Après les incidents de dimanche soir à Kinshasa entre policiers et jeunes gens qui n’acceptaient pas d’être évacués des places publiques, au motif qu’ils tenaient à fêter ainsi la victoire des Léopards sur le Mali (3-0) et leur second trophée du Chan (Championnat d’Afrique des Nations réservé aux joueurs amateurs évoluant sur le continent), rendez-vous était pris hier lundi 08 février 2016 pour l’accueil triomphal des héros. Bien que la journée n’ait pas été décrétée fériée, en dépit de fortes rumeurs ayant couru dans ce sens la veille au soir, des milliers de personnes, tous âges, sexes et catégories sociales confondus, ont convergé vers l’aéroport international de N’Djili à partir de 9 heures, pendant que d’autres se massaient le long des boulevards Lumumba, Sendwe et Triomphal, retenus parmi les artères que devrait emprunter le cortège des champions d’Afrique.
Au fur et à mesure que l’on se rapprochait de midi, le boulevard Lumumba était pris d’assaut par des meutes de jeunes-gens drapés dans des habits aux couleurs nationales et soufflant à tue-tête dans des instruments à vent. Les places fortes du parcours telles que Mikondo, Kingasani/Terminus, Masina et Kingasani/Pascal, Marché de la Liberté, Entrée Kimbuta, N’Djili quartier 1, Debonhomme, Pont Matete étaient envahies par une marée humaine qui ne faisait que réduire l’espace de circulation réservé aux automobilistes. L’impressionnant dispositif policier déployé pour la circonstance, avec des éléments portant des boucliers et des véhicules anti-émeutes, était sérieusement débordé.
A partir de 13 heures, tout le monde retenait son souffle, dans l’attente anxieuse du passage du capitaine Joël Kimwaki et ses coéquipiers. Les noms du double buteur de la finale, Meshack Elia, de Bolingi, l’autre buteur du jour, du gardien Matampi, de Héritier Luvumbu, le héros malheureux sur béquilles, de Lomalisa, Bangala, de l’entraîneur Ibenge, étaient sur toutes les lèvres. Les trois buts de la finale étaient commentés à loisirs, chacun y mettant son sel et son piment.
La déception
Le public qui avait eu le privilège de se trouver à la sortie principale de l’aéroport internationale de N’Djili, était le premier à être déçu de constater qu’en lieu et place des caravanes motorisées préparées par plusieurs firmes de la place, c’est l’escorte policière qui s’est mise à convoyer, à une cadence endiablée, le bus dans lequel étaient placés les joueurs. A l’allure où elle passait, il était difficile de reconnaître les stars qui venaient d’écraser le Mali le dimanche 7 février au stade Amahoro de Kigali. Le trophée ramené à Kinshasa était pratiquement invisible.
Les populations des quartiers Badara, Mikondo, Kingasani/Terminus, Masina/Siforco, Masina/Q.3, Pascal, Marché de la Liberté, N’Djili Q.1, Masina/Abattoir, Limete Denhomme, Limete 14me, 12me, 10me, 7me, 3me et 1ère Rues, 20 mai, Matonge, Lingwala ont assisté, interdites, au safari de l’escorte policière à travers Kinshasa, laissant un goût de cendres sur les lèvres des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants qui avaient sacrifié leurs occupations habituelles dans l’espoir de communier avec les poulains de l’entraîneur Ibenge.
De nombreux enfants sont restés des heures durant aux bords des routes, croyant que le convoi des Léopards n’était pas encore passé. L’on se demande si Kimwaki et ses copains ont apprécié un accueil qui a ressemblé à une course-poursuite entre eux et un ennemi invisible. S’il est vrai que des dérapages étaient à craindre, la police aurait pu au moins imprimer à l’escorte des Léopards un rythme qui puisse permettre à la foule d’admirer ses champions. Bref, la grande fête sportive que s’attendait à vivre Kinshasa hier était totalement manquée à cause d’une police trop zélée mais aussi des marginaux sans foi ni loi qui peuplent la capitale.
L’une des leçons à tirer de cette situation est que l’on déclenche une réelle lutte contre le chômage pour réduire sensiblement le nombre de jeunes garçons et filles qui comptent sur le moindre mouvement de foule pour piller ou casser.
Kimp