Dialogue incertain, psychose de glissement, velléités de balkanisation : le chaos à nos portes !

Lundi 18 avril 2016 - 10:56
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Annoncé depuis dix mois, le dialogue politique n’a toujours pas ouvert ses portes. Revenu à Kinshasa il y a plus d’une dizaine de jours pour les derniers réglages, le Facilitateur Edem Kodjo a du mal à résoudre l’équation des quotas de participation à ce forum. Dans ce pays, où beaucoup d’acteurs de la Majorité, de l’Opposition et de la Société civile rêvent de devenir ministres, sénateurs, députés ou mandataires d’entreprise publique comme au sortir de la CNS (Conférence Nationale Souveraine) en 1991-1992 et du Dialogue Intercongolais de Sun City en 2002-2003, personne ne veut rater ce forum.

Par conséquent, le format réduit d’un Comité préparatoire de 30 membres imaginé par Edem Kodjo, avec 12 délégués de la Majorité, 12 de l’Opposition et 6 de la Société civile soulève des vagues au niveau de ces deux dernières « composantes ». Au niveau de l’Opposition, l’UDPS ne tient pas à partager le quota de 12 avec ceux que ce parti considère comme de faux opposants, animateurs de coquilles vides fonctionnant dans leurs mallettes. Quant à la Société civile, elle ne sait comment faire la répartition des six sièges lui impartis avec ses « nébuleuses », dont les unes sont assujetties au pouvoir en place, et les autres à l’Opposition.

Ainsi, au lieu d’aller à l’essentiel et de débloquer rapidement le processus électoral en panne, la classe politique et la société civile jouent des prolongations qui vont naturellement dans le sens du « glissement » de tous les enjeux et dangers.

Et, au moment où les préparatifs du dialogue s’enlisent, Kodjo donne l’impression de ne plus savoir s’il doit privilégier un Comité préparatoire restreint ou opter pour un mini-parlement représentatif de tous les segments de la société congolaise (institutions publiques, partis politiques, Ong de défense des droits de l’homme, confessions religieuses, mouvement des jeunes et des femmes, chefs coutumiers, corps des métiers, personnes avec handicap, syndicats, etc.).

Nouvelle agitation autour de l’article 70

Alors que les Congolais sont préoccupés par la tenue du Dialogue, une nouvelle agitation s’observe autour de l’article 70 de la Constitution. En effet, cette disposition stipule que « Le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois. A la fin de son mandat, le Président de la République reste en fonctions jusqu’à l’installation effective du nouveau Président élu ».

Selon la Majorité Présidentielle, dont près de 300 députés ont signé, le week-end dernier, une pétition à déposer incessamment à la Cour Constitutionnelle, il faut comprendre l’article 70 de la Constitution comme le feu vert donné par le législateur au Président de la République en fonctions de ne rendre le tablier qu’à l’investiture de son successeur sorti des urnes. Et tant que l’élection présidentielle n’est pas organisée, le pays ne peut tomber dans la vacance de pouvoir suggérée par les articles 75 et 76.

Et, pour se convaincre qu’elle n’a pas tort, elle se propose de requérir l’avis de la Cour Constitutionnelle au sujet de la fin de mandat du Chef de l’Etat actuel.

Bien que légale, cette initiative trouble une partie de l’opinion nationale qui pensait que la question de la fin de mandat du Président de la République allait trouver sa réponse au dialogue, au même titre que celles relatives au processus électoral. Ce signal négatif de la famille politique du Chef de l’Etat peut pousser à croire qu’elle entretient un agenda caché de glissement et qu’elle ne serait pas franchement acquise à la thèse de la tenue du dialogue.

Vers l’impasse électorale

La communauté nationale assiste, finalement, à un jeu de cache-cache entre, d’un côté, des acteurs politiques désireux de conserver le pouvoir par des voies non démocratiques, et de l’autre, leurs adversaires politiques avides de le conquérir sans passer par les urnes. A ce stade, le pays est pris en otage par des membres de deux camps politiques, davantage préoccupés par leur confort individuel que par les intérêts de la collectivité nationale.

Pendant que le pays tangue dangereusement vers une situation de chaos, ceux qui occupent les postes de gestion de la chose publique ou qui aspirent à les remplacer sacrifient l’avenir du grand nombre sur l’autel de leurs ambitions égoïstes.

Les ingrédients du « glissement » semblent réunis. Mais, les uns et les autres ont-ils suffisamment réfléchi aux conséquences de l’impasse électorale en décembre 2016 ? Ceux qui torpillent le processus électoral, au sein de la Majorité comme de l’Opposition, jouent avec un feu dont ils risquent de ne pas maîtriser les effets, le moment venu.

Les forces occultes en embuscade…

L’incapacité des Congolais à se mettre d’abord sur leur processus électoral et à engager leur pays dans la voie d’une démocratie adulte constitue certes un souci pour la Communauté internationale mais il se trouve, dans le concert des nations développées comme sous-développées ainsi que dans le panel des multinationales, des forces occultes prêtes à les aider à cheminer vers la balkanisation. A ce sujet, les dimensions continentales du pays et ses fabuleuses ressources naturelles constituent des facteurs catalyseurs des convoitises de tous ordres.

Des puissances occidentales, des pays voisins ou des multinationales ayant des visées sur le pétrole, le coltan, le diamant, le cuivre, l’or, le gaz méthane, le cobalt, le bois d’œuvre, l’eau douce… de la République Démocratique du Congo ne demanderaient pas mieux que de pousser ses fils et filles à l’éclater en Républiquettes. Si la stratégie du chaos a fonctionné au Soudan voisin, qu’est-ce qui empêcherait les architectes de la balkanisation d’ériger en Etats autonomes le Nord-Kivu, le Sud-Kivu, l’Ituri, le Lualaba, le Nord-Katanga, etc ?

Ceux qui s’entredéchirent pour ne pas faire émerger un consensus autour du processus électoral et ne pas donner la parole au souverain primaire congolais devraient bien lire les signes du temps. Sinon, ils risquent de se réveiller quand le grand Congo ne sera plus qu’une mosaïque de Républiquettes, avec leurs seigneurs de guerre, comme ce fut le cas entre 1998 et 2003 ou encore entre 1960 et 1963, avec des milliers de casques bleus aux quatre coins du pays.

Kimp

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