Signée par environ 200 organisations, la pétition remise hier au Conseil des droits de l’homme de l’ONU réclame la publication de la liste tenue secrète des 617 personnes soupçonnées d’avoir commis des viols et des atteintes aux droits de l’homme en RD Congo entre 1993 et 2003. Elle réclame aussi la création d’un tribunal spécial pour juger les crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis dans ce pays.
Le réparateur des femmes, le gynécologue congolais, Dénis Mukwege, vient de donner une note particulière à « la Journée internationale de la Femme » 2016 en présentant au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, hier mardi à Genève, une pétition signée par près de 200 organisations, en marge de la fête de la femme célébrée le 08 mars de chaque année.
A en croire les précisions données hier à l’AFP par le Belge Thierry Michel, coréalisateur du documentaire » L’homme qui répare les femmes « ,la pétition présentée par Dr Dénis Mukwege réclame notamment que le Conseil aux droits de l’homme de l’ONU publie la liste (tenue jusqu’ici secrète) des 617 personnes soupçonnées d’avoir commis des viols et des atteintes aux droits de l’homme en République Démocratique du Congo entre 1993 et 2003.
La pétition appelle également l’ONU à soutenir la création d’un tribunal spécial réunissant des juges et des procureurs internationaux pour juger les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis en RDC, et que des échantillons d’ADN soient systématiquement prélevés dans les affaires de viols.
La raison de la démarche entreprise par le docteur Dénis Mukwege est expliquée par le réalisateur belge Thierry Michel; « quand l’Etat ne prend pas ses responsabilités, la communauté internationale doit le faire ». Le docteur congolais comme le réalisateur belge ont fustigé, à cet effet, l’irresponsabilité de l’Etat congolais qui a montré ses limites face à la situation dramatique de viols dans l’Est du pays.
Contenu de la pétition
La pétition, réclamant la fin d’impunité pour les responsables de viols et abus sexuels en RD Congo, s’intitule « Non à l’impunité ». Elle veut notamment que le Conseil des droits de l’Homme publie la liste jusqu’ici secrète de 617 personnes soupçonnées d’avoir commis des viols et des atteintes aux droits de l’Homme en RD Congo entre 1993 et 2003.
Aussi, le docteur Mukwege appelle l’ONU à soutenir la création d’un « tribunal spécial réunissant des juges et des procureurs internationaux pour juger les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité commis dans l’Est de la RD Congo ».
Il demande également que des échantillons d’ADN soient systématiquement prélevés dans les affaires de viol. « Cela aiderait vraiment à savoir qui est derrière tous ces viols », précise le docteur congolais dans une interview accordée aux médias à la veille de la présentation de cette pétition à Genève.
Pour rappel, c’est depuis 1999 que le docteur Mukwege travaille pour reconstruire physiquement et psychologiquement environs 40.000 femmes victimes de viols accompagnées de violences sauvages commises à grande échelle dans l’Est du pays dans son hôpital de Panzi à Bukavu, chef-lieu de la province du Sud Kivu. Cela surtout pendant la deuxième guerre de la RD Congo (1998-2003) et au cours des différents conflits armés qui se succèdent dans cette région de la RD Congo.
Le gynécologue congolais âgé de 61 ans a toujours dénoncé le fait que les viols soient devenus une arme de guerre dans son pays.
Il a reçu en 2014 le prix « Sakharov » des droits de l’Homme décerné par le Parlement européen. Pour l’heure, le nombre de victime de viols a diminué ,avec la baisse des combats et passe de 10 par jour il y a quelques jours années à un peu moins de 7 viols par jour, a-il-précisé.
Le gynécologue reste cependant très inquiet du nombre de patientes qui viennent désormais des secteurs hors de la zone de conflit, alors que les violences touchent un nombre grandissant d’enfants, même des bébés.
A ce sujet, une étude portant sur plusieurs années relève que plusieurs milliers d’enfants de l’Est de la RD Congo ont été violés, et 200 avaient moins de 5 ans, selon le docteur Mukwege.
Le prix « Sakharov » 2014 est aussi inquiet du nombre d’anciens enfants soldats, forcés par les groupes armés à commettre des actes de sauvagerie et qui ont été intégrés dans l’armée régulière sans bénéficier de soutien psychologique.
Par Lucien Kazadi T.