RD Congo - Coopec Imara : quand le doute s’invite dans le dossier judiciaire au Nord-Kivu

Vendredi 4 décembre 2015 - 05:57

Après des longs mois d’audition et d’audiences, l’affaire Adellar Mineene, ancien gérant de la Coopec Imara, prend une tournure inquiétante à Goma au Nord-Kivu (RD Congo). La lenteur des procédures judiciaires et le changement des statuts de certains accusés sont autant de signes inquiétants pour l’opinion pourtant confiants en la justice.
Deux mois de suspension, deux mois de retenue salariale, c’est la sanction infligée par la hiérarchie judiciaire à l’endroit de trois juges du Tribunal de grande instance de Goma, pour des faits non divulgués.
L’opinion publique espère que cette mesure ne serait pas liée à l’affaire sous RP 23932,  mettant en cause la Coopec Imara et ses principaux anciens dirigeants, mais qu’elle permettrait la manifestation de la vérité.
Il se constate en effet que la célérité, prise par l’affaire à son début, s’est réduite sensiblement. Les responsables judiciaires en charge du dossier justifient cette lenteur par le  « volume des dossiers judiciaires aux cours et tribunaux ». Loin de convaincre les membres de la Coopec Imara, qui veulent récupérer leurs épargnes, cette situation entretient plutôt des suspicions envers à la justice congolaise.
A la Banque centrale du Congo (BCC) notamment, censée de faire montre de « neutralité », est partie au procès, ce qui inquiète davantage. A tort ou à raison, les personnes lésées s’interrogent aussi sur l’impartialité de l’Avocat général et ancien procureur à Goma qui a effectué, depuis le début de l’instruction du dossier, plusieurs rotations dans la capitale du Nord-Kivu, à la tête de plusieurs missions de la Cour suprême et du Parquet général de la République.
« Il n’a aucun intérêt à ce que l’affaire soit tirée au clair, lui qui serait redevable de la coopérative », soupçonnent des membres de cette coopérative, « désespérés ». Des allégation totalement rejetées par l’intéressé qui dit accomplir la mission qui lui est assignée, disant qu’il ne voit aucune raison d’intimer des ordres aux juges ou d’être à la base de la décision de suspension de trois juges du TGI.
« Main noire »
Depuis le déclenchement du dossier Coopec Imara, l’Avocat général et sa délégation passent régulièrement à Goma, dans des missions financées par la Banque centrale du Congo, pourtant, elle-même parti au procès.
« Pour quel intérêt ? », s’interrogent les épargnants désabusés et déçus par des fourbes promesses de redressement de leur coopérative.
« Elle (la BCC) nous a promis le dénouement rapide de la situation avant de se retirer calmement dans un procès loin d’être rassurant », se plaignent- ils.  Et d’ajouter :
« C’est la BCC, partie au procès, qui assure même le séjour de ceux là mêmes qui sont censés nous rendre justice. De quoi douter de leur impartialité », se lamentent plusieurs membres présents à l’une des audiences sur la dite affaire. « Nous sommes comme des enfants sans père et personne n’ose lever le moindre doigt pour fustiger cette main noire », concluent-ils.
Le collectif de membres de cette coopérative, qui a initié de nombreuses actions, a été réduit au silence. « Cela traduit un acharnement contre l’ancien gérant de la coopérative. Seule l’accélération du procès avec tous les prévenus peut démontrer le contraire », pensent des spécialistes du monde coopératif.
En effet, il est observé  que, de tous les 11 prévenus, seul le gérant Adellar reste incarcéré. Toutes ses demandes de mise en liberté provisoire, jugées « fondées », ont été rejetées. Pourtant, les autres prévenus, les vrais patrons de l’ancien gérant - un simple agent qu’ils contrôlaient- sont aujourd’hui libres.
Certains d’entre eux ont même été promus à des postes de responsabilités politico-administratives dans et hors de la province du Nord-Kivu. Ce qui, sans doute, compliquerait davantage la poursuite du procès.