La Société industrielle et forestière du Congo (Siforco) s’inquiète gravement de la position contenue dans l’arrêt avant-dire droit de la Cour militaire de Mbandaka en Equateur (nord-ouest de RD Congo), prononcé le 16 octobre 2015, parce que ses moyens de défense, estime-t-elle, ont été balayés par le juge d’un revers de la main sans qu’elle ne les ait examinés.
La Cour militaire de Mbandaka poursuit, sous la présidence du colonel Lindjandja, l’instruction dans ce qui est convenu d’appeler « procès Yalisika ».
Lors de l’audience du vendredi 16 octobre 2015, après le prononcé de l’arrêt avant -dire droit en rapport avec le mémoire unique introduit par la Siforco, la Cour a discuté avec toutes les parties des mesures de protection des victimes et des témoins à charge. La cause a été renvoyée au mardi 20 octobre 2015 pour la poursuite du débat.
Pour revenir à l’arrêt sus évoqué, la Cour a débouté Siforco au motif que ce «mémoire unique » violait la loi étant donné que les débats au fond avaient déjà débuté avec l’interrogatoire des prévenus.
Pour rappel, à l’audience du mercredi 14 octobre, la Siforco avait demandé à la Cour de déclarer irrecevable l’exploit de la partie civile, pour la bonne et simple raison que les deux parties (partie civile et Siforco), avaient signé un protocole d’accord qui a clos la contestation née de l’opération de police du 2 mai 2011.
Interrogé par Digitalcongo.net à la fin de l’audience au sujet de l’arrêt-avant dire droit rendu par la Cour, Me Théodore Amisi Kawaya a déclaré que « le tribunal ne peut pas à la fois valider une citation à civilement responsable dirigée contre la Siforco et empêcher cette dernière de présenter son mémoire unique et donc ses arguments ».
Il a souligné que le « mémoire unique » de la Siforco a été introduit après le démarrage des débats au fond car la Siforco n’était pas jusque là partie au procès pour deux raisons majeures. Dont la première est que « la Cour militaire de l’Equateur avait d’elle-même, au cours de son arrêt avant-dire droit de 10 juin 2015, décidé que sa saisine n’était pas régulière à l’égard de la Siforco ».
Curieusement à la même date, en lieu et place de renvoyer la cause pour que la procédure soit régularisée à l’égard de la Siforco, elle débute l’instruction au fond en l’absence d’une partie au procès qui est la Siforco.
C’est, notamment, pour cette raison que cette juridiction fût frappée d’une requête en suspicion à la Haute cour militaire à Kinshasa. Statuant en effet sur cette requête, la Haute cour militaire décida que, faute d’une signification régulière, la Siforco ne pouvait pas être considérée comme une partie au procès.
Contrat et arrangement à l’amiable
En clair, si le débat au fond avait démarré avec les autres parties dont le ministère public, les prévenus, les parties civiles ainsi que la RDC, il n’en est pas le cas avec Siforco qui vient d’arriver au procès et, en tant que nouvelle partie, elle est pleinement en droit de souligner « in limine litis » toutes les exceptions d’irrecevabilité qu’elle juge utile à la défense de ses intérêts.
En l’espèce, la Siforco avait rappelé à la Cour militaire qu’en date du 4 octobre 2011, la population de Yalisika et la Société industrielle et forestière du Congo avaient conclu un Protocole d’accord.
Dans cet arrangement à l’amiable, les deux parties, après concession de part et d’autre, avaient librement convenu de renoncer chacune aux actions judiciaires ouvertes devant la justice. Siforco s’engageait à remplacer certains biens détruits ou perdus par la population au cours de l’opération des forces de l’ordre de manière à ce qu’un climat de sécurité puisse s’installer dans la zone.
Ce contrat, né de la contestation qui avait élu domicile suite à l’opération de la police, a -sur le plan du droit- valeur de jugement. Il est revêtu de l’autorité de la chose jugée en dernière ressort.
Il n’était pas question que les parties civiles, qui reconnaissent l’existence de cette convention, puissent soumettre de nouveau devant les juges comme elles l’ont fait devant la Cour militaire de Mbandaka, les contestations ayant fait l’objet de ce contrat, a déclaré à digitalcongo.net Me Amisi Kawaya.
La Société industrielle et forestière du Congo réitère une fois de plus son vœu de voir la Cour conduire les débats de manière à garantir à toutes les parties le droit à un procès équitable. Ce qui n’est pas le cas pour l’instant, soutient-on dans les milieux proches de la Siforco.