RDC : Katumbi-Kamerhe, l’entente forcée

Vendredi 23 octobre 2015 - 14:16

[caption id="attachment_35874" align="alignleft" width="499"]Image retirée. RDC : Katumbi-Kamerhe, l’entente forcée[/caption]

Depuis la démission fracassante de Moïse Katumbi du parti présidentiel le 29 septembre dernier, la rencontre avec Vital Kamerhe paraissait inévitable. Divulguée par Jeune Afrique, l’entrevue a bien eu lieu mercredi 21 octobre au Foreign office de Londres. Katumbi et Kamerhe sont actuellement les deux candidats les plus sérieux face à la majorité présidentielle, dans la perspective des élections de 2016. L’arrivée du très populaire ex-gouverneur de l’ex-Katanga dans l’arène politique congolaise pour la présidentielle bouscule les cartes. Jusque-là, l’opposition au président Joseph Kabila s’organisait autour de l’UDPS d’Etienne Tshisekedi, de l’UNC de Vital Kamerhe et du MLC de Jean-Pierre Bemba. Mais avec un leader vieillissant et une succession difficile entre Etienne et Félix Tshisekedi, l’UDPS a perdu de son influence dans l’opposition, notamment déstabilisant sa base en acceptant le « dialogue » proposé par Joseph Kabila. Quant au MLC, la détention de Jean-Pierre Bemba à la Cour pénale internationale depuis 2008, continue d’handicaper fortement l’emprise de son parti sur l’opposition.

Katumbi-Kamerhe : des anciens proches de Kabila

Pour animer l’opposition à Joseph Kabila, reste donc deux anciens proches du chef de l’Etat et cadres du parti présidentiel (PPRD) : Vital Kamerhe et Moïse Katumbi. Le premier a quitté le navire en 2009 pour fonder son propre parti, l’UNC, et le second a démissionné fin septembre, accusant Joseph Kabila de vouloir s’accrocher au pouvoir au-delà du délai constitutionnel. Si le patron du célèbre club de foot, TP Mazembe, est désormais un « jeune opposant », il se retrouve dans la même situation que Vital Kamerhe il y a 6 ans lorsque le président de l’Assemblée nationale a claqué la porte du PPRD. Entre temps, le leader de l’UNC en a profité pour creuser son sillon et faire ses armes lors de la présidentielle de 2011. Vital Kamerhe a terminé à la troisième place au premier tour de scrutin, gagnant ainsi ses galons d’opposant, même si certains le soupçonnent toujours d’agir en « sous-marin » pour son ancien patron, Joseph Kabila.

Un attelage qui fonctionne… sur le papier

Dans la course à la présidentielle de 2016, dont on ne sait pas si Joseph Kabila sera sur la ligne de départ malgré l’interdiction de la Constitution, Katumbi et Kamerhe sont donnés partants, même si le premier n’a pas encore officiellement annoncé sa candidature. Alors pourquoi cette rencontre à Londres ? Dans une présidentielle à un seul tour, l’opposition sait qu’elle devra avancer unie face au candidat de la majorité. Il est donc bon de se jauger. Katumbi est riche, célèbre et peut faire des miracles au Katanga, province pourtant réputer pro-Kabila, alors que Kamerhe, plus politique que Katumbi, peut apporter son expertise et surtout les voix du Sud-Kivu, dont il est originaire. Sur le papier, l’attelage fonctionne.

Pour des élections dans les délais

Mais attention, il n’y a qu’un seul fauteuil et les deux personnalités sont réputées pour vouloir jouer les premiers rôles et rarement les figurants. La rencontre de Londres n’a pas pour le moment l’objectif de composer un « ticket » (trop prématuré) pour la présidentielle, mais plutôt de voir comment s’organiser pour que les élections se tiennent bien en temps et en heure, fin novembre 2016… et si possible sans Joseph Kabila. Le rapprochement Katumbi-Kamerhe envoie donc un signal clair à la majorité présidentielle, mais aussi à la communauté internationale : un duo crédible est en mesure de se constituer pour une alternance en RDC. Le premier objectif du « couple » Katumbi-Kamerhe est donc que les élections se déroulent dans les délais. Le pire des scénarios serait un « glissement » du calendrier électoral et un maintient au pouvoir « de facto » du président Joseph Kabila.

Pacte de non-agression

L’entente entre les deux hommes restent donc pour le moment « contrainte ». Katumbi et Kamerhe ont besoin l’un de l’autre pour mettre la pression sur le pouvoir afin d’organiser les élections dans les temps, mais aussi pour entraîner dans leur sillage le reste des partis d’opposition. Les « deux K » souhaitent créer une dynamique irréversible avec laquelle G7, UDPS, MLC… seront obligés de composer. Une fois « l’union sacrée » réalisée, il sera alors temps de discuter de la répartition des poste : Président, Premier ministre, ministres… Et c’est sans doute à ce moment que les choses sérieuses vont réellement commencées. Si, pour le moment, la rencontre de Londres scelle une sorte de « pacte de non-agression » entre Katumbi et Kabila, la bataille pour le fauteuil présidentiel aura bien lieu, une fois la date de la présidentielle définitivement arrêtée.

Christophe RIGAUD – Afrikarabia

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