Prof André Mbata : « Recomposition de la Cour constitutionnelle, purge au sein de l’appareil judiciaire et droit de regard sur la justice comme préalable à l’instauration d’un Etat de droit démocratique promis par Président Félix Tshisekedi»

Dimanche 7 juillet 2019 - 20:29
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7sur7

C’est tard dans la nuit de jeudi 4 à vendredi 5 juillet 2019 que la Cour constitutionnelle de la République Démocratique du Congo (RDC) a rendu son arrêt définitif dans le cadre du contentieux des élections législatives du 30 décembre 2018. Contacté pour commenter cet arrêt et d’autres arrêts rendus par la Cour,  le constitutionnaliste André Mbata Mangu, professeur de recherche au Collège de Droit de l’Université d’Afrique du Sud, professeur ordinaire à  la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa,  membre du Réseau africain de droit constitutionnel et expert de l’Union africaine en ce qui concerne l’Etat de droit et le constitutionnalisme a eu des mots on ne peut plus durs à  l’égard de la plus haute juridiction de la RDC accusée d’incompétence et même de corruption selon la clameur publique. Prof André Mbata en a profité pour exiger des sanctions contre les membres de cette « Cour de la honte », sa recomposition, le nettoyage en profondeur de l’appareil judiciaire congolais ainsi qu’un droit de regard présidentiel sur le Ministère de la justice afin que l’Etat de droit démocratique prôné par Président Félix Tshisekedi cesse d’être un simple slogan pour devenir une réalité sous sa présidence. L’universitaire répond ici à nos questions.

7 sur 7 : Vous êtes l’un de grands chantres de l’Etat de droit démocratique et du constitutionnalisme en Afrique, pensez-vous que l’Etat de droit a un sens pour le peuple congolais ?

Prof Mbata : Bien sûr, peut-être pour le peuple congolais plus que tout autre peuple en Afrique. L’Etat de droit figure trois fois dans la Constitution congolaise du 18 février 2006 une première fois dans l’Exposé des Motifs, une seconde fois dans le Préambule et une troisième fois dans le premier article de la Constitution. Si le premier nom ou le nom propre du pays est la RDC, son second nom  est l’« Etat de droit » ! En effet, l’article 1er de la Constitution  dispose que « la RDC est, dans ses frontières du 30 juin 1960, un Etat de droit ». Toutefois, l’Etat de droit peut aussi être un Etat de droit autoritaire ou dictatorial comme c’était le cas sous le régime d’apartheid en Afrique du Sud et sous le parti unique. L’éminent constitutionnaliste français Robert Badinter avait donc raison de souligner que le qualificatif était très important. L’on ne devrait donc pas lutter pour ni soutenir l’Etat de droit sans savoir de quel Etat il s’agit. Par contre, l’Etat de droit voulu par le peuple de la RDC est un Etat de droit démocratique.  L’Etat de droit démocratique est le fondement même de la République. 

7 sur 7 : Avez-vous l’impression que Président Felix Tshisekedi attache la même  importance à l’Etat de droit démocratique que « Nous, Peuple congolais »? 

Prof Mbata : Je n’en ai pas le moindre doute et c’est tout à son actif d’avoir compris qu’après plusieurs décennies de dictature, la « Nation puissante et prospère » (Préambule de la Constitution) ou le « Pays plus beau qu’avant » (Hymne national) dont le peuple congolais a toujours rêvé est un Etat de droit démocratique et c’est pour cette raison qu’il avait été préféré à tous les autres candidats et élu Président de la République. Pendant la campagne électorale et au cours de tous ses premiers discours présidentiels, Félix Tshisekedi a promis que l’instauration et la consolidation d’un Etat de droit démocratique serait la priorité des priorités de son mandat. Il a pris le même engagement envers la communauté internationale et les investisseurs qui conditionnent leur coopération et leurs investissements à l’instauration d’un tel Etat Qui dit Etat de droit démocratique présuppose l’existence d’un pouvoir judiciaire indépendant. 

7 sur 7 : Existe-t-il un rapport entre un Etat de droit démocratique et la lutte contre la corruption et d’autres antivaleurs d’une part et l’exigence d’un pouvoir judiciaire indépendant de l’autre?

Prof Mbata : Sans un Etat de droit démocratique, la lutte contre la corruption, l’impunité et d’autres antivaleurs ainsi que le déboulonnement du système autoritaire promis par Président Félix Tshisekedi resteraient des slogans aussi simples et cruels que la Révolution de la Modernité de l’ancien régime qui ne s’était jamais matérialisée. De même, l’on ne saurait parler d’un Etat de droit démocratique avec un pouvoir judiciaire soumis à un regroupement politique (Front commun pour le Congo, FCC), incompétent au propre comme au figuré et même corrompu ainsi que la Cour constitutionnelle vient d’en faire la démonstration dans le cadre du contentieux des élections législatives du 30 décembre 2018. 

7 sur 7 : Partout où il va, Président Félix Tshisekedi  qui a refusé tout culte envers sa personne est accueilli non pas par des cris de «Dja Lelo »,  « Raïs »  ou « Shikata », mais par « Kobosana te, Papa alobaki : le Peuple d’Abord » [N’oublie jamais, (ton) Papa (Etienne Tshisekedi) avait dit : le Peuple d’Abord].  Pensez-vous qu’une relation existe entre « le Peuple d’Abord », l’Etat de droit et la justice en RDC? 

Prof Mbata : Félix Tshisekedi n’est pas comparable aux dirigeants autoritaires et corrompus qui l’ont précédé à la tête du pays mais on devra l’aider à ce qu’il ne déçoive pas son peuple car, comme Montesquieu l’avait si bien noté,  « le pouvoir corrompt». L’Etat de droit démocratique, c’est l’Etat du Peuple d’Abord ». Dans un tel Etat, ainsi que l’article 149 de la Constitution l’affirme, « la justice est rendue au nom du peuple». Quand les Congolais chantent et demandent au Président Félix Tshisekedi de ne pas oublier et de penser au Peuple d’Abord, ils lui demandent avant tout de se pencher sur la justice qui seule élève une Nation mais doit encore trouver sa place au Congo! 

7 sur 7 : Le peuple était donc justifié à manifester devant le Palais de Justice et la Cour constitutionnelle ?  

Prof Mbata : Vous aurez remarqué que le contentieux de l’élection présidentielle n’avait pas donné lieu à la même indignation parce que le peuple avait massivement voté pour le changement incarné par Félix Tshisekedi qui avait été proclamé élu. Cependant, dans le cas du contentieux des élections législatives, comment auriez-vous voulu que le peuple se taise lorsque la justice qui est censée rendue en son nom et dans son intérêt ne l’est pas et qu’elle est par contre rendue par des magistrats véreux certes au nom du peuple, mais dans l’intérêt d’un regroupement politique et d’une coterie de politiciens rompus dans le business de la corruption? Le peuple a eu donc raison de manifester et de prendre d’assaut cette Bastille du Palais de Justice où se trouve la Cour constitutionnelle. Kinshasa, la capitale de la RDC, abrite les trois principaux Palais de la République : le Palais de la Nation, le Palais du Peuple et le Palais de Justice. Puisque l’article 149 de la Constitution dispose que la justice est rendue au nom du peuple, tous ces trois Palais n’ont qu’un seul propriétaire, le peuple. Le Président de la République, les Députés et Sénateurs qui siègent dans les deux chambres du Parlement ainsi que les magistrats et les membres de la Cour constitutionnelle devraient comprendre qu’ils ne sont que des locataires en vertu d’un contrat à durée déterminée avec le peuple souverain qui peut y mettre un terme et les chasser avec ou sans préavis !

7 sur 7 : Le même article 149 de la Constitution dispose que le pouvoir judiciaire est indépendant, que viendrait alors foutre Président Tshisekedi dans son fonctionnement ?

Prof Mbata: Les Etats modernes sont fondés sur le principe de séparation des pouvoirs qui avait été systématisé par Montesquieu dans son fameux ouvrage « L’Esprit des Lois », mais cette séparation n’est guère absolue. Le Président de la République trahirait son serment et faillirait à sa mission s’il restait indifférent face aux disfonctionnements de la justice et ce, pour plusieurs raisons. Premièrement, la justice est rendue au nom du peuple qui l’a élu. Il doit donc veiller à ce que cette justice soit « juste ». Deuxièmement, les arrêts et jugements des cours et tribunaux sont exécutés au nom du Président de la République. A ce titre, il ne peut pas accepter que des arrêts et jugements injustes soient exécutés en son nom. 
Troisièmement, il est le Chef de l'Etat. Il représente la Nation. Il assure par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions, y compris les institutions exerçant le pouvoir judiciaire, ainsi que la continuité de l’Etat. Quatrièmement, il nomme et révoque les magistrats ainsi que les membres de la Cour constitutionnelle.

7 sur 7 : Quel est votre avis sur les récents arrêts de la Cour constitutionnelle dans le cadre du contentieux des élections législatives qu’elle vient de clôturer ? 

Prof Mbata: A suivre les arrêts rendus par la Cour constitutionnelle congolaise que j’appelle la « Cour de la honte », on devrait avoir honte de se dire juriste, politologue, licencié en droit, docteur en droit, chercheur en droit, magistrat, ou professeur de droit au Congo. Cette Cour a fait honte à tout le peuple congolais et ses membres qui se sont totalement discrédités devraient eux-mêmes avoir honte de se présenter en cette qualité. Je ne vois même pas pourquoi le Président de la Cour et le Procureur général près cette Cour devraient bénéficier des avantages dus aux anciens chefs de corps. De tels avantages devraient logiquement leur être refusés. Il en est de même des indemnités de sortie qu’ils n’auraient pas mérités. 

7 sur 7 : Que reprochez-vous à ces arrêts ?

Prof Mbata : Ils étaient tout, sauf des arrêts de justice. Quand on viole délibérément la loi et surtout la Constitution de son pays, on est simplement un délinquant primaire. A travers leurs arrêts d’invalidation-revalidation-invalidation, les membres de la Cour constitutionnelle ont violé la loi et la Constitution en ce qui concerne notamment les délais et la motivation des arrêts. Au lieu de la durée maximale de deux mois que la loi électorale leur impose pour rendre leurs arrêts, ils se sont accordé près de cinq mois alors qu’aucune disposition légale n’autorisait un tel dérapage ou « glissement ». En outre, ces arrêts n’ont pas été clairement motivés. Jamais une Cour constitutionnelle africaine n'aura fait montre de tant de légèreté et même d’incompétence dans le traitement d’un contentieux électoral. L’on a également parlé de corruption mais le constitutionnaliste que je suis reconnaît le principe de présomption d’innocence. Plusieurs dignitaires de l’ancien régime et du FCC auraient « acheté » des sièges à coup de plusieurs dizaines, voire centaines de milliers de dollars américains, transformant ainsi le Palais de Justice en une « Cathédrale de corruption et d’injustice » où des messes noires auraient été officiées par les « Cardinaux de la Cour constitutionnelle ». En revenant sur certains de ses arrêts et en invalidant ou en validant sous le prétexte fallacieux de « correction d’erreurs matérielles » qui étaient en réalité des fautes disciplinaires ou des infractions punissables par la loi des députés qu’elle venait à peine de valider ou d’invalider, la Cour constitutionnelle a confirmé tout le mal que l’on disait de ses membres. 

7 sur 7 : Mais les arrêts de la Cour constitutionnelles ne sont susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires ? 

Prof Mbata : L’article 168 de la Constitution est clair à ce sujet. Toutefois, le constituant n’avait visé que les arrêts « justes » rendus conformément à la Constitution et aux lois de la République, des arrêts motivés, rendus dans le respect des délais légaux et des droits individuels ou collectifs. L’article 93 de la loi organique relative à son organisation et à son fonctionnement dispose que la Cour peut néanmoins revenir sur ses arrêts en cas d’interprétation ou de rectification d’erreur matérielle. 

7 sur 7 : Etes-vous d’avis que les membres de la Cour méritent une décoration?

Prof Mbata : Décoration pour mauvais et déloyaux services rendus à la Nation ? Vous feriez mieux de poser la question au peuple victime de la « trahison de (ces) clercs » car c’est en son nom que la justice est rendue. L’article 84 de la Constitution ne donne pas au Président de la République le pouvoir de conférer le grade de grands officiers dans un diabolique « Ordre des héros nationaux …de la corruption » qui heureusement n’existe pas et je vois mal comment les membres actuels de cette Cour constitutionnelle pourraient être décorés pour bons et loyaux services rendus à la Nation, même à titre posthume ! 

7 sur 7 : Que pensez-vous de l’attitude du Président Félix Tshisekedi face à la « délinquance » des membres de la Cour constitutionnelle?

Prof Mbata : Le Président de la République a été correct. Il n’a pas cherché à enfreindre l’indépendance du pouvoir judiciaire comme sous l’ancien régime lorsqu’un Directeur du Bureau du Président de la République dictait même les arrêts aux membres de la Cour. Toutefois, la Constitution lui interdit toute passivité ou indifférence. Il ne pouvait pas se taire pendant que le peuple qui l’a élu et qu’il représente se disait trahi par les membres de la Cour ou de ce que vous avez bien qualifié de « délinquance » judiciaire. Il a interpellé le président Benoit Lwamba pour exprimer toute l’indignation du peuple face à une Cour constitutionnelle hérétique qui n’avait pas prêché par l’exemple en statuant en violation de la Constitution et des lois de la République. J’étais estomaqué en apprenant qu’un Président de la République qui n’est pas juriste aurait passé près d’une heure à …enseigner les rudiments du droit constitutionnel et du droit électoral …au Président de la Cour constitutionnelle ! C’est suite à cette interpellation – et cette « séance de remise à niveau » - qu’une chambre spéciale avait été mise sur pied pour examiner les prétendues « erreurs matérielles ».

7 sur 7 : Pourquoi Félix Tshisekedi était-il intervenu alors que les Députés invalidés étaient majoritairement de l’Opposition LAMUKA qui ne le reconnaissent pas comme Président de la République?

Prof Mbata : Qui ne reconnaît pas Président Félix Tshisekedi autrement que dans les rêves? En tout cas pas les Evêques catholiques membres de la CENCO (Conférence épiscopale nationale du Congo) qui nous avaient rabattu les oreilles pendant plusieurs mois en psalmodiant ou en chantant leur cantique sur la « Vérité des urnes » qu’ils ont abandonnée dans leur fameuse « mission prophétique » alors que l’Eglise catholique qui ne respecte pas la démocratie en son sein – personne n’a jamais exigé la « Vérité des urnes » lors de l’élection d’un Pape et les Evêques ne sont pas élus ! – n’a vraiment pas de leçons à donner en cette matière ni en matière de bonne gouvernance et que les scandales récurrents dans les milieux religieux – régionalisme, tribalisme, favoritisme, gestion diocésaine opaque et autoritaire, affectation fantaisiste ou sentimentale des prêtres, des religieux et des religieuses, détournements des biens de l’Eglise à des fins personnelles ou au profit des membres de familles biologiques, non-respect des vœu de chasteté, de célibat ou de pauvreté …- attestent que de nombreux Princes de l’Eglise et leurs fidèles – heureusement pas tous - vivent eux-mêmes loin de la « Vérité » qu’ils voulaient uniquement retrouver dans les « urnes »! Le « Schéma de sortie de crise» qui avait été présenté par leur candidat malheureux à la présidence (Mr Martin Fayulu) et qui avait été approuvé par tous ses leaders a également démontré que le discours de LAMUKA (« Non à la machine à voter », « Vérité des urnes », « Félix Tshisekedi, Président ‘Pantin’, ‘Marionnette’ ou ‘Masque’ de Kabila»…) n’était qu’un discours obscurantiste, de la poudre jetée aux yeux d’un peuple que ses dirigeants entendaient manipuler à souhait pour accéder au pouvoir et se servir eux-mêmes comme plusieurs l’avaient fait quand ils étaient aux affaires. N’ont été surpris que ceux qui voulaient ou ont fait semblant de l’être. Ce fameux schéma de sortie prouve que tous les dirigeants de LAMUKA reconnaissent Félix Tshisekedi depuis longtemps et les différents « concerts sur la vérité des urnes » organisés à travers le pays et à l’étranger n’auront été qu’un monstrueux chantage pour des gens qui ont essayé de tromper le peuple alors qu’eux-mêmes cherchent à travailler avec Félix Tshisekedi et sous  son leadership comme Président  de la République! Il n’était dès lors pas étonnant que les Députés invalidés de LAMUKA sollicitent l’intervention du Président de la République. C’est ce qu’il a fait en interpellant le Président de la Cour constitutionnelle, démontrant ainsi qu’il était le président de tous les Congolais. L’attitude de ses Députés qui ont retrouvé leurs sièges à l’Assemblée nationale et des dirigeants de LAMUKA qui n’ont pas encore officiellement félicité le Président de la République pour son intervention en dit long sur la qualité de l’Opposition dans ce pays. 

7 sur 7 : Est-ce que l’arrêt définitif de la Cour constitutionnelle a clos le dossier ?

Prof Mbata : Non, des sanctions s’imposent contre les membres de la Cour en commençant par leur président. A mon avis, ils pouvaient même démissionner d’eux-mêmes comme l’avaient fait les professeurs Esambo et Banyaku. Autrement, ils devraient être poussés à la démission ou révoqués ainsi que le prévoit l’ordonnance no 17/070 du 22 août 2016 portant statut particulier des membres de la Cour constitutionnelle. Les neuf membres de la Cour ont été nommés trois sur initiative du Président de la République, trois sur l’initiative du Parlement et trois sur celle Conseil Supérieur de la Magistrature. Ces trois institutions devraient retirer leur confiance et leur demander de démissionner pour permettre la recomposition de la Cour en évitant des procès qui pourraient être intentés pour corruption.

7 sur 7 : Que dites-vous de la rumeur selon laquelle, dans le cadre du partage des responsabilités gouvernementales au sein de la coalition Cap pour le Changement (CACH)- FCC,  ce dernier regroupement exigerait les ministères de souveraineté, y compris  celui de la justice? 

Prof Mbata : Plusieurs sources concordantes le confirment. Au moment où le FCC retarde la formation du gouvernement et va jusqu’à revendiquer des ministères dits de souveraineté dont la nomination des titulaires relevait de la discrétion de Joseph Kabila, son Autorité morale, lorsqu’il était encore à la tête du pays, il est bon de rappeler au Président Félix Tshisekedi qu’il n’y a aucun ministère qui mérite plus le statut de « Ministère de souveraineté » que le Ministère de la Justice parce que la Constitution que « Nous, Peuple congolais » avions massivement adoptée par référendum des 18 et 19 décembre 2005 et qui avait été promulguée le 18 février 2006  précise que la souveraineté nationale appartient au peuple (Article 5) qui a l’élu comme Président de la République (Articles 70 & 71) pour représenter la Nation (Article 69) et la justice est rendue au nom du peuple souverain (Article 149)! Dans ces conditions, aucun marchandage ne saurait être permis même dans le cadre des accords de partage des pouvoirs. Pour un Président de la République qui a promis à son peuple et au monde entier de lutter pour l’instauration d’un Etat de droit démocratique, déboulonner le système autoritaire, améliorer le climat des affaires, protéger les droits humains et lutter contre la corruption qui gangrène la société, contre l’impunité et d’autres antivaleurs qui n’ont pas permis à la RDC de jouer le rôle de premier plan qui lui revient dans le concert des Nations d’Afrique et du monde, renoncer aux ministères de souveraineté en général et en particulier au Ministère de la Justice reviendrait à se suicider politiquement en se tirant une balle dans la tête, pas dans le dos. 

7 sur 7 : Votre dernier mot ?

Prof Mbata : Ainsi que je l’avais dit, l’irréparable avait déjà été commis. Comment une Cour constitutionnelle pouvait-elle invalider un Député élu avec plus de 20 000 voix au profit d’une candidate qui n’en avait obtenu que quelques centaines même si le premier devait être rétabli dans son siège après rectification d’une prétendue « erreur matérielle » ? Comment un candidat validé à la suite d’une rectification d’erreur matérielle pouvait-il être radié au stylo dans l’arrêt définitif rendu seulement un jour après ? Les « Kuluna » portent aussi des cravates et même des toges et méritent des sanctions exemplaires! Au niveau de la Cour constitutionnelle et dans l’ensemble de l’appareil judiciaire, il nous faut des hommes intègres, incorruptibles, respectueux de la Constitution et des lois et d’une moralité irréprochable si nous voulons bâtir un Etat de droit démocratique et une Nation prospère au cœur de l’Afrique. Tout le monde, juriste ou détenteur d’un diplôme des sciences sociales ou philosophiques ne peut pas être nommé membre de la Cour constitutionnelle. Il est certain que la Cour constitutionnelle actuelle n’est pas composée des magistrats les plus compétents et les plus vertueux de la République, mais de ceux qui ont su faire allégeance à l’ancienne Majorité présidentielle et qui ont été désignés sans tenir compte des critères de compétence, de probité ni de moralité. 
Le peuple de la RDC serait mieux servi si certains membres de la Cour constitutionnelle qui ont appris les principes du règlement du contentieux constitutionnel sur le tas, après qu’ils aient commencé à siéger, pouvaient être renvoyés aux études, bénéficier des séminaires de renforcement de capacité ou accepter de (re)prendre leur retraite pour permettre la recomposition de la Cour surtout que le tirage au sort qui devait permettre la nomination des trois nouveaux membres de la Cour n’avait pas été organisé, en violation de la Constitution. La justice est si importante pour le peuple congolais qu’elle ne saurait être laissée aux mains des personnes incompétentes, immorales ou à moralité douteuse. Dans le cadre de la démocratie participative envisagée par la Constitution, même si les critères de nomination devaient rester les mêmes, la sélection des membres de la Cour constitutionnelle devrait se faire de façon transparente et rigoureuse afin que seuls les plus méritants soient retenus. Le Président de la République qui détient le pouvoir de les nommer (Article 158) devrait y veiller.

Propos recueillis par Alphonse Muderhwa