Si pour le président Joseph Kabila, la publication du calendrier électoral dépend des opérations de révision du fichier électoral, Corneille Nangaa, président de la Céni, a un point de vue contraire. Selon lui, seul un consensus politique permettra à la Céni de rendre enfin public ce fameux calendrier. Nangaa tente de se démarquer de Kabila. Question de reprendre le contrôle d’un processus qui pourrait lui échapper.
Le calendrier électoral est un sujet controversé. Et les propos tenus dernièrement à Kasese (Ouganda) par le chef de l’Etat, Joseph Kabila, ont presque jeté de l’huile au feu. La classe politique s’est mise en ébullition. Apparemment, les nombreuses critiques qui ont suivi les déclarations du chef de l’Etat sont parvenues jusqu’à la Céni qui tente aujourd’hui de calmer la tempête.
Depuis Gbadolite, Corneille Nangaa essaie de se démarquer. Selon lui, seul un consensus politique, autrement dit le dialogue, conditionne la publication du calendrier électoral.
Propos contredisant le président Kabila qui liait plutôt cette opération au bouclage définitif des opérations d’enrôlement des électeurs. Corneille Nangaa serait-il en train de s’affranchir de la forte mainmise de la Majorité présidentielle? On n’est pas loin de corroborer cette thèse.
Le plus évident est que Corneille Nangaa cherche à reprendre le contrôle d’un processus électoral qui pourrait lui échapper. Il ne faut pas être à sa place pour le moment. Car, l’homme subit des pressions de toutes parts. La Majorité présidentielle qui l’a propulse au poste de président d la Céni (Commission électorale nationale indépendante) ne le lâche pas. Elle le tient à l’œil, prêt à le désavouer à tout moment dès qu’il s’écarte de son schéma. C’est e sort qui a été d’ailleurs réservé bien avant lui à André Mpungwe lorsqu’il ne parvenait plus à jouer le jeu de la Majorité présidentielle. Corneille Nangaa a donc l’épée de Damoclès suspendue sur tête. Tout peut lui arriver. Même une éviction.
Dans tous les cas, à Gbadolite, le président de la Céni a pris ses distances par rapport aux affirmations du chef de l’Etat. Selon lui, les opérations de révision du fichier électoral par l’enrôlement de nouveaux électeurs ne peuvent pas conditionner la publication du calendrier électoral. La Céni attend juste un consensus politique pour publier ce calendrier.
L’on se rappelle que plusieurs organisations de la Société civile avaient interpellé le président de la Ceni ces derniers jours, notamment sur la question du calendrier électoral.
NANGAA IMPOSE LE RYTHME
Venu à Gbadolite pour faire le point des équipes sur le terrain, Corneille Nangaa a remis les pendules à l’heure au micro de RFI. « Nous allons publier le calendrier électoral. Nous ne fermons pas les oreilles à ce que nous disent les uns et les autres, assure-t-il. Nous avons bénéficié ici d’un appui important de la communauté internationale, qui a déployé deux missions concertées : Nations unies et OIF. Le rapport donné par ces experts indique plus ou moins en son point 50, que la publication unilatérale aujourd’hui du calendrier électoral par la Céni, avant le consensus, est un problème. Et que ce n‘est pas souhaité. Ils proposent que la Céni attende qu’on ait un consensus là-dessus ».
A la question de savoir si l’existence de ce rapport International justifie le retard de la Céni à remplir ses obligations constitutionnelles, Corneille Nangaa rétorque que les choses seront faites en temps voulu, une fois les préalables remplis : « Les obligations constitutionnelles, il faut les avoir toutes. La Constitution demande à la Ceni de constituer le fichier électoral. Il donne même la séquence des activités électorales, dont l’enrôlement des électeurs et les différents scrutins. L’article 73 indique aussi qu’il faut qu’on convoque l’électorat, pour ce qui concerne plus ou moins l’élection du président de la République, 90 jours avant la fin du mandat du président en exercice. Qui, on ne peut pas convoquer quelque chose qui n’existe pas. Nous sommes en train de travailler pour avoir les préalables et nous allons convoquer l’électorat dès que possible ».
Malgré tout, l’opposition continue à soupçonner le président de la République, le gouvernement et la Céni de tout faire pour retarder l’élection et permettre à Joseph Kabila de se maintenir au-delà de son deuxième et dernier’ mandat constitutionnel. Au cœur de cette polémique, il y a la Céni, pouvoir organisateur des élections en RDC. Principale cible des uns et des autres, Corneille Nangaa doit aujourd’hui rassurer pour rétablir la crédibilité de son institution.
En prenant ses distances par rapport à Kabila, Nangaa s’est peut-être engagé sur la voie de recrédibilisation de la Céni aux yeux de l’opinion.
Par F.K.