Goma : les mineurs exploités en silence

Mercredi 2 septembre 2015 - 07:15

A Goma, capitale de la province du Nord-Kivu (Est de la RD Congo), le travail des enfants de moins de 16 ans, « transporteurs » de marchandises dans les magasins et marchés du quartier commercial à Birere, devient de plus en plus inquiétant.

Aucune initiative n’est en vue pour baisser la tendance, alors qu’à Goma il existe une dizaine d’ONG et association avec mission de la protection de l’enfance. Mais, tous restent impuissants face à ce phénomène.

C’est un fait réel qui se passe autour de tous : des milliers d’enfants âgés entre 8 à 16 ans sont employés occasionnellement par des particuliers pour transporter quantité de biens achetés dans les boutiques et marchés à Birere pour des sommes modiques.

A présent, personne n’est là pour défendre les droits de ces enfants vulnérables issus des familles pauvres qui n’arrivent même pas à les faire étudier. Conséquence : ces mineurs se jettent dans la débrouillardise avec tous les risques à l’affiche dont l’exploitation de masse en public même.

« Seuls les enfants victimes de guerre, catastrophe, viol… attirent les organisations car ça fait une excellente publicité aux bailleurs de fonds et le financement est certain, pour le cas des enfants souffrants par pauvreté ça attire moins les humanitaires», commente James Iléo, ancien travailleur dans une ONG internationale de la protection de l’enfance dans les conflits armés.

Des enfants battus…

Selon, Kitumaini, 13ans, ‘’transporteur’’ dans les dépôts à Birere, plusieurs fois ils sont victimes de coups et blessures, accusés par les Antigangs (sécurité privée) des présumés voleurs.

« Nous sommes ici pour travailler durement et non pour voler, si non pour quoi se faire souffrir pour la survie, alors qu’il ya un chemin facile ? » se demande t-il. Selon Steve Akonkwa, un Antigang du coin, « ces accusation sont fausses, à part notre mission de sécuriser les marchandises, c’est aussi d’attraper les suspects et les remettre à la police pour rendre justice aux victimes de vol et c’est tout » précise t-il.

Loi pour l’enfance encore loin

Toutefois, pour les instruments juridiques, seul le Code du travail et de la sécurité sociale prévoit et sécurise l’enfant, dans sa convention 105 concernant l’abolition du travail forcé, dans l’article 3.

« L’âge minimum d’admission à tout type d’emploi ou de travail qui, par sa nature ou les conditions dans lesquelles il s’exerce, est susceptible de compromettre la santé, la sécurité ou la moralité des adolescents ne devra pas être inférieur à dix-huit ans ».

Ce qui est tout à fait contraire dans notre cas présent, et cet outil juridique semble être ignoré pour faire valoir de droit au profit ces petits garçons encore mineurs, car ils ont moins de 18 ans comme prévu par la loi de la République démocratique du Congo. Seul le travail que peut faire les enfants sont de petits travaux, comme nettoyer, arranger les choses à la maison, balayer, etc.

« Moi, j’ai 15 ans, je pèse à peu près 40 kg et je transporte au maximum prés de 75 kg de marchandise » affirme le « transporteur » Prince Cashman habillé d’un pantalon réduit à une culotte, à la chevelure mal coiffée. Un signe du travail difficile pour les enfants.

Mais ils n’ont pas le choix, c’est leur unique chance. « Quand je viens ici à Birere pour les approvisionnements, je préfère faire travailler ces enfants pour le transport de mes biens car ils soufrent pour avoir à manger. Donc, je donne une chance à eux d’autant plus que leur main-d’œuvre coûte moins cher que celle des adultes », , dit Ombeni.

Exploitation voilée des enfants.

En réalité c’est une exploitation en silence et personne ne s’en souci de la mutation de cette pratique dans les prochaines années. Avec effets immédiats, ces enfants adolescents, ils n’étudient plus alors que la constitution prévoit les études gratuites pour l’école primaire, mais c’est une utopie.

En observant leur mine, on lit directement une mauvaise santé suite à un travail non proportionnel à l’âge, qui ne va pas non plus avec une bonne nutrition et le manque d’éducation de base voir la majorité d’eux,… pendant qu’à Goma il existe plusieurs organisations non gouvernementales et associations sans but lucratif, qui protègent les droits d’enfant, mais à présent aucune initiative concrète sur le terrain pour le cas de ces enfants ‘’transporteur’’ vue et utiliser par tout le monde.

Enfant, le financier de la famille

Plus grave encore certains de ces enfants sont la principale source de revenu dans leurs familles respectives à Goma.

C’est le cas Bionde : « Après mon travail tout mon argent je le verse à ma mère, et c’est elle qui assure les dépenses pour besoins de la famille, car je n’ai plus de père, et ma mère est sans travail ».

Jeune garçon de 16 ans, il gagne par jour au maximum 7 000 FC (environs 8 dollars), c’est toujours très insuffisant pour les besoins de sa famille.

Un autre à coté, qui a arrêté ses études en secondaire, Bahati explique : « Nous les enfants, on est exploités par les adultes, avec des modiques sommes pour un travail énorme, on doit doubler notre tarif ! ».

Bahati, s’il « gagne beaucoup par jour », c’est près de 5 000 FC (environs 5 dollars). L’Etat devrait défendre ces enfants, car l’article 42 de la Constitution de la RDC dispose que « les pouvoirs publics ont l'obligation de protéger la jeunesse contre toute atteinte à sa santé, à son éducation et à son développement intégral ».

Protéger, aussi un business !

Pour Mwenebatende Duphina Tabu, président de l’Association des volontaires du Congo, une association sans but lucratif qui prône les droits humains, les gens qui se jettent dans l’aventure de la création d’associations qui militent pour les droits des enfants, c’est comme s’ils sont en train de chercher leur moyen de survie.

« Ces enfants sont abandonnés à eux-mêmes. On ne sait pas quoi faire car il ya une violation grave de droits humains et ce n’est pas là seulement à Birere mais partout» , souligne t-il.

« C’est très inquiétant pour notre société avec des enfants pareils, qui affrontent la vie avant d’avoir les bases nécessaires, dont les études », explique Kalinda Bonané, père de 6 enfants, fait tout pour ne pas voir ses enfants dans la situation pareille. « Si les parents de ces enfants n’ont pas les moyens pour prendre leurs enfants en charge, c’est à l’Etat que revient cette tâche, conclut t-il.