RDC : les sites historiques mal protégés par le législateur

Mercredi 17 juin 2015 - 10:50

D’anciens étudiants de l’Université Libre de Bruxelles (ULB) ont organisé le lundi 15 juin 2015 dans la soirée, au Centre Wallonie Bruxelles (CWB) une conférence-débat sur la préservation du patrimoine architectural urbain en RDC. Présent au CWB, Baudouin Banza a remercié ses hôtes pour avoir organisé ce rendez- vous à Kinshasa. Ces échanges, a-t-il indiqué, sont importants dans la mesure où ils vont être animés par des spécialistes en la matière.

Le Kongo Central regorge d’édifices monumentaux censés être préservés. C’est le cas du palais du premier gouverneur général du Congo-Belge à Boma, du célèbre baobab, du chalet de Stanley hélas consumé par le feu suite à un problème d’entretien…. «Notre gouverneur a fait faire des maquettes de ce chalet pour le restaurer, a dit de son côté Ngoma Binda, le ministre du Kongo Central chargé de la Culture et de l’Education.

De par sa proximité avec la capitale et ses richesses culturelles, le Kongo Central est une province touristique. Jacques Mbadu est animé du souci de préserver ce riche patrimoine», a-t-il souligné.

Une législation éparse et lacunaire

Le directeur général du Bureau d’études et d’aménagement (BEAU) et modérateur de ces échanges, Kankonde Mbuyi, a parlé de l’importance de la structure qu’il dirige. Lui et ses collaborateurs font des interventions en amont et tiennent compte du patrimoine architectural, a-t-il précisé.

Me Etienne Unega a passé en revue les différents textes ficelés par l’autorité coloniale et les décideurs politiques congolais sur la protection du patrimoine architectural urbain, énumérant à l’occasion l’ordonnance foncière du 1er juillet 1885, le décret foncier du 16 septembre 1886, les décrets à caractère urbanistique de février 1949, juillet 1954… la loi de 1973 sur la législation foncière, les décrets de décembre 2009, avril 2013.

Quant aux mécanismes de préservation des sites( églises et résidences coloniales,…) et autres monuments historiques , il a évoqué les certificats d’enregistrement, les expropriations pour cause d’utilité publique, …. Au chapitre des conventions culturelles, il a fait état de l’inventaire, du classement pour inscription au patrimoine mondial. Il y a aussi le Code pénal, pour lutter contre les destructions et autres dégradations…
Le pays dispose d’une législation éparse, méconnue et lacunaire en matière de préservation du patrimoine architectural, a conclu ce juriste.
Joseph Ibongo, directeur général des Musées nationaux, s’est appesanti sur les mesures à prendre en matière de préservation des sites historiques. Avec la construction des routes, des rails, le regard du «patrimoiniteur» doit être alerte pour voir si ces infrastructures n’ont pas d’impact négatif sur notre patrimoine.
Avec la disparition des nomades chasseurs de l’époque glaciaire, les maisons ont acquis une grande importance. Pendant l’époque coloniale, il y a eu par exemple l’adoption du décret du 16 août 1939 pour la sauvegarde des sites indigènes», a-t-il fait remarquer.

Un travail laborieux

Ils a relevé que certains textes ont subi l’usure du temps et ont été ficelés sans tenir compte des prescrits de l’Unesco. Le législateur vient de mettre en place la commission de classement des biens culturels qui est déjà à pied d’œuvre. Et d’indiquer avoir fait, à travers sa récente décision, du palais du gouverneur du Congo-Belge à Boma un musée.
Il a ajouté que des sites historiques aujourd’hui à l’abandon devraient être revalorisés.
Le prof Yves Robert s’est ingénié à souligner les caractéristiques des architectures du 19ème et 20ème siècle au Kongo Central et fait comprendre à l’assistance que les héritages culturels sont en mesure de devenir un levier de développement urbain.
Revenant sur le passé de l’empire Kongo, l’historique de la ville de Boma, ses heures de gloire… il s’est attardé sur les raisons qui ont poussé les colons à expérimenter un type d’architecture bien particulier à Boma par exemple. Ce passionné d’architecture a même évoqué le dilemme auquel sont confrontés les Congolais sur la nécessité de construire un port en eau profonde à Banana ou un pont route-rail à Kinshasa.
Francis Metzeger, professeur à l’ULB a expliqué les actions à mener pour restaurer des sites historiques d’importance vitale. Ces exposés ont été suivis des débats.
Jean-Pierre Nkutu