Fin de mandat en RDC : nouvel appel des USA

Mercredi 8 juillet 2015 - 12:26

Après avoir abondamment communiqué ces deux dernières années sur le respect de la Constitution en ce qui concerne le nombre de mandats présidentiels en RDCongo ainsi que la tenue des élections présidentielle et législatives nationales, Washington semblait avoir transporté son intérêt sur d’autres scènes politiques africaines, notamment burundaise et rwandaise. En effet, ici se précisent, au jour le jour, des velléités de prolongation des mandats des Chefs d’Etat en fonctions, contre la volonté du constituant et du souverain primaire. En plus, le gel de la nomination du successeur de Russ Feingold au poste de Représentant spécial des USA dans les Grands Lacs était de nature à pousser les observateurs à croire que l’administration américaine était en train de relâcher l’étreinte sur les décideurs politiques congolais.
Comme pour rappeler aux uns et aux autres que le cycle électoral de 2015-2016 en RDC tenait particulièrement à cœur le pays de l’Oncle Sam, l’ambassadeur américain à Kinshasa a mis à profit la célébration du 239me anniversaire de leur indépendance nationale pour lancer un nouveau signal fort en direction de la classe politique congolaise en général et des animateurs des institutions de la République en particulier. Il a notamment souligné que l’Etat de droit a pris corps aux USA, dès les premières années de leur naissance comme République, grâce au sens de l’intérêt collectif et du bien commun manifesté par les premiers gouvernants. Il a fallu l’émergence d’une génération de vrais patriotes pour promouvoir la démocratie, la bonne gouvernance, la justice, le progrès socio-économique, etc.
Passation pacifique du pouvoir
Sans pour autant vouloir s’ingérer dans les affaires intérieures congolaises, l’Ambassadeur Swan a exhorté les différents camps politiques qui se battent pour la conservation du pouvoir pour les uns et sa conquête pour les autres, à suivre l’exemple des USA, dans les premières années de leur vie politique. Pour ce, il leur faut se faire violence pour dégager un consensus autour du calendrier électoral, du sort à réserver aux nouveaux majeurs, du financement des élections et de leur sécurisation. On note, dans son chef, le souci de voir les « frères ennemis » de la classe politique congolaise se faire violence pour favoriser l’organisation d’élections libres, démocratiques, transparentes et apaisées.
Il a émis le souhait de voir la RDCongo se signaler en bien au monde entier en jetant les bases, d’une passation pacifique du pouvoir entre un Chef de l’Etat sortant et son successeur. Bien qu’il ne l’ait pas dit ouvertement, l’on a compris, à demi-mot, que Washington voudrait voir le Chef de l’Etat actuellement en poste, qui a épuisé ses mandats, ne pas chercher à rempiler pour un troisième ou à se maintenir au pouvoir pour une durée indéterminée.
L’observation n’est pas fortuite car les Congolais peuvent constater, en revisitant leur histoire, qu’il n’y a jamais eu de remise-reprise entre Chefs d’Etat dans les annales nationales. On rappelle, à ce propos, que Joseph Désiré Mobutu avait chassé Joseph Kasa-Vubu du pouvoir par un coup d’Etat, le 24 novembre 1965. A son tour, il avait dû fuir le pays le vendredi 16 mai 1997, avant la chute de Kinshasa, laissant le pouvoir dans la rue, à la portée de Laurent-Désiré Kabila, qui le ramassait le 17 mai, après l’entrée triomphale de ses « Kadogo », encadrés par une mosaïque d’armées étrangères, dans la capitale.
Quant au « Libérateur » Mzee Laurent Désiré Kabila, son mandat à durée non déterminée était écourté par son assassinat le 16 janvier 2001, ce qui consacrait le « transfert » de la fonction présidentielle à son fils, Joseph Kabila. Le cursus politique de ce dernier indique qu’il va se trouver fin mandat le 20 décembre 2016, après avoir dirigé le pays de 2001 à 2003 dans un environnement de balkanisation de fait, puis partagé l’espace présidentiel avec Jean-Pierre Bemba, Azarias Ruberwa, Yerodia Abdoulaye Ndombasi et Arthur Z’Ahidi Ngoma de 2003 à 2006, sous fameux « Régime 1+4 », avant d’assumer, de 2006 à 2011 un mandat obtenu à partir des urnes, puis un deuxième (2011-2016), qui ne devrait pas être renouvelé, selon les prescrits de la Constitution.
L’exemple de George Washington
A propos de l’exercice du pouvoir au sommet de l’Etat, l’ambassadeur Swan a cité en exemple George Washington, le premier président de son pays après la proclamation de son indépendance. Il a rappelé aux Congolais que ce pionnier de la démocratie avait volontairement mis fin à sa carrière politique après deux mandats présidentiels, alors que sa population concourrait à une prolongation, d’autant que la Constitution ne prévoyait pas, à l’époque, la clause de la limitation des mandats.
Le non-dit de ce message est que la démocratie congolaise et le grand Congo gagneraient beaucoup si, le 20 décembre 2016, Joseph Kabila marquait les esprits en procédant, comme espéré par des millions de ses compatriotes, à la passation en douceur du pouvoir à son successeur, à sortir des urnes le 27 novembre 2016. La classe politique congolaise, notamment la Majorité et l’Opposition, sont ainsi appelées à relever le défi de leur ancrage progressif dans l’univers de la démocratie.
Kimp