La cacophonie est générale et semble s’installer au sein de la magistrature depuis le déclanchement de la grève, lancée lundi 3 novembre par une partie de ce corps. Selon certains syndicats et la haute hiérarchie de ce corps, ce mouvement de mécontentement social est né en dehors de structures officielles et connues suite à l’expression d’un ras-le-bol observé auprès de trois cent jeunes magistrats civils et militaires qui se plaignent de leurs mauvaises conditions de vie et de travail. C’est ainsi qu’ils réclament, dans la foulée, la mise en application du salaire équivalent en francs congolais à la somme de 1.600 dollars américains payables chaque mois pour le débutant et le moins gradé tel que promis par le Chef de l’Etat en septembre 2011 avec effet rétroactif. Entretemps, l’on se trouve en face d’un débrayage sérieux avec plusieurs cours et tribunaux de la capitale et à l’intérieur du pays qui n’ont pas
bien fonctionné depuis lors.
Plusieurs justiciables en attente de jugement à quelque niveau que ce soit n’ont eu droit qu’à de reports. Et comme le faisait remarquer l’ACAJ, dans son communiqué daté de ce même lundi, les personnes en détention préventive dont le terme devaient être régularisé ou qui devaient être remises en liberté ; les victimes des violences sexuelles et des abus familiaux ainsi que des enfants victimes de maltraitances qui attendaient voir leurs causes être examinées sont restés déçus du fait que les cours et tribunaux et les parquets de Kinshasa n’ont pas fonctionné.
Réactions mitigées
Cependant, au lieu d’unir, ce mouvement social semble de plus en plus diviser la haute hiérarchie, les syndicats et les grévistes sur la marche à suivre.
Dans le camp de ceux qui ne soutiennent pas ce mouvement, il s’agit tout simplement d’une rébellion et d’un désordre orchestré par cette frange en violation des procédures pour discréditer les magistrats aux yeux de l’opinion publique. Parmi les réactions allant dans ce sens, il y a le communiqué officiel du Conseil supérieur de la magistrature signé par son président, Jérôme Kitoko et publié dans les médias. Noir sur blanc, le communiqué indique ceci : « Le bureau du Conseil supérieur de la magistrature a suivi avec stupéfaction dans une certaine presse u communiqué faisant état d’une grève illimité prétendument déclenchée par les magistrats. Le bureau du Conseil de la magistrature informe l’opinion publique qu’aucun mouvement de grève n’a été déclenché à ce jour par un syndicat des magistrats, seule structure reconnue apte à canaliser certaines revendications des magistrats. Le bureau du Conseil
supérieur n’ayant pas été saisi à ce sujet, invite en conséquence tous les magistrats à continuer à vaquer librement à leurs activités et à ne pas céder à toutes manipulations. Une enquête est en cours pour identifier des magistrats qui, en marge de la loi et de l’éthique, ont par leur comportement troublé l’ordre public et empêché leurs collègues de certains offices et juridictions à accomplir leurs obligations professionnelles », dixit le communiqué.
Un autre son de cloche allant dans le même sens, Le Phare l’a obtenu du Syndicat des magistrats du Congo (Symco).
Contactés, les responsables de ce mouvement syndical ont rejeté en bloc ce mouvement qu’ils ont qualifié d’illégal car lancé en violation de toutes les procédures en la matière : préavis de grève jamais déposé, pas de négociation au préalable avec l’Etat employeur, etc. Pour eux, il n’y a eu mot d’ordre pour qu’il y ait grève dans la magistrature.
Par conséquent, ont-ils affirmé, si grève, il doit y avoir, il faut que celle-ci soit convoquée par l’un des quatre syndicats officiellement reconnus en direction de leurs affiliés qui auraient au préalable déposé un préavis à l’autorité compétente. Les responsables de ce syndicat ont même affirmé au quotidien de l’avenue Lukusa être à leurs offices en train de travailler normalement.
Cependant, une autre vision est venue du milieu proche du Syndicat national des magistrats (Synamag), qui sans avoir appelé à la grève suit avec attention ce qui se passe.
Pour un de ses membres, on ne peut pas ignorer un mouvement social, même né en dehors de voies traditionnelles car il a pour finalité de provoquer un dialogue social. Pour ce syndicat, ces jeunes choqués par leurs conditions de vie et sociale ont choisi de s’exprimer haut et fort afin que tout le monde entende leur cri sur ce malaise qui couve depuis 2011. Bref, pour le Synamag, en posant ce problème aujourd’hui, c’est une sorte de renouvellement des revendications qui tardent à trouver solutions.
VAN