RDC : La prise de parole publique de JM Kabund contre François Beya est "irresponsable" et "inopportune" [Tribune]

Mercredi 3 mars 2021 - 21:13
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Les faits

Lors d'une réunion des responsables de la sécurité de la RDC et du Rwanda le samedi 13 février 2021 à Kigali, le conseillé spécial du chef de l'État en matière de sécurité avait prôné le bilatéralisme entre ces deux États.  

"Nous sommes venus ici pour défier le monde entier, en particulier l’occident, qui ne veut pas que nous parlons et travaillons ensemble. Nous sommes ici pour dire que nous sommes unis et que nous n’avons jamais de conflits entre nous", avait déclaré François Beya. 

Sa déclaration, sortie de son contexte, est exploitée honteusement par certaines personnalités se réclamant proches de la famille politique du chef de l'État. 
Parmi les réactions à la déclaration de François Beya qui ont fait échos, il y a celle du président a.i de l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) et 1er vice-président de l'Assemblée nationale.
Jean-Marc Kabund-À-Kabund, faisant preuve d'une maladresse inouïe, avait rejeté, via les réseaux sociaux, les propos de François Beya.

"L'UDPS considère les propos de CS BEYA au Rwanda de grave et les rejette avec force. Ces propos qui exposent le pays ne reflètent pas la vision du chef de l'Etat qui prône le multilatéralisme comme mode de règlement des conflits mondiaux et demande à ce dernier de s'assumer", avait-il écrit ce mardi 23 février 2021 sur son compte Twitter.

Décryptage

Irresponsable et inopportune. Il n'y a pas d'autres adjectifs pour qualifier la prise de parole publique, via les réseaux sociaux, du président a.i de l'UDPS contre le conseiller spécial en matière de sécurité du président de la République. 
Ces propos de Kabund sont irresponsables car le Conseiller spécial n'était que le missi dominci du président de la République. Désavouer publiquement le messager, comme l'a fait Kabund, revient à s'attaquer au Chef de l'État lui-même. 

Plus grave, Kabund n'a pas pris le soin de contextualiser les propos du conseiller spécial lors de cette réunion de sécurité à Kigali. Que lui aurait-il coûté de se rapprocher du messager pour dissiper tout malentendu ? À la place, il est allé fanfaronné sur les réseaux sociaux.

La prise de parole de Kabund interroge aussi sur son timing. Pourquoi 10 jours après ? Alors que le monde est choqué par l'attaque meurtrière dans le parc Virunga qui a coûté la vie à l'ambassadeur d'Italie, c'est le moment choisi par Kabund pour jeter l'émoi dans l'opinion.

Il est curieux de voir que le président de l'UDPS cherche à déstabiliser un proche collaborateur du chef de l'État. François Beya ne nourrit aucune animosité ou inimitié envers les occidentaux, comme on veut le faire croire en sortant son message du contexte. Le bilatéralisme n'est pas à opposer au multilatéralisme. Au contraire, les deux visions se complètent.

En sa qualité de 1er vice-président de l'Assemblée nationale, Kabund doit tourner sa langue 7 fois. Il doit privilégier des canaux appropriés pour exprimer un point de vue, au lieu d'exposer les institutions de la République comme il l'a fait. La prise de parole publique exige de hauteur, de la retenue, de la réflexion et de la modération. S'abstenir si l'on n'en est dépourvu. Et la République et ses institutions s'en porteront mieux.

Basile Kasereka