C’est de ce jugement attendu ce lundi par tous les Congolais que dépend désormais la libération ou non du leader du MLC
Sauf changement de dernières minutes, c’est ce lundi 21 mars, aux environs de 14 heures, heure de Kinshasa et de Bangui que les juges de la Cour Pénale Internationale (CPI) prononceront le verdict dans le procès Jean-Pierre Bemba Gombo. Le leader du MLC est accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité perpétrés en 2002 et 2003 en République Centrafricaine.
Ce verdict sera donc suivi avec une attention particulière à Kinshasa comme à Bangui. Et c’est pour la première fois dans l’histoire de la CPI que les juges décideront si l’accusé est pénalement responsable en tant que commandant militaire pour des crimes commis par ses troupes agissant sous son contrôle.
» Le prononcé du verdict dans le procès contre Jean-Pierre Bemba est un moment historique pour les victimes des crimes odieux perpétrés en République Centrafricaine et qui auront attendu 14 longues années pour que justice soit rendue « , ont déclaré les organisations centrafricaines membres de la Fédération internationale des ligues des Droits de l’homme (FIDH).
Au total, 5 229 victimes ont eu le droit de participer au procès. Il s’agit là du nombre le plus élevé de victimes participantes dans un procès devant la CPI.
Depuis 2003, la FIDH et ses organisations membres en République Centrafricaine, la Ligue Centrafricaine des Droits de l’homme (LCDH) et l’OCODFAD, ont régulièrement transmis des communications au Bureau du Procureur de la CPI sur les crimes commis en RCA, insistant sur la gravité de ces crimes et sur l’absence de volonté et de capacité de l’Etat à enquêter sur ces crimes et à poursuivre leurs auteurs.
L’incapacité du système judiciaire centrafricain à poursuivre ces crimes avait été confirmée par la Cour de Cassation centrafricaine qui, dans son arrêt du 16 avril 2006, avait conclu à la seule compétence de la CPI pour juger ces crimes. Dans la procédure devant la CPI, les éléments de preuve soumis par la FIDH ont joué un rôle déterminant, comme l’a reconnu aussi le Bureau du Procureur.
En plein mois de la femme
» Ce procès a revêtu une importance cruciale car il porte en particulier sur des crimes de violence sexuelle. Il est indéniable qu’il a permis une prise de conscience de l’effet destructeur du recours systématique aux violences sexuelles comme arme de guerre, à l’encontre des femmes comme sur des hommes et a ainsi contribué à briser le silence et la stigmatisation des victimes de viols » ont souligné la LCDH et l’OCODFAD.
Si Bemba est jugé coupable, la Chambre de première instance déterminera ensuite la peine applicable et se prononcera sur les réparations dues aux victimes, telles que la restitution, l’indemnisation et la réadaptation. Une fois le jugement prononcé, le Bureau du Procureur et les avocats de la défense disposeront d’un délai de 30 jours pour faire appel.
Contexte
L’enquête de la CPI en RCA a été ouverte le 22 mai 2007, après que l’Etat centrafricain ait saisi le Procureur de la CPI en 2004. En 2002, le président en exercice de Centrafrique avait demandé au groupe armé dirigé par Jean-Pierre Bemba, Mouvement de Libération du Congo (MLC) en République Démocratique du Congo d’intervenir en République Centrafricaine pour mater une tentative de coup d’état.
Les hommes de Bemba sont accusés d’avoir perpétré les pires atrocités contre les civils, ayant recours aux viols et meurtres systématiques sur la période allant de 2002 à 2003.
Trois chefs d’accusation pour crimes de guerre ont été retenus contre Jean-Pierre Bemba (meurtre, viol et pillage), ainsi que deux chefs d’accusation pour crimes contre l’humanité (meurtre et viol), alors qu’il occupait un poste de commandement militaire.
Les crimes dont il est accusé ont été perpétrés durant le conflit armé qui s’est déroulé entre 2002 et 2003 en République Centrafricaine, alors que le MLC soutenait les forces armées du Président de l’époque, Ange-Félix Patassé, contre une tentative de coup d’état menée par François Bozizé, alors chef d’Etat-Major centrafricain.
Bemba a été arrêté en Belgique le 24 mai 2008, puis transféré à La Haye, au centre de détention de la CPI le 3 juillet 2008. Le procès contre Jean-Pierre Bemba s’est ouvert le 22 novembre 2010 et les plaidoiries finales se sont achevées en novembre 2014.
En mai 2014, la Présidente de République Centrafricaine a saisi à nouveau la CPI pour enquêter et poursuivre les responsables des crimes alors perpétrés dans le pays par les milices Seleka et anti-Balakas. Le Bureau du Procureur a ainsi ouvert une deuxième enquête en RCA le 24 septembre 2014. Aucun mandat d’arrêt n’a pour l’instant été émis.
Par Godé Kalonji