Déo Rugwiza : soupçons de coulage

Lundi 23 mai 2016 - 17:06

Comment le Directeur général de la DGDA est suspecté d’avoir probablement accordé des facilités de paiement échelonné à Congo Prisma, une société à identification douteuse, selon des sources internes, et à PPC Bartner en violation des textes légaux en la matière. On déplore des pertes respectives d’1,6 milliard CDF et 7,2 milliards CDF.

 

Déo Rugwiza, le Directeur général de la Direction générale des douanes et accises -DGDA-, aurait-il octroyé un paiement échelonné à une société à identification douteuse, Congo Prisma, et accordé les mêmes faveurs à PPC Bartner sans garantie, donc en violation du Code des douanes et de l’Arrêté 016 du ministre des Finances portant mesures d’application de ce Code? A la DGDA, des sources internes le présument sur base d’une série de documents à leur disposition.

 

Pour ces sources, l’inquiétude est palpable. A la lecture des documents auxquels AfricaNews a également eu accès, elles soupçonnent le Directeur général Rugwiza de coulage de recettes publiques sur fond de violation du Code des douanes et de l’Arrêté 016 du 11 avril 2011 du ministre des Finances portant mesures d’application de l’Ordonnance-loi n°10/002 du 20 août 2010 portant Code des douanes.

 

Tout commence le 30 novembre 2011 quand le Directeur Général des Douanes via le courrier DGDA/DG/DRF/20 11/3655 suspend la perception de l’impôt sur le chiffre d’affaires -ICA- à l’importation des marchandises de Congo Prisma SPRL et lui accorde, au titre de facilitation,’ l’autorisation permanente d’enlèvement d’urgence ainsi qu’un paiement échelonné sur six mois des droits de douane dus. Rugwiza réagit ainsi à la lettre n°CPR/11/11/2011 du 11 novembre 2011 de Congo Prisma SPRL. La société bénéficiaire s’est bel et bien acquitté de la garantie de 20% exigée à l’article 332 du Code des douanes et organisée par l’article 121 de l’Arrêté 016 du ministre des Finances. Elle aurait disparu après quelques temps et les agents de la DGDA éprouveraient de sérieuses difficultés pour la localiser et procéder au recouvrement de la somme d’1.658.805.578 de francs congolais partis en fumée. Inquiets, les agents auraient en vain informé la Direction énéra1e de l’identification douteuse de Congo Prisma SPRL, affirme-t-on.

Une autre opération intrigue également à la DGDA. Elle est plus récente. Elle a lieu en 2015. Elle concerne l’autorisation de paiement échelonné de la Taxe sur la valeur ajoutée à l’importation -TVA- à la société PPC Barnet DRC Manufacturing SA. Une autre entorse à la loi, affirment des sources douanières. Dans sa lettre DGDA/DG/DRF/DG/2015 datée du 6mai2015 y relative, Rugwiza évoque «des arguments avancés» dans la correspondance de PPC Bartner du 3 avril 2015 pour dispenser cette société de la garantie de 20% couvrant le solde à payer de 80% du montant de la TVA. Et ses pourfendeurs sont formels. «Cette dispense 1‘est en violation des dispositions pertinentes des articles 321et 322 du Code des douanes et 121, 122 et 123 de l’arrêté 016 du ministre des Finances et fait perdre au Trésor 7.260.656.397 de francs congolais», accusent-ils.

L’article 321 du Code des douanes stipule : «1. Le délai du report de paiement est d’au moins 14 jours et ne peut excéder 30 jours. 2. Le Directeur général des douanes détermine, par décision, les conditions d’octroi du report de paiement».

L’article 322 du Code des douanes précise : «1. La douane peut octroyer au débiteur des facilités de paiement autres que le report de paiement. 2. L’octroi de ces facilités de paiement: a) est subordonné à la constitution d’une garantie suffisante; b) donne lieu la perception, en plus du montant des droits et taxes, d’un intérêt de crédit.

  1. Le ministre ayant les Finances dans ses attributions détermine, par arrêté, les conditions sous lesquelles les facilités de paiement peuvent être octroyées et le taux d’intérêt du crédit à appliquer».

Et l’article 121 de l’Arrêté 016 du ministre des Finances portant mesures d’application du Code des douanes fixe : « Lorsqu’en vertu des dispositions de l’article 322 de l’Ordonnance-Loi n°10/002 du 20 août 2010 portant Code des douanes, la douane octroie les facilités de paiement autres que le report de paiement, elle assure : a) le bénéficiaire a des antécédents satisfaisants en matière douanière; b) il a, le cas échéant, exécuté à la satisfaction de la douane les obligations découlant des facilités de paiement lui accordées antérieurement; c) les dispositions sont prises pour recouvrer les droits et taxes aux Échéances prévues».

 

Mais, selon certaines indiscrétions des agents de la DGDA, Congo Prisma SPRL et PPC Bartner ne remplissent pas les conditions énumérées dans ces textes légaux, et ne peuvent être éligibles aux facilités de paiement échelonné. Ces agents insistent sur des questions de droit qui les taraudent sérieusement au moment où les services mobilisateurs des recettes affichent des résultats en deçà des assignations. Le Directeur général Rugwiza devrait donc tenter de rassurer ses propres collaborateurs mais aussi de répondre à leurs interrogations désormais révélées dans la presse.

 

Par Tino MABADA