Le Premier ministre congolais, Augustin Matata Ponyo Mapon, est formel. L’Allemagne peut user de son leadership européen voire mondial pour aider le continent africain à émerger. Matata Ponyo l’a dit hier jeudi 11 septembre à la tribune du Forum Allemagne-Afrique, axé sur l’économie et le développement, organisé à Berlin.
« Le continent africain a besoin des partenaires comme l’Allemagne pour l’accompagner sur le chemin d’un développement intégral », a déclaré le Premier ministre Matata Ponyo. Pour le chef l’Exécutif congolais, « le développement socio-économique de l’Afrique est aujourd’hui, pour les Africains, un défi majeur à relever, parce qu’il constitue le levier idéal pour hisser les pays africains dans le club des économies émergentes ».
Matata Ponyo est convaincu qu’usant de son leadership européen et mondial, « l’Allemagne est en mesure d’accompagner le continent africain dans son effort d’émergence. » Une coopération axée sur le progrès technologique, le développement humain, la bonne gouvernance et la paix, insiste le Premier ministre congolais, permettra à l’Afrique d’accroitre sensiblement sa productivité et offrir sur le marché international des produits et services à valeur ajoutée élevée. Une telle transformation structurelle des économies africaines aura pour effet immédiat l’augmentation du revenu des ménages qui constituera à son tour un marché porteur pour l’économie allemande. Ainsi, l’aide de l’Allemagne aujourd’hui créera les conditions d’une croissance soutenue pour l’économie allemande de demain.
Pour Matata Ponyo, « les ressources naturelles de l’Afrique et le dynamisme de sa population combinés au savoir-faire allemand est susceptible de produire des miracles sous forme de développement durable ». Le chef du Gouvernement congolais fait remarquer cependant que ce partenariat, pour être mutuellement bénéfique, « doit se fonder sur la responsabilité et le respect mutuels. »
Former des jeunes africains, a souligné Matata Ponyo, est le meilleur moyen d’accompagner l’Afrique vers son émergence. Mais il nuance tout de même. C’est une condition nécessaire mais pas suffisante parce que, explique Matata, des jeunes mieux formés dans une économie peu industrialisée risquent de constituer une bombe à retardement pour des « printemps arabes généralisés » dans l’ensemble du continent.
« Il nous faut donc créer de la valeur ajoutée, en construisant des industries dans les domaines clé comme l’agriculture, secteur à forte intensité de main d’œuvre pour espérer absorber une masse importante de la population active. Transformons nos minerais sur place, en Afrique, avec la collaboration d’un pays à forte technologie comme l’Allemagne et nous allons anticiper les conflits armés en Afrique et nous éviterons le pire », plaide Matata.
Selon le Premier ministre congolais, cette stratégie a un triple avantage : celui de permettre une accélération du processus de démocratisation notamment grâce à une population plus alphabète, d’augmenter la qualité de la santé de la population avec des moyens financiers plus importants et d’assurer une meilleure alimentation par une production agricole non plus de subsistance mais désormais de précision, plus abondante et de qualité. A l’instar du concept de parc agro-industriel que la RDC est entrain d’expérimenter actuellement.
L’acquisition de nouvelles technologies ainsi que l’expansion de leur application pour la création de nouveaux produits à haute valeur ajoutée constituent le chemin par excellence pour garantir une croissance économique soutenue et partagée en vue de la réduction de la pauvreté dont souffre la majorité des ménages africains.
Le chef du Gouvernement congolais a profité de sa tribune, pour témoigner la reconnaissance des Africains à l’Allemagne de par l’appui que le pays de Merkel apporte aux populations à travers divers programmes. Notamment l’agence de coopération technique allemande pour le développement (GTZ), dont les projets sont exécutés dans plusieurs pays africains, surtout dans la préservation de l’environnement, et la KFW qui est active dans le secteur de l’Approvisionnement en Eau Potable et Assainissement (AEP&A). Matata Ponyo a aussi mentionné les multiples interventions de la fondation Konrad Adenauer en Afrique.
Le chef de l’Exécutif congolais a également rappelé que l’Afrique a surtout besoin de la paix pour se développer comme l’Europe en a eu besoin pendant les trente glorieuses vers les années 1945 et 1975.
Grâce à une période d’accalmie et d’entente mutuelle, elle a construit sa richesse d’aujourd’hui. « Je suis donc content de constater que l’Allemagne s’inscrit dans cette lignée car, la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement, une bonne gouvernance, un développement économique qui soit écologiquement et socialement durable ainsi que des structures de coopération économiques et politiques équitables constituent des objectifs centraux de la politique allemande en Afrique », dit-il.
Matata Ponyo a son idée sur la question de la prévention des conflits. A côté de l’idée importante d’éviter qu’après la crise soit égale avant la crise, le chef de l’Exécutif congolais estime « que nous devrions beaucoup réfléchir à comment mettre en place des mécanismes pour prévenir la survenance de ces conflits plutôt que de les gérer. La RDC mon pays, a une amère expérience des guerres qui, suite à près de 20 ans d’insécurité, a consacré en moyenne 2% de son PIB annuel pour lutter contre les agressions et les rebellions. Ces dépenses militaires ont été un effet néfaste considérable sur les investissements productifs et dans les secteurs sociaux. La question est, pour moi, comment persuader les dirigeants des pays belliqueux à ne pas générer la guerre mais plutôt à générer la prospérité. »
Pour construire un ensemble plus grand que la somme des parties, le Premier ministre congolais partage l’idée d’explorer la proposition allemande de construire l’union africaine de demain à partir des pôles sous-régionaux de croissance devant servir de locomotive afin de booster le développement de l’Afrique. Ce modèle a porté des fruits sous d’autres continents. Une question demeure cependant. « L’Afrique du Nord, de l’Ouest, Centrale, de l’Est et Australe peuvent-elles se choisir des locomotives naturelles pour assurer cette convergence des économies africaines ? » se demande Matata Ponyo.
Le chef du Gouvernement congoalis plaide pour le renforcement des liens de coopération de l’Allemagne avec l’Afrique dans les domaines des sciences et des technologies, de l’éducation sous toutes ses composantes, des petites et moyennes entreprises, de la gestion durable de l’environnement, de la démocratie, de l’agriculture, de la bonne gouvernance, de la paix et de la sécurité.
L’Allemagne peut donc assister les pays africains dans le processus d’acquisition de nouvelles technologies qui passe nécessairement par un investissement massif dans la création et la diffusion des connaissances dans tous les domaines. Compte tenu des externalités qui accompagnent ce processus, l’Allemagne peut soutenir les institutions engagées dans le processus de découverte des nouvelles technologies et innovations afin de soutenir le développement d’un entreprenariat véritablement africain.
Matata Ponyo Mapon a profité de cette tribune pour rappeler que son pays est aujourd’hui une locomotive ou un acteur-clé pour la relance définitive de l’Afrique.
En 2002, sous le leadership du Président Kabila, souligne-t-il, la RDC a renoué avec la croissance. « Cela fait 4 ans que cette croissance se maintient autour d’une moyenne de 7%. A fin 2013, il était de 8,5% ; soit le taux de croissance le plus élevé en RDC depuis 1970, et selon les projections du FMI, elle se situera aux environs de 9% en 2014 » a-t-il précisé.
L’économie congolaise est actuellement caractérisée par un cadre macroéconomique stable, une inflation totalement maîtrisée et faible, et une stabilité totale du franc congolais par rapport aux devises étrangères, a martelé l’homme à la cravate rouge.
A son auditoire, le Preministre congolais a indiqué que le taux d’inflation de la RDC se situait à près de 10.000% en 1993-1994, aujourd’hui 1,4% projeté en 2014 contre 1% en 2013. Un record dans l’histoire de l’économie congolaise. Le taux de change moyen est demeuré stable autour de 920 Francs Congolais le dollar américain durant les quatre dernières années.
La présence de Matata Ponyo à Berlin est une preuve supplémentaire que la vision du Chef de l’Etat, Joseph Kabila, se concrétise au fil des jours. La RDC avance dans la bonne direction. Didier KEBONGO