Une étude menée par l'école de criminologie de l'Université de Kinshasa (UNIKIN) révèle que suite à la réforme de la Police nationale congolaise (PNC), les policiers des provinces de l'Ituri, du Kasaï et de l'Équateur ont noté une amélioration progressive de leurs relations avec les populations civiles.
Cette recherche, présentée ce lundi 8 avril 2024 à Kinshasa lors du lancement des ateliers d'évaluation à mi-parcours du plan d'action quinquennal de la réforme de la PNC pour la période 2020-2023, souligne que 66% des policiers estiment que ces relations se sont améliorées et sont de bonne qualité, tandis que 34% pensent le contraire.
Il en est de même pour les relations entre policiers de même rang : 75% des enquêtés déclarent positif l'impact de la réforme sur ces relations horizontales entre policiers. En effet, pour 61% d'entre eux, l'impact de la réforme est bon ; pour 12%, il est très bon et pour 2%, c'est excellent. Toutefois, en ce qui concerne les relations entre le policier et ses supérieurs hiérarchiques, les avis des répondants sont partagés : 53% des policiers interrogés jugent ces relations positives, contre 46% qui les jugent négatives.
Concernant les conditions de travail, les policiers interrogés ont indiqué que l'impact de la réforme de la police est négatif dans les domaines des infrastructures, des équipements, des fournitures de bureaux, des moyens de communication et de déplacement. Ainsi, en ce qui concerne l'évaluation des conditions de travail des policiers, 78% des policiers interrogés sont d'avis que leurs conditions de travail ne sont pas du tout bonnes : 10% des policiers ont déclaré que leurs conditions de travail sont nulles, 37% des policiers ont déclaré que leurs conditions de travail sont très mauvaises et 31% mauvaises. Quant à l'impact de la réforme sur les conditions de travail, 78% des policiers interrogés estiment que l'impact est négatif : 13% ont déclaré que l'impact est nul, pour 35% l'impact est très mauvais et pour 30% l'impact est simplement mauvais.
S'agissant des conditions de vie, l'impact est également négatif en ce qui concerne la rémunération, le logement et l'accès aux soins de santé. En effet, près de 95% des policiers interrogés estiment que leurs conditions de vie ne sont pas satisfaisantes : elles sont nulles pour 15%, très mauvaises pour 46,51% et mauvaises pour 33,33% des enquêtés. Quant à l'impact de la réforme sur leurs conditions de vie, 93% des policiers interrogés évaluent négativement l'impact de la réforme sur leurs conditions de vie : pour 20,7% d'entre eux cet impact est nul, pour 42,05% il est très mauvais et pour 29,65% l'impact est simplement mauvais.
D'autres réalités révélées par cette étude montrent que la participation des parlementaires au processus de la réforme est mitigée et que la réforme est perçue comme un processus essoufflé en raison de la faible implication des autorités.
Un autre élément à prendre en compte est que l'avancement en grades est considéré comme bénéfique aux officiers au détriment des policiers subalternes (86 % des policiers interrogés estiment que les policiers subalternes n'ont pas bénéficié d'un avancement en grades depuis 2006, contre 14 % qui pensent qu'ils en ont bénéficié). Un autre fait à souligner est que la place de la femme au sein de la PNC est contrastée (54,07 % des policiers interrogés affirment que la femme occupe une bonne place dans la police et 55,81 % estiment que la femme est bien traitée au sein de cette institution). Ces chiffres contrastent avec le point de vue des femmes policières elles-mêmes si l'on prend en considération leurs réponses. Ainsi, elles sont 67,5 % à déclarer que la femme n'a pas une bonne place au sein de la police et 70 % des femmes policières interrogées déclarent ne pas être bien traitées au sein de la police.
Les recommandations formulées pour renverser ces tendances incluent notamment la nécessité de renforcer l'engagement du gouvernement et du parlement pour la réforme de la PNC, l'intégration des matières relatives à la police dans les programmes d'enseignement, le renforcement du management du commissaire général de la PNC, le renforcement du rôle et de la mission de l'inspection générale de la police, une plus grande implication de la population et de la société civile dans le processus de réforme, etc.
Le gouvernement réitère son engagement à booster la réforme de la PNC
Au nom du gouvernement, le vice-ministre de l'Intérieur a réaffirmé l'engagement à œuvrer ensemble avec les partenaires et la société civile pour accélérer la mise en œuvre de la réforme de la Police nationale à travers les projets mis en œuvre.
Fatoumata Sira Diallo, la représentante et cheffe d’équipe du DCAF (centre de gouvernance du secteur de sécurité) en RDC, a invité les parties prenantes à tenir compte des résultats de cette étude dans leurs actions, réflexions, initiatives et dans leurs futures décisions concernant la réforme de la Police et également dans le cadre plus large de la gouvernance du secteur de la sécurité et de la justice en RDC.
Il est à noter que cette enquête a été commanditée par le programme d'appui à la réforme de la police (PARP). Au total, 516 questionnaires ont été administrés à des policiers, dont 80 femmes policières (soit 16 %) et 436 policiers (soit 84 %).
Merveil Molo