Dialogue : Djinnit hanté par le syndrome du Burundi

Mercredi 9 décembre 2015 - 09:54

Pris au départ pour le médiateur tant attendu désigné par le Secrétaire général des Nations Unies en vue de piloter le Dialogue national en République Démocratique du Congo, Saïd Djinnit, son Envoyé Spécial dans les Grands Lacs, s’est révélé finalement comme un fonctionnaire chargé de déblayer simplement le terrain. Arrivé à Kinshasa le mercredi 2 décembre 2015, il est reparti en fin de semaine, avec une moisson que nombre d’observateurs estiment insuffisante.

L’Opposition contre un Dialogue « version Kabila »

A dire vrai, ce que les Congolais attendaient de l’Envoyé spécial de Ban Ki-Moon dans la capitale congolaise, ce n’était pas d’amener les kabilistes » au Dialogue, ceux-ci .y ayant déjà adhéré sans condition, dès l’entame des consultations initiées par leur « Autorité morale» en juin 2015, mais de rallier l’Opposition, dans toutes ses sensibilités, à l’idée d’une table ronde nationale en vue de débloquer le processus électoral en panne voici plusieurs mois.

Après le passage de Saïd Djinnit à Kinshasa, le « camp du refus » systématique du Dialogue, perçu comme le piège imaginé par la majorité au pouvoir pour ne pas organiser les élections dans les délais constitutionnels, a continué de camper sur sa position. En effet, l’UNC de Vital Kamerhe, le MLC de Jean-Pierre Bemba, l’Ecide de Martin Fayulu ainsi que le G7 (Unafec de Gabriel Kyungu, Unadef de Charles Mwando, ARC d’Olivier Kamitatu, PDG de José Endundo, MSDD de Christophe Lutundula et ACO de Danny Banza) ont réitéré leur exigence de la tenue urgente de la tripartite Majorité-Opposition-Ceni pour élaborer un calendrier électoral consensuel et amener le peuple congolais aux urnes avant la fin de « l’année électorale » 2016.

Quant à l’UDPS, favorable au Dialogue mais foncièrement acquise à la thèse de la médiation internationale, elle a fait savoir à Saïd Djinnit, qui a dû improviser une escale à’ Bruxelles, sur les terres provisoires d’Etienne Tshisekedi, qu’elle ne serait partie prenante que si ce forum était convoqué par un médiateur de Ban Ki-Moon et que si celui-ci était doté de pleins pouvoirs, de l’ouverture à sa clôture. Ce parti pilote de l’Opposition a exigé comme garanties d’un Dialogue inclusif sa convocation par un « plénipotentiaire» du Secrétaire général de l’Onu, ainsi que la fixation par ce dernier du lieu de sa tenue, sa durée, son format (nombre de participants), de son ordre du jour, sa clôture, etc.

L’on se demande, dans plusieurs milieux politiques, s’il a réellement atteint l’objectif, à savoir convaincre les « poids lourds » de la scène politique congolaise de participer au Dialogue. Du coup, le syndrome de son échec dans la crise politique du Burundi voisin est en train de revenir à la surface. Beaucoup pensent que celui qui n’a pu réconcilier la classe politique burundaise ne serait pas l’homme du puzzle congolais. En tout cas, il n’est pas arrivé à casser le mur de la méfiance entre Kabila et son Opposition.

D’ailleurs, dès l’annonce de sa présence à Kinshasa, en milieu de semaine dernière, l’homme de la rue en RDC doutait de la capacité de Saïd Djinnit de réussir dans un environnement politico-social vicié par la psychose du « glissement », c’est-à- dire la volonté de la majorité au pouvoir de bloquer la tenue des élections, notamment présidentielle et législatives nationales prévues le 27 novembre 2016 et d’obtenir la prolongation du mandat de l’actuel Chef de l’Etat au-delà de cette échéance.

Le statu quo…

Au vu des positions exprimées par les différentes «composantes» de l’Opposition, l’impression qui se dégage de la mission de Saïd Djinnit à Kinshasa, est que le statu quo persiste En clair, le flou persiste quant à la tenue même du Dialogue. L’on ne sait pas, à ce stade, si l’on se trouve dans le schéma de Joseph Kabila, qui ne cesse d’insister sur la non ingérence étrangère dans les affaires internes congolaises, ou dans celui des Nations Unies, dont le médiateur n’est toujours pas désigné. En tous les cas, les choses sont loin de bouger du côté du Chef de l’Etat congolais, dont le Comité préparatoire, auquel il était imparti dix jours, à compter du 30 novembre 2015, pour apprêter les documents de travail, n’est toujours pas mis en place. Bref, la fin de l’année 2015 risque de surprendre les Congolais sans la moindre élection, ni le moindre soupçon de Dialogue. Le pire est-il est à venir ? Nul ne le sait.

Par KIMP

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