Les pygmées, les mal aimés de milice Bakata Katanga

Mercredi 1 octobre 2014 - 09:42

La milice Bakata Katanga continue de faire voir de toutes les couleurs aux pygmées des localités  environnant Kabalo-Centre dans la province du Katanga, à plus ou moins 1 000 km au Nord-est de Lubumbashi. Au mois de juillet dernier, huit cents personnes, hommes, femmes et enfants appartenant tous à la communauté pygmée, ont fui les attaques de cette milice bantou.

« Nous sommes poursuivis par des bantous. Armés de lances et de flèches, ils incendient nos cases et menacent de nous exterminer », a raconté, en larmes, Ilemba, un jeune pygmée d’une trentaine d’années, renseigne Infobascongo.net.

Depuis qu’ils sont à Kabalo-Centre, ces pygmées ont vécu dans une école de la générosité de quelques églises et organisations caritatives. « Chaque dimanche, nous organisons une collecte spéciale à l’église afin de leur venir en aide », affirme Sébastien Mutwale, responsable d’une église du réveil au chef-lieu du territoire. Mais ce que les églises et les autres organisations donnent aux pygmées déplacés était loin de satisfaire leurs besoins. Comme l’a reconnu Benjamin Mulezi, point focal du Réseau des populations autochtones et locales pour la gestion des écosystèmes, « tous sont dépourvus du minimum vital et leurs conditions d’existence sont de plus en plus précaires ».

Vieilles rivalités 

Bantous et pygmées s’affrontent régulièrement au Nord-Katanga malgré plusieurs efforts de réconciliation. Coordonnateur de la Voix des minorités indigènes, Georges Mbuyu souligne que les derniers affrontements de juin qui ont fait 10 morts selon l’ONG et deux selon le ministère provincial de l’Intérieur, sont survenus deux semaines seulement après le pacte de paix signé à Manono par les deux parties.

« Quand les pygmées estiment qu’ils sont exploités par des bantou, parfois, ils se révoltent. Et les bantou ne supportent pas leur révolte. Ce qui donne lieu à des heurts, mortels pour la plupart », fait savoir Mulezi. Mais d’autres sources révèlent que certains chefs de villages font tout pour empêcher les pygmées de vivre en communauté de 300, 200, voire 100 individus. Ces chefs utilisent les jeunes de leurs villages regroupés au sein de ce qu’ils appellent communément Forces d’auto-défense populaires pour disperser les pygmées, estimant que, s’ils sont unis, ils constituent une menace.

Briser le cycle de l’’impunité

« Il faut réunir les notables bantou et pygmées du Nord Katanga pour mettre en place ensemble des mécanismes qui favorisent une cohabitation pacifique entre les deux communautés », estime le ministre provincial de l’Intérieur, Juvénal Kitungwa. Après sa mission dans cette partie de la province, il s’est dit inquiet de voir les deux parties ne pas respecter le pacte de paix qu’elles ont signé dans le territoire de Manono début juin.

La proposition du ministre Kitungwa de réunir pour la énième fois ces deux communautés autour d’une table ne rassure pas les défenseurs des droits de l’homme, surtout ceux qui défendent les droits des minorités. Porte-parole de l’ONG Défense des minorités congolaises, Esdras Tshilembi a estimé que, tant que le cycle de l’impunité ne sera pas brisé, c’est peine perdue. « Il faut repérer les commanditaires des attaques contre la communauté pygmée et les transférer devant les instances judiciaires », préconise-t-il. Car « on peut signer mille pactes de non-agression, mais dès lors que les récidivistes auteurs et commanditaires des attaques contre une quelconque communauté ne sont pas sanctionnés de manière exemplaire, rien ne changera sur terrain ».

 

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