Le patron de l’ANR à l’UDPS, MLC et UNC : Dialogue La naïveté des opposants pour ouvrir leurs portes à leur propre bourreau

Mercredi 6 mai 2015 - 09:11

A quoi joue l’opposition ? Serait-elle affectée par le syndrome de Stockholm ? Pathologie qui fait que la victime puisse éprouver de la sympathie pour son bourreau. Apparemment oui ! Car comment expliquer que les 3 parties phare de l’opposition rd-congolaise se soient empressés d’accueillir le samedi passé Kalev Mutond, le patron de l’Agence nationale des renseignements (ANR), qui traine une sinistre réputation. Kalev est sans conteste le visage de la répression de la Kabilie. La plupart des abus commis par les services des renseignements sur les citoyens rd-congolais au nom d’une prétendue « raison de sécurité nationale » lui sont imputables. Les crimes de l’ANR sont tels qu’il impossible de les quantifier. L’ANR en particulier et les autres services des renseignements n’ont jamais opéré une mutation idéologique pour conformer leurs pratiques à la démocratie. Leur paradigme est resté le même que sous Mobutu. Pour paraphraser l’ancien premier ministre Mungul Diaka, « le véhicule est le même, toujours défectueux, mais c’est le chauffeur qu’on a changé » disait-il sous forme de boutade pour décrire la crise congolaise. Les geôles de l’ANR n’ont jamais été aussi bondées comme c’est le cas sous l’ère Kalev. Politiciens, activistes des droits de l’homme, journalistes, sont familiers des cachots connus et secrets de L’ANR. Deux journalistes y ont passé un calvaire récemment: Eric Iziami d’Antenne A et Eric Masimo, ex-journaliste de Congonews. Les activistes des droits humains regroupés au sein des ASBL Filimbi et Lucha en savent aussi quelque chose des pratiques moyenâgeuses des services dits se sécurité. Les politiques aussi y passent. Du bâtonnier Muyambo à l’ex député national Ernest Kyavviro qui a passé près de 90 jours dans les geoles de l’ANR avant d’être transféré à Kinshasa et jeté en prison. Les cas d’abus de l’ANR sont donc légion. On a là un aperçu des abus de l’ANR. Et que dire des cas non connus ? Car c’est le 1 millième de la partie visible de l’iceberg. Kalev, c’est aussi l’homme qui est derrière les coupures des signaux des plusieurs médias (RTCE, Canal Kin, Canal Futur, RLTV, JUA, etc.) privant les rd-congolais de leur droit constitutionnel à l’information. Le patron de l’ANR c’est aussi lui qui est à la base du bouchage des numéros des plusieurs leaders de l’Opposition. Le moment de faire le procès de Kalev en particulier et des Services de sécurité en général n’est pas encore là. Mais c’est ce barbouze que l’opposition a accueilli à bras ouvert. Cela laisse tout de même perplexe ! Car les pratiques de son Service sont tout simplement démocraticides et attentatoires aux libertés fondamentales.

L’opposition devait éconduire Kalev

L’opposition est elle donc devenue naïve ? Ou veut-elle se faire complice d’un schéma sans issue. Le premier message fort que l’Opposition devrait adresser à Joseph Kabila, c’est de refuser de recevoir son missi dominici Kalev Mutond à cause du symbole qui l’incarne. Cela aller obliger Joseph Kabila à trouver un autre émissaire plus consensuel et surtout pas mêlé aux violations graves et massives des droits humains. Mais où sont passés les politiques et autres conseillers qui pullulent à la présidence pour faire cette besogne ? Kalev n’est pas du tout crédible. Peut-il être de bonne foi ? Car souvent les ombres manipulent les hommes de pouvoir avec des faux rapports (bulletins d’infos) qu’ils leurs adressent. La démarche de Kalev est interrogative à plus d’un titre ! Comparaison n’est pas raison dit-on, mais est-ce que peut-on envisager un seul instant que le patron de la CIA se jette dans l’arène politique pour essayer de rapprocher les Démocrates au pouvoir et les Républicains dans l’opposition. Impossible car il est trop occupé à protéger la sécurité intérieure de son pays qu’il ne peut s’autoriser une telle activité. Kalev et Kabila n’en sont pas à leur coup d’essai. Le mois passé, le même Kalev s’était fait le porte-parole du message présidentiel sur le découpage territorial. A la place du ministre chargé de la décentralisation, Salomon Banamuhere, Kalev avait sillonné le Katanga pour encourager le découpage. Ce qui avait fait dire à certains que Kalev est devenu le facteur de Kabila. On comprend pourquoi nos services n’arrivent pas à contrer durablement les menaces aussi bien internes qu’externes. Car Kalev s’affaire à traquer les opposants et les activistes des droits humains. A quoi rime ce changement soudain de Kalev ? Veut-il assurer les arrières de son patron arrivé fin mandat ? Certains le pensent. Mais d’autres estiment qu’il s’agit d’un autre traquenard politique pour prolonger le bail de Kabila. Ainsi donc Kalev a rencontré les dirigeants du MLC (SG Bazaiba, SGA Fidele Babala et SGA Alexis Lenga), ceux de l’UNC (le président Vital Kamerhe et Kangudia, cadre du parti,) et de l’UDPS (le SG Mavungu, son adjoint Bruno Tshibala , et Félix Tshisekedi). A tous ses interlocuteurs Kalev a fait part de la volonté du président de la République à dialoguer et leur a remis un courrier à ce sujet. Sur quoi va-t-on dialoguer et pour quelle finalité ? Quel format, quel quota, quelle médiation, quel délai et quel statut juridique donné à ce dialogue et aux résolutions qui en seront issues (dans l’éventualité de sa tenue) ? L’histoire bégaie car ce sont les mêmes questions qui s’étaient posées à la veille des Concertations Nationales et que le régime avait esquivé. Sur les acteurs cette fois-ci le pouvoir ne s’est pas trompé. Il a ciblé les 3 principales forces de l’Opposition (UDPS, MLC et UNC). De ces trois forces, le MLC est un chat échaudé qui craint l’eau froide. Les Concertations nationales l’ont plus affaibli que renforcé. Et ce forum n’avait pas empêché l’extradition, nuitamment, du député Babala pour la Haye. Une chose est sûre, tout processus de dialogue politique se termine toujours par la formation d’un gouvernement. Est-ce opportun pour l’opposition actuelle d’aller dans un tel schéma ? Alors que les élections approchent. N’est-il pas plus judicieux de se tenir à l’écart du régime pour que Kabila en assume seul le passif ? En tous les cas, le leadership de l’Opposition est éclaté. Ceux qui seront débauchés par le régime perdront leur place dans l’opinion. La fracture entre le régime actuel et la population est telle qu’aucun opposant ne le comblera en rejoignant Kabila tardivement.

Le vrai problème c’est entre Kabila et le peuple, les opposants ne sont que des relais

Le vrai problème c’est entre Kabila et le peuple comme l’ont révélé les évènements imprévisibles de janvier. La population a agit au-delà des mots d’ordre et des espérances des leaders de l’opposition. Les premiers à être surpris par l’ampleur du soulèvement populaire étaient d’ailleurs les leaders de l’Opposition eux-mêmes. Les opposants qui ont canalisé le mécontentement de la population ne sont donc que des relais. Le désamour de Kabila avec la population ne sera pas résolu par un énième dialogue avec les opposants. Pour se réconcilier avec le peuple il n’a qu’à jouer pleinement la carte de démocratique avec bonne foi. Déclaration solennelle de ne pas se présenter en 2016 et organiser un processus électoral transparent et consensuel. La tournée de Kalev, si elle est sous-tendue par la bonne foi, peut décrisper le climat politique. Mais il faut pour cela que le pouvoir aille à Canossa. Mais si la virée du patron de l’ANR vise le débauchage des opposants les plus en vue. Ca sera un coup d’épée dans l’eau. Comme sous Mobutu qui a pratiqué pendant son règne le débauchage. La pratique lui a permis de gagner tout juste du temps mais ne l’a pas sauvé. Le débauchage que Kabila a opéré à l’occasion des Concertations nationales est un exemple des limites de cette pratique. Les cadres MLC qui l’a embarqué dans le gouvernement Matata II ne lui ont pas apporté les dividendes politiques escomptés. Si Kabila et Kalev réussissent tout de même un nouveau débauchage, il y a d’autres opposants en embuscade qui combleront le vide laissé par les autres et qui canaliseront les aspirations populaires. Le gouverneur Moïse Katumbi notamment. Martin Fayulu, le patron de l’Ecidé, ainsi que Franck Diongo, le président du MLP, sont autant des personnalités politiques en qui le peuple peut se référer. L’ancien ministre des finances Matungulu et le docteur Denis Mukwege sont autant des alternatives. L’important donc pour Kalev n’est pas de consulter les opposants mais c’est l’attitude du régime face aux revendications légitimes de ces derniers. Mokolo Wa Pombo, l’actuel vice-premier président du sénat alors patron des services de sécurité de Mobutu avait lui aussi mener des consultations populaires vers la fin des années 80. Mais c’est l’attitude du récepteur qui fit en sorte que l’ex Zaire ne connut pas la paix. Car la volonté populaire clairement exprimée fut détournée. Aujourd’hui Kabila via Kalev procède par consultation indirecte, vont-ils répéter les mêmes erreurs ? Ce tandem sera inexcusable car l’Histoire et les événements de janvier ont déjà largement fait connaitre la volonté populaire : démocratie, alternance, respect de la constitution et processus électoral crédible et consensuel. Si Kabila et Kalev sont de bonne foi tant mieux. En respectant la volonté populaire, leur avenir à long terme sera garanti. Mais s’il s’agit d’un poker menteur pour obtenir un glissement au-delà de 2016 au profit de Kabila, ils n’y arriveront pas. Ils verront leur marge de manœuvre se réduire comme peau de chagrin.

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