Cela fait onze jours que le fauteuil de président de la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) est officiellement vacant. On rappelle que son ancien occupant, l’abbé Apollinaire Malumalu, avait démissionné le samedi 10 octobre 2015, après environ une année de non disponibilité, pour des raisons de santé.
Depuis lors, la guerre de succession est largement ouverte au niveau des confessions religieuses, identifiées comme la « composante » de la Société Civile habilitée à pourvoir à cette vacance. Dans l’opinion publique congolaise, des voix s’élèaux églises l’exclusivité de la désignation du numéro un de la CENI. Et pour cause ! Pour nombre de Congolaises et Congolais, les ministres de Dieu ont largement montré leurs limites dans la gestion des processus électoraux. Par conséquent, il est souhaité que le futur président du bureau de la CENI sorte d’un autre « chapeau » de la Société civile, par exemple celui des organisations non gouvernementales spécialisées dans les questions orales. Le message est clair : les hommes d’églises devraient céder le poste aux laïcs. Tous les espoirs fondés sur l’apolitisme, l’indépendance d’esprit, la probité morale, l’expertise, le bénévolat de ceux qui sont chargés de montrer le chemin du salut à leurs semblables ayant été déçus, le remplacement de deux religieux défaillants par un troisième n’enchante pas du tout.
Sans pour autant citer des noms, l’on croit que des Ong telles que la Linelit (Ligue Nationale pour les Elections libres et Transparentes), l’AETA (Associations pour les Elections Transparentes et Apaisées), la LE (Ligue des Electeurs), le Renosec (Réseau National de l’Observatoire des Elections), … pour ne citer que celles-ci, recèlent des individualités capables de relever le défi de l’expertise nationale dans la conduite de la CENI.
Pour la classe politique comme pour l’homme de la rue en République Démocratique du Congo, le cycle électoral de 2006, sous le pilotage de l’abbé Apollinaire Malumalu, et celui de 2011, sous la direction du pasteur Daniel Ngoy, n’avaient pas permis l’éclatement de la vérité des urnes. Tout le monde se souvient qu’en août 2006, l’abbé Malumalu avait dû être exfiltré par des casques bleus de l’ex-Monuc (Mission des Nations Unies au Congo), à bord d’un blindé, de la paroisse Sainte Anne, où devaient être proclamés les résultats du premier tour de l’élection présidentielle, pour les installations de la RTNC (Radio Télévision Nationale Congolaise). Dans la foulée, des combats à l’arme lourde avaient opposé, pendant deux à trois jours, à travers les rues du centre de Kinshasa, des militaires de Joseph Kabila à ceux de Jean-Pierre Bemba.
Le spectre de la guerre avait refait surface en mars 2007, entre les mêmes belligérants, trois mois après la proclamation de Joseph Kabila comme vainqueur du second tour de la présidentielle. On n’a pas oublié qu’à l’époque, les cours et tribunaux de l’ensemble du pays étaient inondés de recours des candidats malheureux aux élections législatives provinciales, aux législatives nationales ainsi qu’aux sénatoriales, à cause des opérations maffieuses de « compilation » des résultats dans l’enceinte de la Foire Internationale de Kinshasa, transformée en entrepôt des urnes.
Le passé sombre des violences électorales et post-électorales de 2006 et 2011 est si vivace dans les esprits qu’une profonde crise de confiance s’est installée entre le Congolais moyen, pourtant très croyant, et les serviteurs de Dieu. A dire vrai, le retour de l’abbé Malumalu à a tête de la CENI, après un premier mandat fort controversé à la tête de la même institution, avait suscité le doute, d’autant que l’Eglise catholique, par la voix de la CENCO (Conférence Episcopale Nationale du Congo) ainsi que celle du Cardinal Laurent Monsengwo Pasinya, une des personnalités religieuses les mieux écoutées et respectées en RDCongo, l’avaient ouvertement boudé et invité à ne plus se mêler de politique. Son refus d’obtempérer avait été perçu comme un outrage à la hiérarchie. D’où, certains considèrent sa démission comme un bon débarras pour l’Eglise catholique congolaise.
Quant à Daniel Ngoy Mulunda, pointé du doigt comme le principal architecte des fraudes électorales de 2011, il s’est rappelé dernièrement à la conscience collective en promettant de sortir des presses un livre, dans lequel il promet un « déballage » sur les vrais responsables des tripatouillages de ce processus électoral. En promettant de désigner des coupables du holdup up électoral d’il y a quatre ans, ce pasteur reconnaît implicitement n’avoir pas permis à ses compatriotes de s’exprimer librement et démocratiquement dans les urnes. La postérité a pris acte.
KIMP