Esther Malu Sabu Abedi … la passion du métier

Jeudi 12 novembre 2015 - 14:03

La mort d’Esther Malu Sabu a profondément bouleversé de nombreux professionnels des médias, écrits comme audiovisuels. A quelques heures de sa mise en terre, elle ne nous pardonnerait de’ ne pas donner notre témoignage sur cette créature gagnée par la passion du métier à partir du banc de l’auditoire. Pour nous qui avions accompli le même parcours académique qu’elle, cette grande dame avait commencé à nous étonner à l’Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication (Ifasic).

 

Nous avions, toutes les deux, obtenu nos diplômes de licence en 2011, en option « Journalisme et politique extérieure/Audiovisuel ». La particularité de cette icône de la presse congolaise est qu’elle se voulait un modèle du leadership féminin dans sa filière professionnelle. Et, elle avait gagné son pari très tôt car Esther Malu était déjà Directrice générale d’Africa TV sous son statut d’étudiante.

 

Cependant, à l’Ifasic, elle vivait sans complexe. Elle semblait s’enficher de son statut de responsable  numéro un d’une chaîne audiovisuelle pour partager les joies et peines de la vie estudiantine avec ses condisciples. On se retrouvait souvent dans les terrasses qui ceinturent l’IFASIC pour partager un verre de limonade ou d’eau gazeuse et discuter des questions sociales, politiques, professionnelles, etc...

 

Quand j’avais débuté dans la presse écrite, elle ne cessait de m’encourager. Elle me répétais souvent : « Nsomue, persévère… Le Phare est un grand journal. Un jour, Dieu va te propulser. Moi aussi, je commencé comme toi, simple reporter. Mais voilà, aujourd’hui, où je suis arrivée».

 

Ces paroles me revenaient souvent à l’esprit et me fortifiaient. En attendant mon embauche, les propos de mon amie Esther me servaient de repères pour me maintenir au Journal Le Phare.

 

Lorsque nous avions obtenu nos diplômes de licence, un jour, elle me dira, en souriant : « Nsomue, avec, l’expérience que tu as acquise au Phare et ce diplôme, tu peux alors chercher un autre emploi ». Et moi, je lui ai répondu : « Oui, tu as raison... Mais attendant, je reste encore là jusqu’à ce que je trouverais mieux ». Comme j’étais chargée de couvrir, entre autres secteurs, celui de la Société civile, et que pour sa part, elle avait choisi de militer dans celui de la défense des droits de l’homme, Esther Malu et moi nous rencontrions très souvent sur le terrain. Hormis ses responsabilités de gestionnaire, elle tenait à être une journaliste active  et non bureaucrate. Elle n’hésitait pas à s’afficher comme reporter, tendant son micro aux organisateurs et intervenants lors des manifestations.

 

Et, chaque fois qu’on se retrouvait, elle me lançait la même boutade : “NSOMUE, mwana classe na biso... Oza partout partout... Olembaka coupage te!». (NDLR : Nsomwe, ma condisciple, tu es partout. Tu n’es jamais fatiguée du coupage ! »)

 

Esther et moi étions membres de plusieurs ‘organisations des médias (Union Congolaise des Femme des Médias) et du secteur éducatif. Notre dernière rencontre remonte au Cercle Elaïs, à l’occasion du Colloque National sur «. La Loi d’Accès à l’Information». Pendant le cocktail, elle a encore trouvé le moyen de me taquiner : «Ah ! Nsomue... toujours partout. Maman, boni fiancé? ».

 

En revenant sur les questions d’actualité, je lui ai dit : « Cette loi doit à tout prix être votée, parce qu’elle nous permettra de bien travailler, surtout pendant ce processus électoral. Nous qui faisons tout le temps la ‘collecte sur le terrain, nous connaissons d’énormes difficultés pour accéder aux informations». Elle a répliqué « Ma chérie, ce n’est pas seulement vous, les reporters.

Même nous, les responsables d’entreprises de presse, nous sommes de fois bloqués pour certains dossiers d’actualité, magazines et autres. Ma chère, c’est un problème général. Tozonga na salle... ».

Quand je pense que je ne reverrai plus jamais ma chère Esther, la combattante, la conseillère, la gestionnaire, l’activiste, la professionnelle des médias hors pair… je sens la terre se dérober sous moi.

 

Dorcas NSOMUE