« Guerre économique contre la RDC » : L'Ouganda trempé dans des trafics illicites du cacao à Beni

Mercredi 21 septembre 2022 - 13:36
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Photo : Glody Murhabazi

C’est depuis 2014 que la région de Beni située au nord de la province du Nord-Kivu, dans l’Est de la République démocratique du Congo connait des massacres sans précédent. Une guerre qui, en réalité, date de plus de deux décennies et a déchiré des milliers de familles et un nombre important de villages reste inhabité.

Les pays voisins dont le Rwanda et l’Ouganda sont souvent accusés d’entretenir des rebellions dans les forêts de l’Est du Congo et ces dernières années, des pistes d’une guerre économiques ne font que se renforcer.

Reportage

Le soleil se couche à peine sur Mutwanga, une agglomération riveraine du Parc National des Virunga. Dans des milliers d'hectares de champs situés dans les vallées de la forêt équatoriale de la région de Beni au nord de la province du Nord-Kivu, cohabitent différents groupes armés locaux et étrangers. Une nature verte à couper le souffle, mais polluée par des activités illégales.

La rébellion d’origine ougandaise des Forces démocratiques alliées est la plus redoutable car accusée de plusieurs meurtres, viols, incendies, kidnappings et toute sorte de crimes, dont certains sont revendiqués depuis un certain temps par le groupe Etat islamique.

Pourtant, au milieu de cette terreur, l’industrie tente de se développer, grâce aux initiatives locales soutenues et financées par le Parc National des Virunga.

Parmi ces industries, la production du café, du savon, de l’huile de palme ou encore du cacao, une matière première à la base de toutes les convoitises. Pour le parc des Virunga, la République démocratique du Congo fait face à une guerre économique dans la région de Beni, et dont l’Ouganda est le premier bénéficiaire.

« Ce qui se passe c’est que les ADF qui sont un groupe étranger, ils viennent de l’Ouganda et ont des liens en Ouganda, ils s’approprient de façon violente le cacao en tuant les membres des communautés pour établir un régime de terreur, ce qui leur permet de voler le cacao et de le faire passer en fraude en Ouganda où le cacao congolais est revendu comme du cacao ougandais », a déclaré Emmanuel Demerode, interviewé par 7SUR7.CD le 08 septembre dernier à Mutwanga.

D’après lui, le cacao grandit très vite au Congo, ce qui fait de la RDC, un des trois grands producteurs du Cacao au monde. « Chaque année le production du cacao au Congo double. C’est qui est énorme ! Et donc, dans quelques années le Congo pourrait se retrouver comme le plus grand producteur du Cacao au monde. Et évidemment quand un secteur grandit si vite, c’est difficile à organiser et ça crée des opportunités pour les groupes armés de s’acquérir de ce produit qui est de haute valeur », tempête Emmanuel Demerode.

Une situation qui place le Congo dans une situation délicate. Demerode voudrait que les Congolais profitent des richesses de leur pays.

« Le Congo est fort pénalisé par rapport à la valeur de ses propres ressources. Le Congo produit l’un des meilleurs cacaos du monde, mais la transformation, et par conséquent toute la valeur ajoutée se ressent dans des pays voisins. Et très peu de cette valeur est retenue pour les Congolais. C’est une situation inacceptable qu’on doit arriver à retourner », poursuit-il.

Le 30 novembre 2021, l’armée ougandaise a été déployée sur le sol congolais dans le cadre de l’opération Shujaa. L’UPDF est censée mener des opérations aux côtés des Forces Armées de la République démocratique du Congo ou encore de la MONUSCO dans la traque des ADF.

Cependant, pas mal d’observateurs y voyaient une manœuvre pour l’Ouganda de protéger des intérêts économiques qu’il détient en RDC. Alors, le commandant des forces ougandaises avait tenu à balayer ces suspicions le 17 décembre 2021, soit quelques semaines après le déploiement des ougandais.

«  Nous ne sommes pas venus chercher les minerais au Congo. Nous sommes venus combattre l'ADF afin que la RDC et l'Ouganda fassent des échanges commerciaux ensemble », avait fait savoir le général-major, Kayanza Muhanga.

Ces opérations sont régulièrement prolongées chaque deux mois, mais les ADF continuent de semer la terreur dans la communauté. Ces rebelles auteurs de plusieurs crimes se sont maintenant positionnés dans l’Ituri, avec des branches qui demeurent actifs dans le Nord-Kivu.

Glody Murhabazi, de retour de Beni