«Nous risquons de nous tromper de cible. L’ennemi est encore présent dans le territoire de Beni». Le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku a lancé cet appel mercredi 22 octobre à la population de ce territoire, après une manifestation des jeunes des villages d’Oicha, Mbau et Mavivi devant le quartier général de la Monusco. Les manifestants protestaient contre la mort la veille à Mbau de deux jeunes membres d’une brigade de patrouille.
Selon des sources de la société civile, ces jeunes ont été tués par balle au cours d’une patrouille de l’armée dans la zone.
Pour protester contre cet incident, des habitants ont barricadé plusieurs avenues dans Beni-ville. Ils exigeaient aussi une action d’urgence de l’armée et de la Monusco contre les rebelles ougandais de l’ADF.
Pour le gouverneur de province, Julien Paluku, ce n’est pas le moment de se tromper de cible.
«Ce matin, la population était dans la rue pour commencer à s’en prendre aux institutions, particulièrement les Nations unies… En nous attaquant à la Monusco ou aux institutions, l’ennemi risque de se réorganiser parce que toute la police et tous les éléments des forces armées vont focaliser leur attention sur la protection des institutions au lieu de se concentrer sur l’ennemi», a-t-il expliqué.
De son côté, le chef de la Monusco, Martin Kobler, a condamné les actes de violences de la population de Beni contre le personnel et les véhicules de la mission, ainsi que l’attaque contre la base de la Monusco à Mavivi.
«La situation à Beni n’est pas facile, on a des réactions contre la Monusco et maintenant la situation est calme. C’est grâce à l’intervention des autorités locales – nous venons de parler avec le gouverneur du Nord Kivu – mais c’est aussi grâce à l’intervention des FARDC qui protègent nos bureaux à Béni», a-t-il expliqué au cours du point de presse hebdomadaire des Nations unies mercredi.
Il a appelé la population à ne pas toujours chercher à faire porter à la mission onusienne la responsabilité de ce qui tourne mal mais, au contraire, à lui apporter tout son soutien afin de lui permettre de remplir sa mission.
«Ça ne vaut pas la peine de prendre la Monusco comme bouc émissaire pour ce qui ne marche pas et nous devons avoir, nos forces, mais aussi nos civils, la mobilité de vous protéger. Si vous nous attaquez, alors vous nous empêcher de faire notre boulot ici. Nous devons avoir votre soutien et pas vos attaques», a-t-il exhorté.
Le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies en RDC a cependant reconnu que, de son côté, la Monusco doit regagner la confiance de la population par des actions conjointes.
«On est en train de l’organiser», a-t-il conclu.
Au cours de la même journée, le président de l’Assemblé provinciale du Nord-Kivu avait affirmé que «le Nord-Kivu est présentement dans une situation de guerre».
Jules Hakizumwami a justifié ses propos par l’activisme accru, ces derniers temps, des groupes armés étrangers et locaux, responsables des tueries et autres formes d’exactions contre les populations de plusieurs entités de cette province.
Dans la ville-territoire de Beni, 84 personnes ont été tuées et plus d’une trentaine d’autres blessées au cours de massacres perpétrés depuis début octobre par les rebelles ougandais ADF.