Un ancien « kadogo » retrouve sa grande sœur vingt ans après

Mercredi 21 octobre 2015 - 11:04

Les voisins n’en croyaient pas leurs yeux devant ce spectacle inhabituel et inattendu ! Deux adultes en pleurs entourés de leurs enfants, s’embrassaient et parlaient dans une langue inconnue dans ce quartier Itimbiri de la Commune de Kintambo. Ce sont ces pleurs qui ont attiré d’autres badauds accourus pour s’informer sur cet évènement rarissime. Agnès Vetsuvi et Laurent Vetsuvi venaient de se revoir après presque vingt ans de séparation forcée.

Laurent Vestuvi, aujourd’hui âgé de trente-deux ans, avait été enrôlé de force dans les forces  armées de l’AFDL en 1996. Alors âgé de douze ans et élève en sixième primaire dans une localité située dans la périphérie d’Aru, un centre de négoce très fréquenté juste à la frontière de la RDC avec l’Ouganda, il avait été enlevé par des miliciens congolais commandés par des officiers de l’armée régulière ougandaise près d’une rivière où il s’adonnait à la pêche en compagnie de ses amis d’enfance et du village. Des quinze jeunes enfants qui se trouvaient sur ces lieux, seuls deux d’entre eux ont été épargnés car à peine âgés de cinq à six ans. Ce sont eux qui avaient alors alerté les parents de cet enlèvement du petit Laurent Vestuvi et ses compagnons d’infortune. Il avait parcouru des centaines de kilomètres à pieds comme porteur des munitions et armes lourdes pour le compte de l’un des bataillons de la milice congolaise sous les ordres des officiers de l’armée régulière ougandaise, force de l’occupation après l’agression de la RDC par les armées régulières de deux Etats voisins de l’Est, à savoir le Rwanda et l’Ouganda.

Guerre de Kisangani 

Le calvaire du petit Laurent Vestuvi s’est poursuivi durant trois ans jusqu’aux affrontements à l’arme lourde survenus en pleine ville de Kisangani en 1999 entre les éléments de deux armées régulières du Rwanda et de l’Ouganda. Des affrontements qui ont duré toute une semaine causant la mort de plus de cinq mille habitants de cette ville martyre enterrés dans un cimetière de fortune érigé précipitamment dans la Commune urbaine de Mangobo. Lui et ses compagnons d’infortune ont enduré ce calvaire, quatre d’entre eux sont morts d’épuisement et des maladies avant d’arriver à Kisangani.

C’est au cours de ces affrontements à l’arme lourde que le petit Laurent Vestuvi a pu s’échapper pour se réfugier dans une famille habitant dans la Commune de Kabondo. Après le départ des éléments de l’armée régulière, lui et quatre de ses compagnons d’infortune se sont alors présentés aux autorités militaires de l’armée rwandaise qui les ont alors incorporés dans leurs rangs. Voilà comment, devenu cinq mois plus tard agent de la garde rapprochée d’un officier supérieur congolais, il a alors eu la chance de venir à Kinshasa par bateau.

Aventure angolaise

Profitant d’une mission vers la localité de Kahemba dans la province du Bandundu, Laurent Vestuvi devenu sergent-major après une formation au Centre de Kibomango et à la suite des démarches faites en sa faveur par sa hiérarchie, il décida de faire un saut en Angola à l’initiative d’un autre officier supérieur très introduit dans les milieux de l’UNITA de feu Savimbi. Il travailla alors dans les carrières de diamant en compagnie de cet officier supérieur. Par un heureux hasard, il fit la connaissance d’une congolaise originaire, comme lui, du district de l’Ituri. Cette femme qui faisait des navettes entre la RDC et l’Angola l’engagea comme son garde du corps. Voilà comment il se fit un peu d’argent qui lui permit de se taper un terrain à Masina où il construisit une belle maison grâce aux revenus de ses navettes entre Kanfumfu et Kinshasa. Entretemps, il prit femme qui donna naissance à quatre enfants, dont deux filles et deux garçons. Le couple eut la chance de fructifier leurs navettes et à ce jour, il possède quatre maisons et trois véhicules dont deux voitures et un gros camion.

Les retrouvailles avec sa grande sœur

            C’est toujours grâce à cette dame originaire du district de l’Ituri comme lui qu’il va se retrouver en face de  sa grande sœur Agnès Vestuvi, aujourd’hui âgée de cinquante ans et mère de dix enfants. Marie-Laure Apendeki, femme d’affaires très florissante qui avait engagé Laurent Vestuvi comme garde du corps, par un heureux hasard découvrit Agnès Vestuvi. Vendeuse au petit Marché de KIntambo, elle était en train de parler au téléphone avec son mari lorsque Marie-Laure Apendeki arriva devant son échoppe. Ils échangèrent quelques mots et c’est lorsque la vendeuse se présenta par son nom de famille que Marie-Laure Apendeki lui dira que l’un de ses gardes du corps se nommait Laurent Vestuvi. Voilà comment Agnès a pu retrouver son petit-frère trente ans après leur séparation douloureuse. Les parents et d’autres enfants avaient été victimes d’un massacre perpétré dans leur village par des miliciens d’une tribu rivale Agnès Vestuvi put s’échapper par miracle pour se réfugier dans la brousse pendant quatre ans, a-t-elle indiqué. Elle fut récupérée par des éléments d’une patrouille mixte des FARDC et la MONUSCO et devint ensuite l’épouse de l’un des agents civils de la force onusienne.

                                                                        Castro 

 

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