Avec ses immenses ressources minières, sa superficie et sa démographie, l’une des plus importantes de la RD-Congo, le Katanga est une province spéciale sur l’échiquier politique national. Et dans l’agitation politique de l’heure, polluée par le projet de révision constitutionnelle afin de prolonger le bail de Joseph Kabila à la tête de l’Etat, sa voix compte énormément pour faire pencher la balance dans l’un ou l’autre camp. Or il se fait que le Katanga dispute à Kinshasa le leadership sur l’opposition à la révision constitutionnelle. Sa société civile était la première à dénoncer la révision constitutionnelle avec à la clé la collecte de 120.000 signatures anti-révision en avril dernier. Et pas plus tard qu’à la fin du mois de septembre les étudiants du Katanga ont marché pour dire non à la révision constitutionnelle.
Les prises de positions fortes du Katanga contre la révision constitutionnelle ont mis au coup au moral de la Kabilie qui se berçait d’illusions misant sur « l’effet enfant du terroir » pour faire passer le projet hérétique. La stratégie de la Majorité était basée sur l’adhésion indéfectible des Katangais à leur projet de révision. Ils ont vite fait de déchanter car entre Kabila et le Katanga c’est le désamour total. Désamour alimenté notamment par l’insécurité et la pauvreté qui ont élues domicile. Malgré tout, résolu à changer ou à modifier la constitution, Joseph Kabila a décidé de réagir pour récupérer le Katanga.
Joseph Kabila, en personne, vient de lancer cette opération de charme envers le Katanga en mettant à contribution les miniers. Le samedi 6 septembre 2014, Joseph Kabila avait convoqué au Palais de la Nation les principaux industriels miniers du Katanga : 16 au total. Il leur a demandé des sous pour financer les projets d’infrastructures au Katanga. Leur contribution « volontaire » sera versée dans un « Basket Fund », sorte de fonds commun, dédié aux miniers. Kabila est conscient que la population du Katanga est très remontée contre lui car malgré la croissance des exportations du cuivre, les conditions de vie des Katangais ne se sont pas améliorées. Donc l’hostilité à la révision constitutionnelle est nourrie aussi par cet échec patent de la gouvernance de Kabila qui n’a pas su réduire grâce aux mines la pauvreté au Katanga. Les industriels miniers eux se disent exaspérer de se faire « dépouiller » chaque fois par l’Etat. Pour eux, l’Etat doit bien affecter les taxes et les impôts pour financer ses projets de développement et non recourir chaque fois à eux en sortant du cadre légal. Cela ne contribue pas à l’amélioration du climat des affaires a lâché l’un deux. Un autre d’enfoncer le clou, toujours sous couvert d’anonymat, en disant « si tu ne contribues au Basket Fund, ce qui est normal parce que c’est une dépense non budgétisée par les entreprises minières qui travaillent avec des standards internationaux, cela risque d’être interpréter comme un crime de lèse-majesté envers le président de la République. Et aucun industriel ne peut se permettre c’est luxe a-t-il conclu ».
Tous les miniers sont en ce moment entrain de se creuser la tête pour trouver les ressources à verser dans le Basket Fund de Kabila. TFM, KCC, MUMI, MMR, SEK, STL, KICO, MMG, SOMIKA, RUBAMIN, BOSS MINING, HUACHIN MINING, CDM, KAMOA, tous sont à la recherche des ressources extrabudgétaires pour aider Joseph Kabila à se refaire une santé au Katanga dans la perspective d’un référendum constitutionnel. Pas sûr que cela suffise même si le Basket Fund reçoit les millions des miniers. Le Katanga est tellement vaste et a tellement été délaissé que Joseph Kabila aura du mal à corriger sa trajectoire là-bas. Le Nord-Katanga par exemple quel péché a-t-il commis pour que ses paisibles habitants soient livrés à l’insécurité et aux viols de bandes armées. Bien que riche la vaste province du Katanga manque cruellement des infrastructures sociales : routes, énergie, écoles et hôpitaux notamment. Voilà pourquoi la société civile du Katanga veut que soit respecté le principe de l’alternance pour qu’un autre fils du Katanga, pourquoi pas, où d’ailleurs accède à la magistrature suprême pour mettre en oeuvre de nouvelles idées. Il ne suffit pas d’être originaire d’une province pour qu’elle se développe, Mobutu en 32 ans de règne n’a pas pu faire progresser sa province d’origine. Et ça la société civile du Katanga l’a compris. Elle veut que les rd-congolais expérimentent les vertus de l’alternance démocratique. Aux dernières nouvelles, les miniers auraient exigé que soit unifié le compte ouvert par le gouvernement pour développer les infrastructures au Katanga avec le basket fund de Kabila. Les deux caisses ont déjà recueillis près de 7 millions essentiellement versés par KCC, MUMI et TFM. Pas sûr avec cette somme que Kabila amadoue les Katangais pour le faire changer d’avis sur l’opposition à la révision constitutionnelle. (Lire en fac similés les documents de la réunion entre Kabila et les miniers à la page 3,4,5,6 et 7).
Patrick mukendi/C-News