L’initiative « Made in Congo » prise par le ministre de l’Industrie de la République démocratique du Congo (RDC) stimule le travail des personnes vivant avec handicap affiliées à la Coopérative des personnes vivant avec handicap de Ngaba/Kinshasa (Copehang), qui souhaitent qu’elle soit appliquée avec rigueur.
Le nouveau ministre de l’Industrie, Germain Kambinga, vient d’innover avec le concept « Made in Congo », qui passe pour une philosophie par laquelle le gouvernement veut pousser les Congolais à plus d’inventivité, de créativité. Une façon aussi d’inciter les Congolais à ne consommer que les produits locaux.
« A Copehang, nous sommes très flattés de l’initiative du ministre de l’Industrie qui fait du concept +Made in Congo+ son cheval de bataille. Nous sommes sur ce créneau depuis plus 15 ans, c’est notre politique de la Copehang. Si cette politique est appliquée avec rigueur et amour, les officiels congolais n’auront plus à chausser des produits venus d’outre-mer », a déclaré Bisibu Bilongo Mogere, responsable national de Copehang qui travaille sur ce créneau depuis plus de 15 ans.
Il a indiqué, dans un entretien à bâtons rompus, que le noyau de cette association est fait de « personnes vivant avec handicap qui ne peuvent pas travailler seules ». Aussi, Copehang a-t-elle intégré en son sein des personnes valides. Elle compte une trentaine de membres, avec un staff dirigeant de 14 personnes.
Difficultés
Au nombre des activités que mène la coopération, il y a un atelier avec la cordonnerie et la maroquinerie. A la cordonnerie, on fabrique et répare des babouches, souliers de toutes sortes, des sandales (homme, femme et enfant).
A la maroquinerie, les artisans de Copehang sont spécialistes dans la fabrication des sacs, valises, mallettes de toutes sortes. Malheureusement, regrettent-ils, ce secteur d’activités est en train d’être délaissé du fait que « le marché est inondé de produits chinois, de moindre qualité et qui coûtent moins cher ». Conséquence : la clientèle accourt vers ces produits et les artisans perdent du terrain.
Dans ce contexte-là, pensent-ils, c’est le gouvernement qui devrait prendre des mesures portant protection de l’entreprenariat national. « Nous sommes laissés à la merci de la concurrence chinoise, luttant tout seuls », a placé Bisibu Mogere, responsable de Copehang.
L’autre difficulté évoquée, c’est l’approvisionnement en intrants sur le marché congolais. « C’est encore l’une des grandes difficultés à laquelle nous faisons face. Nous nous approvisionnons à la friperie, avec le cuir de réemploi que nous traitons à notre façon. Ce qui déprécie la qualité de nos produits. Mais si nous pouvions trouver du cuir neuf, cela aurait donné une valeur ajoutée à nos produits et cela inciterait nos compatriotes patriotes à consommer congolais », a indiqué Mogere Bisibu.
Il y a aussi la desserte en énergie électrique qui pose problème. La politique de la Société nationale d’électricité (SNEL) est en train de laminer le mince espoir de survie de la petite et moyenne industrie congolaise.
« Mon quartier est desservi en énergie électrique 4 jours sur les 30 que compte le mois. Et puis, cette électricité ne nous est fournie que tard dans la nuit, ce qui est contraire à nos habitudes. L’homme travaille la journée pour se reposer la nuit. A cause de cette situation, nous sommes en train d’apprendre à inverser l’échelle de nos habitudes : dormir la journée et travailler la nuit quand il y a du courant », a déploré Mogere Bisibu Bilongo.
Cette situation, a-t-il ajouté, influe négativement sur le rendement. Conséquence : difficulté à payer son loyer, rémunération insignifiante, pauvreté...
Attentes
Les artisans des ateliers Mogercom disent travailler avec les moyens du bord, sans appui de l’Etat, ni apport des partenaires. Il y a quelques jours, ils ont reçu la visite de Mme Anne-Marie, coordonnatrice de l’ONG internationale « Soleil du monde » basée en France, qui a accepté de nouer un partenariat avec Copehang.
Les pourparlers sont très avancés. Ce qui a retardé jusqu’alors leur aboutissement, c’est l’obtention du F92 (document provisoire qui permet de fonctionner en attendant la personnalité juridique).
Il est difficile aux ONG congolaises d’émerger parce que les PVH sont abandonnées à elles-mêmes, mais lorsqu’elles sollicitent un document du ministère des Affaires sociales, il faut débourser environ 250 USD ou plus. Le F92 s’obtient moyennant 200 USD ou plus.
La ville de Kinshasa compte plus de 200 associations des personnes vivant avec handicap, mais celles qui disposent des documents sont à compter au boit des doigts de la main.
Les PVH éprouvent d’énormes difficultés pour se loger, se nourrir. Et si elles doivent en plus débourser 200 ou 300 USD pour obtenir des documents de fonctionnement de leurs associations, c’est comme si on décuplait la souffrance qu’on impose à cette catégorie sociale. Or pour être en ordre avec le fisc, ces associations doivent disposer des documents de la commune, de l’hôtel de ville, du ministère des Affaires sociales et la personnalité juridique.
« Il faut débourser, pour arriver à cette fin, environ 1000 USD, ce qui constitue déjà un capital d’investissement pour la PVH. Les bailleurs de fonds et missions de coopération dans les chancelleries doivent s’efforcer à surmonter cette conception des choses. L’accès au financement doit être facilité aux ONG congolaises », a souhaité Mogere Bisibu.
Il ne peut s’empêcher de raconter son expérience : « Nous avons, une fois, toqué à une porte pour un financement. La conditionnalité était que l’ONG soit propriété de parcelle pour la visibilité du financement consenti. L’Etat congolais qui connaît mieux la condition de la PVH est appelé à pallier cette situation ».
Le salut passe, selon les PVH de Copehang, par l’application correcte des dispositions de l’article 49 de la Constitution et des prescrits de la Convention internationale sur la PVH que la RDC vient de ratifier.
Pour rappel, la Coopérative de personnes vivant avec handicap de Ngaba (Copehang) a son siège établi au n° 2 de l’avenue Zaba, quartier Luyi, dans la commune de Ngaba. Mis à part les ateliers de cordonnerie et maroquinerie, elle dispose d’une salle de formation en informatique, un cyber café.
Il existe beaucoup d’autres projets qui attendent un financement et de l’espace pour leur mise en œuvre. Il y a des talents qui sommeillent chez les PVH.