Une fois encore, c’est un conservateur des titres immobiliers, en l’occurrence celui de Lukunga, qui aura maladroitement boutiqué –c’est le mot qu’il faut- l’affaire. Voilà qu’Afriland First Bank se retrouve traînée en justice, devant le tribunal de commerce de Gombe, -ça n’est jamais bon pour l’image de marque d’une banque- par la société Cybernet. Dont le cogérant, M. Kalamba Mwavita exige l’annulation de la vente, effectuée par la banque, de son immeuble, sis Uvira n° 72, dans les environs du Grand Hôtel Kinshasa, dans la Gombe BCBG.
La compagnie Générale Immobilière du Congo (CGIC), nouvelle acquéreuse du dit immeuble se retrouve prise en tenailles. C’est depuis le 17 février que le tribunal de commerce a pris en délibéré cette affaire enregistrée sous le Rce 3979 au terme des plaidoiries qui auront étalé sur la place publique l’incurie, la prévarication sinon le système subreptice des titres immobiliers.
Selon le conseil de Cybernet ( KalambaMwavita), son client sollicite l’annulation de la vente de l’immeuble précité, explique que le 26 janvier 2010, la société Cybernet dont Kalamba et son épouse sont gérants, a sollicité un prêt de 850.000 USD à la défenderesse, Afriland First Bank. Elle a ainsi hypothéqué l’immeuble du fils de ses gérants. La Banque ayant constaté que la société était en difficulté, a saisi le Tribunal pour obtenir l’autorisation de vendre l’immeuble. Alors qu’à son tour, Cybernet avait saisi la justice pour un prolongement du délai de payement de cette somme. Aussi la partie Kalamba a-t-elle été surprise de constater que Afriland avait obtenu une ordonnance pour une vente par voie parée. C’est ainsi que l’immeuble a été vendu. L’article 10 sur la loi parée stipule qu’avant de procéder à la vente, il faut inviter toutes les parties et après la vente le Procès verbal devra être signé par les différentes parties. Le Conservateur des Titres Immobiliers n’a pas invité Cybernet pour prendre connaissance du cahier de charges, il n’a non plus signé ce fameux PV, a déploré le conseil de Kalamba. Pour qui cette vente s’est effectuée en violation de la loi.
Pour sa part, Afriland First Bank par son conseil fait savoir que dans l’exercice de ses activités, Cybernet a contacté sa cliente par l’entremise de son gérant, Kalamba Patricia, pour un crédit de 850.000 USD. Et Kalamba Mwavita Joys est venu pour la caution. La convention de prêt signée par les deux parties a été légalisée par le notaire. L’immeuble dont on veut annulation de la vente, a été expertisé par l’entreprise Immoaf et sa valeur s’élevait à 1.014.000 USD. Le délai dépassé, cybernet n’offrant aucun payement, Afriland a lancé un commandement légal signifié à Kalamba. Lorsque ce commandement est arrivé, Cybernet a commencé ses manœuvres. Elle a obtenu une ordonnance de mesure de suspension des poursuites le 10 octobre 2013. Puisqu’il y avait suspension de poursuites à l’égard de Cybernet, nous nous sommes référés à l‘article 8 de l’acte uniforme, ce dernier nous a donné la possibilité de demander une vente par voie parée. L’ordonnance a été signée le 17 octobre 2013 puis régulièrement notifiée à Kalamba et au Conservateur des Titres Immobiliers. En exécution de l’ordonnance, le CTI a établi un cahier de charges et invité M. Kalamba Joys en respectant les 8 jours francs, on ne pouvait plus faire appel à Cybernet parce qu’elle avait obtenu une ordonnance qui la mettait hors des poursuites, a précisé l’avocat. Malheureusement, Kalamba Mwavita n’est pas venu consulter le cahier de charges. Le 7 Décembre 2013, le conservateur des Titres Immobiliers a procédé à la vente publique. Le 12 Décembre 2013, KalambaMwanvita Joys a été notifié, il avait même signé. La loi donne un délai pour faire des réclamations, il y a eu un silence de sa part, pas de contestation, a martelé l’avocat. Le 31 Décembre 2013, Afriland First Bank va obtenir un acte de non opposition. C’est en ce moment que Kalamba va écrire au CTI pour contester. En droit, l’ordonnance relative à la voie parée stipule que la vente devra être précédée d’un commandement, et c’est ce qu’a fait Afriland. Cybernet a été signifié au commandement et KalambaMwavita a signé pour la caution. Cette action est irrecevable pour défaut de qualité, tardiveté et forclusion de délai. Il n’a jamais réagi et vient après plusieurs mois pour contester. Voilà une famille qui prend 850.000 USD des épargnants pour créer une société, après deux ans ils n’ont rien payé, et demande annulation du prêt, que dire de cette somme ? s’est interrogé l’avocat d’Afriland Bank. Tous les actes de procédures par voie parée leur ont été notifiés. L’action de Kalamba ayant été initiée avec beaucoup de légèreté, l’avocat d’Afriland Bank a sollicité du Tribunal qu’il condamne Kalamba au payement de 500.000 USD à titre de DI, pour procès téméraire et vexatoire.
La compagnie Générale Immobilière du Congo (CGIC), actuel propriétaire de l’immeuble, a soutenu par son conseil qu’elle subit une injustice de la part du demandeur, KalambaMwavita Joys. Si on peut bien acheter dans ce pays et avec assurance, c’est lorsque l’Etat vend en bonne et due forme. Il y a des récalcitrants qui s’opposent à l’Etat pendant que nous avons acquis régulièrement cet immeuble par voie parée, a-t-il indiqué. En droit, il y a forclusion de délai selon l’article 20 de la loi de la vente par voie parée. Que le Tribunal dise cette action irrecevable pour forclusion de délai et non fondée parce que la vente a été conforme à la loi, a-t-il conclu.
Le conseil du Conservateur des Titres Immobiliers a pour sa part soutenu qu’il a eu à poser des actes mais, s’est rendu compte d’une irrégularité intervenue en amont. Le CTI avait reçu une ordonnance du Tribunal pour procéder à la vente par voie parée. Il a alors établi un cahier de charges en oubliant la partie principale. Le demandeur est alors venu réclamer. Pour le Conservateur, la requête de Kalamba devra être déclarée partiellement fondée, compte tenu de l’article 10 de la loi sur la vente par voie parée qui stipule qu’on doit inviter toutes les parties. Kalamba n’a pas été invité pour prendre connaissance du cahier de charges, mais la vente a eu lieu, a soutenu l’avocat. Quant au fond, cette affaire devra être déclaré irrecevable, a-t-il ajouté.
Dans sa réplique, la partie KalambaMwavita Joys a fait savoir qu’il y a une vérité importante qui demeure, l’article 10 de l’ordonnance loi de 1976 a été violé, on n’a pas invité la débitrice et ils ont choisi la caution hypothécaire, ceci appelle à annuler la vente, a objecté le conseil.
Afriland First Bank reviendra également pour soutenir que tout a été fait régulièrement, son client a communiqué le commandement qui leur a été notifié, puis ils ont obtenu un jugement de suspension de poursuites individuelles. Cet acte explique clairement que les poursuites sont suspendues à l’égard de Cybernet, on poursuit maintenant la caution, lorsque le débiteur est incapable de payer. La caution est cet acte qui renseigne que comme Cybernet est incapable de payer, on devra notifier KalambaMwavita. Le Conservateur n’a pas laissé passer une irrégularité, comme il le soutient, comment devait-il inviter une partie qui est mise hors cause, écartée.
La Compagnie Générale Immobilière au Congo dans sa réplique a fait savoir que le CTI veut que l’action soit partiellement fondée, parce qu’elle n’a pas invité Kalamba. Soit il y a irrégularité, si cette hypothèse tient debout, donc la vente est annulée. Le Conservateur devait tout simplement dire que l’action soit totalement fondée, a exprimé le conseil de la CGIC. On ne pouvait plus inviter Cybernet parce qu’il y avait une suspension de poursuites individuelles à son égard, quant à Kalamba, le même Conservateur l’avait notifié par une lettre, a-t-il conclu.
L’officier du ministère public, organe de la loi, a demandé que le dossier lui soit communiqué pour rendre son avis par écrit.
R.B