objectivité de Dieudonné Kamuleta est sérieusement éprouvée. Elle est également mise en doute. Et ce n'est pas le revirement spectaculaire de la Cour constitutionnelle, qui s'est contredite en se déclarant compétente pour juger un ancien premier ministre, pour des faits qu’il aurait commis pendant l’exercice de la fonction de premier ministre, une année après s'être déclarée « incompétente » qui pourra convaincre les sceptiques que le candidat Matata Ponyo sera traité sur un même pied d'égalité avec d'autres candidats présidents de la République.
Faudra-t-il rappeler qu'il y a à peine 7 jours, le même Dieudonné Kamuleta a décidé de retenir le défaut contre Matata Ponyo dans l'affaire Bukanga Lonzo suite à son absence pour raisons médicales et de poursuivre l'instruction alors qu'il a pris en délibéré les exceptions soulevées par les avocats de ses co-accusés Deogratias Mutombo et Grobler !
Pourtant, les avocats de Matata ont présenté un certificat médical régulier attestant que leur client a été absent pour raisons médicales.
Papy MUJINGA NTAMBWE
Analyste indépendant