A l’approche de la com¬mémoration du 30 juin, jour de l’indépendance de la RD-CONGO, Kinshasa bruisse des bruits selon lesquels Joseph Kabila va poser un geste fort pour décrisper le climat politique pour donner du relief à ses Consultations politiques. Après la réouverture du média des catholiques RTCE (Radio-Télévision Catholique Elykia) intervenue il y a une semaine et demie, Kabila s’apprêterait à signer une ordonnance accordant la grâce aux prisonniers politiques et d’opinion qui croupis¬sent dans ses geôles notamment le mouroir de Makala- abusivement appelé Centre pénitentiaire de rééducation de Makala (CPRK)-, apprend-t-on des sources proches de la présidence.
C’est plutôt ceux qui y en¬voient des innocents là-bas qui doivent faire l’objet d’une rééducation. Enfin bref, Kabila veut user de ce privilège (la grâce présidentielle) pour contenter notamment le député Steve Mbikayi qui en avait fait la demande solennelle au sortir de la première audience avec Kabila au Palais de la Nation. Naturellement, la nouvelle de l’éventualité d’une grâce présidentielle est parvenue à l’illustre prisonnier d’opinion Mike MuKebay, journaliste et patron de C-NEWS, qui reçoit du monde dans sa cellule. Sans surprise, la nouvelle loin de l’enchanter, le révulse. Voici sa réponse telle que rapportée par un de ses visiteurs : « Je ne veux pas que Kabila récupère politiquement mon emprisonnement inique et cynique. Je ne veux pas d’une quelconque grâce présidentielle de sa part, ni d’un quelconque aménage¬ment de ma peine. Je vais purger ma peine jusqu’au bout. Il ne me reste que 25 jours, j’attendrai. Car accepter la grâce de Kabila c’est renier mes principes et mépriser le sacrifice consenti par la communauté des hommes libres qui m’ont soutenu dans cette épreuve m’imposée par mon propre Etat censé garantir mes droits ». Si Mukebay méprise l’éventualité de la grâce présidentielle jusqu’à la rejeter, un fait de prince qu’il abhorre au plus haut point, il a cependant été sensible à l’élan de solidarité de ses pairs journalistes qui ont une fois encore soulevé son cas lors de l’audience que Kabila avait accordée aux patrons de presse. Tout en les remerciant (ses pairs), Mike Mukebayi, rap¬porte son visiteur, trouve que leur démarche est « inopportune » car il ne lui reste plus que 25 jours pour sortir de taule. Quelle que soit la longueur de la nuit, le jour finira par apparaî¬tre a-t-il dit (Mukebayi) en renchérissant que même si on m’avait condamné à 100 ans de prison, je resterai un homme débout, un homme libre. Et d’ajouter que cette immense injustice à un côté positif, il a appris sur lui, sur les hommes et surtout sur la nature foncièrement inique du régime dans tous ses pans : de l’ANR à la Justice en passant par le ministère des médias et la Police. Dans l’antre du diable, il a côtoyé des innocents qui ont fait plus de 10 ans en pris¬on, cela n’a fait que renforc¬er ses convictions de liberté quel que soit le prix à payer rapporte son hôte.
Mukebayi irrité
Son visiteur a dit aussi que Mukebayi était irrité par la réponse que Kabila avait donné à ses pairs (patron de presse) au sujet du calvaire qu’on lui a fait subir à lui et à son journal CONGO-NEWS (et même C-NEWS) et à ses journalistes. En effet, selon les indiscrétions de cette audience entre Kabila et les patrons des médias, Kabila a dit qu’il n’y était pour rien. Selon lui, c’est une affaire qui oppose Mike Mukebayi au cardinal Monsengwo. Et Mukebayi d’interroger Kabila en disant ceci : 10 mois des scellés sur les bureaux de CONGO-NEWS, est-ce Mon¬sengwo ? La détention de son journaliste Eric Masimo, par l’ANR durant 5 jours puis pendant 3 jours au Parquet sans aucun document, est-ce toujours Monsengwo ? L’interdiction à un de ses imprimeurs d’imprimer son tabloïd, est-ce toujours le cardinal Monsengwo ? Et d’assener en disant que toutes les correspondances que Lambert Mende Oma¬langa, le ministre des mé¬dias et porte-parole du gou¬vernement, écrivait pour fermer CONGO-NEWS, RD-CONGO-NEWS et même C-NEWS, Kabila était sys¬tématiquement mis en am¬pliation. Conclusion : la dé¬cision de fermer son média ne pouvait qu’être prise à un très haut niveau. Kabila éta¬it donc au courant de tous les abus de son ministre des médias car ce dernier l’a informé à chaque étape de son forfait. Kabila a donc cautionné tous les abus pour des raisons évidentes conclut Mukebayi. Eu égard à tout ceci, Mike Mukebayi ne demande rien à Kabila. Alors rien à Kabila insiste-t-il. Dans l’éventualité d’une grâce présidentielle, il l’a rejetterai catégoriquement. Car il croit à la liberté de la presse comme pilier de la démocratie. Son passage en prison, loin de l’avoir ab¬attu, l’a aidé à comprendre davantage les travers de la société congolaise dont la Justice où les magistrats qu’ils l’ont jugé, ont été plus que légers. En un mot com¬me en mille, Mukebayi re¬fuserait l’aménagement de sa peine, il ne veut pas de récupération politique. Voilà qui est clair.
MATTHIEU KEPA