Le ministre de la justice doit-il avoir un droit d’injonction, positive ou négative, sur le parquet ?
Dans sa mercuriale lue ce jeudi 15 octobre 2020, lors de l'audience solennelle de la rentrée judiciaire, le procureur général près la Cour de cassation s’est clairement prononcé sur les prérogatives du ministre de la Justice sur le parquet. Prérogatives qui avaient fait l’objet d’une vive polémique à l’occasion du dépôt à l’assemblée nationale des lois Minaku et Sakata sur la réforme de la justice.
Victor Mumba dit être favorable à l’injonction positive du ministre de la justice, qui peut encourager le Parquet à se saisir d'une affaire.
Mais, il dit être opposé à l’injonction négative, qui confère au ministre la prérogative de bloquer l’instruction de certains dossiers.
Contrairement à l’injonction positive, qui entre dans le cadre de la collaboration entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif, l’injonction négative constituerait un recul de l’indépendance de la justice, d’après le PG Mumba.
Il plaide pour la sauvegarde de l'indépendance de la magistrature, plus précisément de celle du ministère public.
"S'opposer à l'indépendance de la magistrature et plus spécifiquement à celle du ministère public ou la réduire constituerait, sans aucun doute, un recul regrettable au regard, tant de la législation nationale en vigueur que du droit comparé", a-t-il déclaré.
Le PG a affirmé que l'amendement introduit à l'article 149 de la Constitution en 2011 a créé une désharmonie avec l'article 152 de la même Constitution qui fait des magistrats du Parquet des membres à part entière du Conseil supérieur de la magistrature.
Toutefois, pense-t-il, l'indépendance affirmée du pouvoir judiciaire n'exclut pas des passerelles de collaboration entre les deux pouvoirs et affirme que le pouvoir d'injonction positive du ministre de la Justice en est une parfaite illustration.
Se référant au droit comparé, il a démontré que le ministère public est complètement indépendant vis-à-vis du ministère de la Justice, dans plusieurs pays civilisés du monde.
Il a rappelé le rôle crucial du parquet dans la régulation de la société.
"Je tiens à rappeler que la Justice est un service indispensable à la société et que le parquet y joue un rôle prépondérant qui justifie son rattachement à un pouvoir judiciaire dont l'indépendance est reconnue par la Constitution", a-t-il soutenu.
Décriées par une grande partie de la classe sociopolitique congolaise, les propositions de loi Minaku-Sakata ont été programmées à l'assemblée nationale parmi les matières qui feront l'objet des débats au cours de cette session ordinaire de septembre.
Orly-Darel Ngiambukulu