Démocratie en danger : Les énormités de Julien Paluku

Lundi 25 avril 2016 - 10:21

Le gouverneur du Nord-Kivu a soutenu, au cours d’un meeting le samedi 23 avril, que la Majorité présidentielle invente tous les moyens pour rester le plus longtemps possible au pouvoir. Des propos osés qui ne sont pas de nature à apaiser les tensions en cette période- trouble et qui mettraient à nu les plans de sa famille politique.

 

«Notre majorité est à considérer comme le MPLA en Angola qui détient le pouvoir depuis la fin de 1guerre de Savimbi. Notre majorité est comme l’ANC qui est au pouvoir depuis la fin de l’Apartheid. Notre majorité et comme au Cameroun où Paul Biya est au pouvoir depuis 1982. Notre majorité est comme le Congo de Sassou qui est là depuis plus de 20 ans. C’est comme le Tchad d’Idriss Deby. C’est comme les pays de l’Est, comme en Ouganda où Museveni est là depuis. 1986. Nous voulons être dans la règle de l’Afrique centrale (...) Nous inventons tous les moyens pour rester le plus longtemps possible au pouvoir.» Ces propos on ne peut plus graves dans un pays démocratique, sont sortis de la bouche du gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, au cours d’un meeting tenu le samedi à Goma.

Ces mots sont d’autant plus graves qu’ils sont prononcés à la veille d’une journée historique où la République démocratique du Congo commémore le 26ème anniversaire de l’instauration du système démocratique. Ils sont aussi proférés dans un contexte politique difficile marqué par la tenue incertaine de la présidentielle en novembre 2016. Un retard du processus qui pourtant semble réjouir le gouverneur d’une province la plus instable du pays sur le plan sécuritaire.

« Le mois de novembre et celui de décembre vont passer et il n’y aura rien. C’est vous qui devriez imposer votre logique. Il ne faut pas se fier aux messages sur les réseaux sociaux. -Sentez- vous fiers d’appartenir à la Majorité. J’ai fait tous mes meetings et j’ai dit que c’est Kabila ou rien et j’ai été élu », déclare, sans vergogne, Julien Paluku devant les sympathisants de la Majorité présidentielle.

 

Irresponsabi1ité rare

Et de poursuivre: «Il ne faut pas avoir peur de parler de votre autorité. Je vois des gens quand on dit “Kabila Wumela”, il regarde par terré … S’il n’y a pas élection, ce n’est pas la fin du monde. Le ciel ne va pas tomber sur la tête... On doit fixer un nouveau délai pour nous permettre d’aller aux élections apaisées parce que les dates ne vont pas changer la République démocratique du Congo, mais c’est la volonté de ses dirigeants».

 

Julien Paluku ne joué-t-il pas là avec le feu ? « Ce qui est logique pour lui, c’est de ne tenir compte d’aucune obligation constitutionnelle. Il oublie qu’il est la première personne à prendre la poudre d’escampette quand la guerre s’invite dans sa province. Ne pas organiser des élections dans le seul souci de maintenir une famille politique au pouvoir est un coup d’Etat constitutionnel que beaucoup de Congolais n’accepteront pas, ce qui inéluctablement exposerait ce pays post-conflit dans des situations difficiles à contrôler », réagit un analyste politique effaré par ce qu’il appelle «une irresponsabilité rare » de la part d’une autorité du pays. En tout cas, ces graves propos tenus par Julien Paluku n’ont rien d’apaisant au moment où le pouvoir en place cherche absolument la voie du dialogue pour jugu1er une crise qui menace le pays du fait de l’incertitude de la tenue, dans le délai constitutionnel, de la présidentielle. Ils pourraient encore valider la thèse de ceux qui pensent que le pouvoir actuel a expressément pourri la situation pour se maintenir au-delà des limites constitutionnelles. Ce qui expose de plus en plus sa famille politique.

Par CN