Deux ans après l’appel d’offres, l’exploitant du gaz méthane toujours inconnu

Lundi 4 juillet 2016 - 16:53

Depuis le 21 juillet 2014, le ministère des Hydrocarbures avait lancé l’avis à manifestation d’intérêt au recrutement d’une société pour l’exploitation du gaz méthane du lac Kivu, en vue de la production de l’électricité.

Quatorze candidats y ont concouru.

 

Après 23 mois, l’opinion s’interroge sur le non aboutissement de cet appel d’offre qui, au finish, devra doter la RDC d’une entreprise capable d’extraire et exploiter le gaz méthane du lac Kivu. Selon l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP), Kivu Lake Energy Corporation (KLEC) partait favori parmi les quatorze entreprises ayant concouru.

 

Faisant suite à l’avis de non objection de la Direction générale du contrôle des marchés publics sur le rapport d’évaluation des manifestations d’intérêts et la liste restreinte des candidats présélectionnés, le ministère des Hydrocarbures a invité la société KLEC à présenter ses propositions suivant la DP n°002/GAZ.ELEC/PPP/ CGPMP/MIN-HYDRO/2014, à laquelle huit autres candidats présélectionnés ont été conviés.

A l’issue de l’analyse combinée des propositions techniques et financières, l’autorité contractante a informé la société KLEC de sa disqualification pour la suite de la procédure. Non satisfaite, KLEC a introduit son recours gracieux auprès de l’autorité contractante. Y faisant suite, l’autorité contractante confirmera sa décision.

C’est ainsi que la requérante saisira l’ARMP d’un recours en appel. La société sus indiquée dit avoir été victime d’injustice de la part des autorités du ministère des Hydrocarbures. Aux dernières nouvelles, le ministère des Hydrocarbures a confié provisoirement ce marché à la société tunisienne Engineering Procurement & Project Management (EPPM).

 

Après évaluation des manifestations d’intérêts des candidats, la commission de passation des marchés de l’autorité contractante a établi en date du 30 octobre 2014, une liste qui plaçait l’entreprise KLEC en tête avec 76,74 %. Ensuite venaient plusieurs autres entreprises. Notamment Ainsley (74,71%), Symbion power Rwanda (74,07%) et Engineering Procurement & Project Management (EPPM) arrivait en 5ème position avec 67,87% de points.

 

Pourquoi une entreprise qui se trouvait en tête de liste doit être disqualifiée de la course en faveur de la 5ème, supposée être moins performante et ne possédant pas l’unique technologie appropriée et approuvée par la Banque mondiale pour extraire de manière sécurisée le gaz méthane du lac Kivu ? Ne s’agit-il pas là des manœuvres visant à repêcher un naufragé qui n’est autre que l’EPPM ?

 

QUI ENTRETIENT LE FLOU?

Les responsables de KLEC avaient saisi le comité de règlement des différends de l’ARMP. Après examen du dossier, dans sa décision n°05/16/ARMP/CRD du 23 mars 2016 publiée sur son site web, I’ARMP a donné raison à la société KLEC sur, toutes les dix allégations évoquées par l’autorité contractante. L’ARMP aurait ainsi déclaré recevable et fondé, le recours de la requérante (KLEC).

Le flou entretenu laisse entrevoir la volonté de l’autorité contractante à éliminer délibérément l’entreprise congolaise KLEC de la course en faveur de son challenger EPPM, société de droit tunisien.

 

La société KLEC entend venir u secours des populations du grand Kivu. Elle s’apprêterait à importer du gaz de l’Afrique du sud pour produire environ 200 Mégawatts d’énergie électrique dans les provinces du Nord-Kivu et Sud-Kivu, afin de promouvoir l’essor économique et minier dans cette partie de la République.

 

Selon certains experts, cette opération assez couteuse, pourrait être effective d’ici un an. Des études de faisabilité seraient déjà au point, des moyens financiers mobilisés. Bientôt le processus de l’importation de ce gaz pourrait débuter.

 

Un investissement colossal dont certaines taxes et autres redevances sensées renflouer les caisses de l’Etat échapperaient à la RDC qui traverse des moments de vaches maigres dus à la baisse de cours des matières premières sur le marché international.

L’alternative d’importation du gaz de l’Afrique du Sud, épargnerait à KLEC de pertes de temps inutiles et injustifiées, ainsi que le favoritisme qui caractérise certains responsables de services .publics. Ceux-ci préfèrent attribuer l’exploitation du gaz méthane du lac Kivu aux entreprises étrangères incapables de remplir les conditions fixées par la loi.

 

Alors que le Rwanda voisin a déjà atteint l’étape de l’exploitation industrielle du gaz méthane dans le lac Kivu, la RDC continue à tergiverser. A l’instar de KLEC, plusieurs entreprises ayant concouru à cet appel d’offre sont parfois frustrées face ce qu’elles qualifient de « favoritisme » et « clientélisme ». La Société COMHYDEV SPRL se compterait parmi les victimes. Malgré la décision de l’ARMP levant la suspension du processus d’affectation du marché de l’exploitation du gaz méthane du lac Kivu pour produire du courant électrique, force est de constater que ce marché est resté en suspens.

 

Pour encourager l’entreprenariat congolais, le bon sens exige que l’autorité contractante attribue de droit à KLEC, le marché d’exploitation du gaz méthane du lac Kivu. Ce qui créerait des centaines d’emplois et combattrait la carence en énergie électrique pour l’industrialisation de la région. En même temps, ce projet aidera à lutter contre la déforestation, l’insécurité et sauverait la faune et la flore autour de ce lac.

Toutefois, il revient à l’entreprise lésée de se réserver le droit de saisir les instances judiciaires nationales et internationales en vue d’obtenir gain de cause.

Par Olivier KAFORO