Les prochains jours promettent d’être mouvementés. D’un côté, la Majorité présidentielle s’est mise en branle pour maintenir Joseph Kabila en fonction après décembre 2016. En même temps, l’Opposition met les bouchées doubles pour obtenir l’alternance au sommet de l’Etat. Si l’Opposition peaufine ses stratégies à Bruxelles, la MP, en revanche, fait un ancrage à Kinshasa en annonçant sans ambages la convocation imminente d’un référendum populaire.
Le Potentiel
L’avenir immédiat de la RDC se joue présentement entre deux capitales, à savoir Bruxelles et Kinshasa. Alors que dans la capitale belge, l’Opposition tente de s’organiser pour retrouver son unité aux fins d’arracher l’alternance au sommet de l’Etat, sur place au pays, la Majorité présidentielle (MP) affiche clairement sa détermination à prolonger le mandat de son autorité morale à la tête de la RDC.
Dans l’entourage du président Kabila, la convocation d’un référendum ne fait plus mystère. Le PPRD, parti phare de la MP, s’est penché sur la question à la faveur de la célébration de l’anniversaire de naissance du chef de l’Etat, le 4 juin.
Pendant que l’Opposition tarde encore à recréer son unité, la Majorité présidentielle a mis le cap sur le référendum, une manière de pérenniser le pouvoir du président Joseph Kabila. Le PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et de la démocratie) a été le premier à se lancer sur cette voie. Sans porter des gants, ce parti phare de la majorité au pouvoir bat déjà campagne pour le référendum.
Tout est parti de la célébration, samedi 4 juin 2016, de 45 ans d’âge du chef de l’Etat, Joseph Kabila. « Nous avons voulu, à travers cette journée, démontrer au monde que rien ne se fera sans ce peuple. Que ceux qui mijotent des choses à l'extérieur pour ramener encore la zizanie dans ce pays sachent qu'ils trouveront ce peuple debout devant Joseph Kabila. Cet homme qui, aujourd'hui, à 45 ans, est encore trop jeune pour prendre sa retraite », a dit à Top Congo FM, Henri Mova Sakanyi, le secrétaire général du parti. Devant l’impasse pour la tenue du dialogue, le PPRD est prêt à se projeter sur un plan B.
« Si vous ne passez pas par ce dialogue, en face de vous il y a le peuple et le peuple souverain s'exprime au travers d'un mode de scrutin universellement connu, c'est le référendum », a-t-il lancé à l’endroit de l’Opposition. C’est que tout est mis en œuvre pour tomber dans le glissement du processus électoral d’autant que l’arrêt de la Cour constitutionnelle obtenu à l’arraché à la suite d’une requête en interprétation de l’article 70 de la loi fondamentale ne semble plus suffire.
Au même moment, à Bruxelles (Belgique), où elle est conviée par Etienne Tshisekedi, président de l’UDPS, l’Opposition est à la quête d’un nouveau souffle. Elle tente de se réorganiser, surtout de se ressouder par rapport à l’enjeu de l’alternance au sommet de l’Etat.
Le forcing de la MP
La MP ne lésine pas sur les moyens pour imprimer son rythme sur l’avenir du pays. Sans crier, elle a fait adopter la loi sur l’identification de la population, remettant en selles ce pourquoi il y a eu plusieurs dizaines de morts en janvier 2015. L’identification de la population pourrait impacter négativement le délai d’organisation des élections.
Des indiscrétions glanées dans les coulisses, il nous revient que l’Opposition compte produire une feuille de route à Bruxelles pour finalement faire face à la Majorité. A l’époque, il n’y avait que l’enjeu du seul glissement qui était à l’ordre du jour. La MP fait un forcing pour sauver son autorité morale du verrou constitutionnel de l’article 220.
Dans une déclaration faite le jour de l’anniversaire du président Kabila, le secrétaire général Mova et son adjoint Shadari sont montés au créneau pour obtenir une présidence longue voire à vie. Attitude que le G7 avait dénoncée en son temps.
A Bruxelles, il y a risque que tout se termine en eau de boudin si les débats sur le leadership se poursuivent. Regarder dans la même direction dans l’intérêt supérieur reste la seule planche de salut de l’Opposition. Cette distraction profitera justement à la Majorité pour qui le refus du dialogue par certains opposants ne peut empêcher la matérialisation de son agenda. En évoquant les voisins qui ont réussi leurs référendums, ainsi que des mandats illimités de leurs présidents, il y a des raisons que la rencontre de Bruxelles serve à autre chose qu’à des positionnements personnels.
Un saut dans le vide
Face à l’intransigeance des uns et des autres, il fait craindre que la RDC fasse un saut dans le vide. Déjà en 2016, la perspective de la tenue des élections s’éloigne. Avec l’adoption à l’Assemblée nationale du projet de loi portant identification et enrôlement des électeurs, la Majorité présidentielle a réussi à obtenir ce qui lui a échappé en janvier 2015, c’est-à-dire conditionner la tenue des élections à l’identification et à l’enrôlement des électeurs.
Pris sous cet angle, il ne faut pas s’attendre aux élections dans moins d’une année. Bienvenu le glissement ! Est-ce que l’Opposition se laissera faire ? C’est là toute la question.
Mais, par-dessus tout, le peuple reste la grande inconnue. Véritable détenteur du pouvoir qu’il délègue à ses représentants par la voie des urnes, le peuple risque donc de s’interposer si jamais on lui confisquait ses prérogatives constitutionnelles, à savoir choisir librement ses dirigeants.
Quid ? La démocratie est en danger. Une confrontation n’est pas exclue. D’un côté, il y a la Majorité présidentielle qui promet de se battre jusqu’au bout pour conserver son pouvoir. De l’autre côté, il y a l’Opposition qui, depuis Bruxelles, tente de se rassembler en vue d’une probable alternance. On doit s’attendre à un vrai combat de gladiateurs. Pourvu que ça se limite que sur la scène politique. C’est le souhait de tout un peuple.