Dialogue : Samy Badibanga entrevoit une transition !

Mardi 2 février 2016 - 05:47
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Le Président du Groupe parlementaire UDPS et Alliés, Samy Badibanga, estime que, techniquement, 14 mois seront nécessaires pour réviser, comme il se doit, le fichier électoral. Pourtant, il ne reste que 36 semaines, dans le délai constitutionnel, pour enrôler les nouveaux majeurs et refondre le fichier électoral. Première personnalité politique à avoir mis le terme ‘‘glissement’’ dans la bouche des Congolais, Samy Badibanga fait savoir qu’une transition devient incontournable. Parce que, dans 13 mois, on sera déjà au-delà du délai constitutionnel. Surtout que l’on ne sait pas le jour où la CENI va débuter ses opérations de révision du fichier électoral. Tout retard enregistré dans ces opérations se répercutera sur la suite du processus. Puisque le décor d’une transition est planté, le dialogue est plus qu’une nécessité, déclare Samy Badibanga. L’idée du dialogue, il l’a développée depuis plus de deux ans. Pour lui, vaut mieux dialoguer avant des échauffourées. Mais, le dialogue que soutient Samy Badibanga ne doit plus être circonscrit aux seules questions électorales. Ce serait le lieu indiqué pour définir les contours de la transition. Un dialogue où chaque institution de la République ferait sa part de travail. Il n’est pas pour un forum où l’on inviterait des gens qui n’ont aucune qualité. Le dialogue, selon Samy Badibanga, se ferait ainsi dans le cadre constitutionnel et institutionnel. Mais, il est convaincu que le pouvoir a intentionnellement refusé d’organiser les élections.

La CENI sous les feux

En effet, on constate que la CENI devient le centre d’impact visuel avec la révision du fichier électoral comme point de fixation. Selon des fuites, la CENI entend mener l’opération de révision du fichier électoral pendant 13 mois au minimum. Les choses bougent en RDC depuis que le Comité de Partenariat a planché, en fin de semaine dernière, sur la problématique du financement du processus électoral. Le Comité de Partenariat est composé du Gouvernement de la RDC, la Représentation onusienne, les Ambassadeurs et Chefs des Missions diplomatiques accrédités en RDC, le PNUD, ainsi que la CENI. A cette occasion, le Gouvernement, pour la première fois, a pris l’engagement de financer la révision du fichier électoral. Ce faisant, le Gouvernement s’engage à lever les obstacles juridiques qui empêchent le déblocage du processus électoral. A la session parlementaire de mars prochain, deux lois seront modifiées. La loi portant identification et enrôlement des électeurs, ainsi que la loi électorale. Le but étant d’inscrire les Congolais de l’étranger sur les listes électorales. Lisez, ci-après, l’interview de Samy Badibanga à Jeune Afrique.

Pourquoi refuser  le dialogue proposé par le gouvernement ?

Nous voulons le dialogue, mais à certaines conditions : le pouvoir doit au préalable s’engager à respecter la Constitution, en ce qui concerne notamment la durée et le nombre des mandats. Nous souhaitons également que soit nommé  un médiateur neutre, qui superviserait le processus. Or ce n’est pas ce que le pouvoir propose.

La nomination par l’Union africaine d’Edem Kodjo au poste de facilitateur ne vous satisfait donc pas ?

Ce n’est pas une question de personne, mais de méthode. Pourquoi l’UA a-t-elle pris cette initiative plutôt que s’inscrire dans la dynamique existante ? Les Nations Unies avaient déjà entamé des consultations pour la mise en place d’un dialogue auquel Etienne Tshisekedi acceptait de participer.

Cela aurait permis d’inclure des partenaires, tels que les Etats-Unis et l’Union européenne. Alors pourquoi l’UA a-t-elle débuté un nouveau processus ? Et pourquoi ne dit-elle rien quant au respect de la Constitution et du calendrier des élections ?

Est-il encore possible d’organiser la présidentielle dans les limites constitutionnelles, c’est-à-dire avant le mois de décembre ?

C’est à la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) de le dire, mais à mon humble avis, ce n’est plus possible. Il ne nous reste que trente-six semaines pour intégrer sur les listes les électeurs qui viennent d’atteindre la majorité, pour réviser complètement le fichier électoral et ensuite le publier. Et lorsque la Ceni se sera prononcée, nous devront établir des responsabilités. N’avions-nous pas, nous, parlementaires, voté des budgets à la Ceni qui ne lui ont pas été attribués ? Je pense que le pouvoir a intentionnellement refusé d’organiser les élections.

Etienne Tshisekedi, le Chef de l’UDPS, avait accepté un « prédialogue » avant de se rétracté. Ses atermoiements ne sont-ils pas l’une des raisons du retard qui a été pris ?

Le respect des textes et l’Etat de droit ont toujours été sa boussole. Il ne reviendra jamais là-dessus, et c’est heureux. Mais il est vrai que l’UDPS a été,  sinon  dupée, du moins occupée par ce « prédialogue » qui n’a fait que retarder les choses.

La position de l’UDPS n’est pas claire non plus sur la question du Front citoyen 2016. Le fils d’Etienne Tshisekedi, Félix, a signé la déclaration qui créait cette coalition avec d’autres leaders de la société civile et de l’opposition, mais pas le parti. Pourquoi ?

Félix Tshisekedi ne pouvait pas aller plus loin sans en référer aux instances du parti. Les discussions se poursuivent en son sein. D’ailleurs, à ce jour, l’éventualité d’une adhésion n’a pas été rejetée.

Etienne et Félix Tshisekedi sont-ils sur la même ligne ? On a parfois le sentiment que le parti bloque les initiatives de Félix…

Ils ont les mêmes objectifs, mais des méthodes différentes. Félix a peut-être plus d’ambition et de volonté d’avancer, quand Etienne Tshisekedi  a pour lui l’expérience et le recul.

En décembre, vous et Félix Tshisekedi avez rencontré Moïse  Katumbi, l’ancien gouverneur du Katanga, à Paris. L’Udps envisage-t-elle  une candidature unique ?

Moïse Katumbi fait aujourd’hui partie de l’opposition. Nous sommes d’accord avec lui sur le respect de la Constitution et sur l’alternance en 2016, et c’est cette bataille-là qu’il nous faut d’abord rempoter. Il est trop tôt pour parler de candidature. Nous risquons de tout perdre à nous diviser.

Cela étant, je crois que le temps d’un leadership individuel est révolu : la situation appelle au rassemblement. Avec une élection présidentielle à un seul tour, un accord doit être trouvé en amont.

Une interview réalisée par Jeune Afrique